lui dîmes-nous : nous avons aussi en France des Chinganés où
tireuses de cartes, qui s’avisent de prédire l’avenir à ceux qui ont
la sottise de les croire. En France, comme ic i, il y a des fripons
et des dupes; nous n’avons jamais été fripons, et nous évitons avec
soin d’être dupes (1).
Les Turcs, les Arabes,- et même les Européens qui habitent A lep ,
se donnent quelquefois le divertissëment de la chasse au lièvre,
avec des faucons eleves pour cet usage. Les chasseurs sont à cheval
, et marchent ordinairement sur une même ligne ; ils sont précédés
de quelques Chinganés à pied, qui battent la campagne, et
font lever le lièyre au moyen de quelques chiens dressés à cet effet.
Dès que le gibier est pa r ti, un cavalier lâche après lui le faucon ,
qui l’atteint bientôt, le menace de son bec et de ses ongles, l’ar-
r e te , et donne aux cavaliers le -tems de s’en approcher, et aux
chiens celui de s’en saisir.
Mais lâchasse à laquelle les Européens vont avec le plus de plaisir
et le plus souvent, et pour laquelle ils n’ont pas besoin de Chinga-
n es, c est celle de la becasse. Ils peuvent tirer plus de-trente coups
de fusil dans une matinée s’ils ont de bons chiens. Cet oiseau de
passage est extrêmement commun dans les jardins d’Alep § et sa
chair est d un très-bon goût. Il-arrive dès que les neiges couvrent
les montagnes de l ’A sie mineure, et il ne quitte la Syrie qu’aux
approches du printems.
Le territoire d’A lep et des environs produit beaucoup de grains.
On cultive dans les jardins tous les fruits et tous les légumes d’Europe.
La vigne n y est pas abondante, quoique le terrain soit très-
propre à sa culture. Le mûrier y est rare , et on n’y élève point
de vers à soie. Les oliviers croissent, avec, les pistachiers,, sur les
coteaux pierreux, calcaires, les plus voisins de la ville. Le pistachier
végète bien à A lep : il mûrit ses fruits en fructidor, et donne
un produit assez considérable. Comme il porte ses fleurs mâles et
(i ) M . Grellmann prétend que les Bohémiens sont originaires de l’Inde , et qu’ils
appartiennent à la caste des Sudders. Voyez son Mémoire sur le peuple riomadej
appelé en F rance Bohémien , traduit de l’allemand par M. de Bock.
ses fleurs femelles sur des pieds diff’érens, on a l’attention de laisser
dans un champ quelques pieds mâles, afin de féconder les pieds
femelles. Un pistachier mâle suffit à cinquante ou soixante pistachiers
femelles. i
Les oliviers sont très-souvent endommagés par le froid, et sont,
pour cette raison, aussi petits que ceux du territoire d’Aix. Il fait
en été plus chaud à Alep qu’à A ix , et l’biver y est ordinairement
plus doux ; mais on y éprouve quelquefois, ainsi que nous l ’avons
dit, un froid très-considérable. L ’hiver de 1796 à 1797 a été si
rigoureux, que les orangers que l ’on a dans des caisses et que l’on
enferme l ’hiver dans les maisons, périrent tous, et les oliviers
souffrirérit considérablement.
Quoique l ’histoire naturelle des environs d’Alep soit extrêmement
riche , nous nous bornerons , pour le moment, à présenter
un petit quadrupède fort curieux, dont les Anciens nous avaient
beaucoup parlé, et dont les Modernes ont long-tems ignoré l ’existence.
(P/..28 ,Jig- 2. A , B. )
Les naturalistes avaient toujours confondu le petit quadrupède
nommé par les Grecs spalax ou aspalax, avec le talpa des Latins,
la taupe des Français, malgré la différence que présentent toutes
les parties de leur corps, quoique l’un soit réellement aveugle, 'et
que l’aiitre jouisse complètement de la faculté de voir. Cette erreur
nous: a été transmise par les Latins , qui ont traduit le mot aspala
x par celui As talpa , et qui ont désigné sous ce nom la taupe,
dont la manière de vivre était assez conformé à celle de l ’aspalax.
D ’ailleurs ;Ta petitesse des yeux de la- taupe aura pu les induire
en, erreur; ils l'auront crue aveugle sur l’autorité d’Aristote, ainsi
qu’ on le croyait parmi nous avant que.Seger, Borrichius, Schel-
hatner et tant d’autres eiissènt. décrit et fait connaître les organes
de la vueide cet animal. ■ .
Les Grecs avaient reconnu que l’aspalax ne pouvait , en aucune
manière, appercevoir les objètsy et on à long-tems• répété ¡après
e u x , sans examen , que la taupe qui se trouve en Europe était
aveugle. Quand l’o,bservation est venue nous éclairer , quand on
a remarqué distinctement les yeux de ce quadrupède, alors on a