C H A P I T R E X Y .
Description des environs de B a g d a d . Agerkouf. Tak-
K esré. A l-M éd a ïn . B abylone. H ellé. Æ esched-IIos-
sein. Cufa e t M e sch ed -A li. D es A rabes ouhabis.
C omme toutes les grandes villes de l’Empire othoman, Bagdad
n’est entouré que de terres incultes. A peine voit-on quelques jardins
à sa partie supérieure et inférieure, que l'on arrose péniblement
avec les eaux du Tigre. Il serait pourtant bien facile dè tirer
parti de la D ia la , rivière assez grande, qui vient se jeter dans le
T ig r e , à trois lieues au dessous de la ville. On amènerait avec peu
de dépenses une partie de ses eaux jusqu’au pied des murs, comme
on les avait sans doute amenées autrefois, et l’on fertiliserait, à
l’orient du fleuve, un terrain d’a lluvion, qui ne demande que des
bras et de l’eau pour se couvrir des plus riches moissons. La Mésopotamie,
à l’occident, touter inculte, presque toute ¿ouverte de
marais fangeux, où croissent des joncs et des roseaux, semble appartenir
, à re g re t, à un peuple qui ne connut jamais les vraies
sources de la prospérité des nations, qui vit dans l ’indigence sur
un sol fertile , et dans la contrée que les plus riches productions
de l ’Inde doivent franchir pour se rendre à leur destination.
Ainsi, comme on vo it, nous n’avons rien à dire des environs de
Bagdad, sous le point de vue d’utilité ou d’agrément. Ic i, point de
maisons de campagne, point de promenades , point de lieux de
récréation et de plaisirs , point de sites agréables ou pittoresques :
des déserts et des tombeaux, le silence et l ’uniformité, voilà ce
qu’on vo it, voilà ce qu’on remarque autour de cette ville. Nous
avons déjà dit un mot des deux villages qui sont au nord et au
nord-ouest de Bagdad, près du Tigre , et qui sont des lieux de
dévotion, l’un pour les T u r c s , et l ’autre pour les Persans. Il nous
reste à parler de quelques ruines : c’est presque partout ce que
cet Empire offre aujourd’hui de plus curieux et de plus intéressant.
A quatre lieues à l ’ouest de Bagdad on voit un monument antique,
connu des Chrétiens sous le nom de Tour de Nembrod, ou
Tour d e B a b e l, et des Arahes, sous celui à’Jg e rk o u f. C’est une
masse solide, carrée, construite en briques , que l ’on a attaquée
sur deux de ses faces afin d’y pénétrer, dans l’intention sans doute
tien connaître la destination, ou d’y chercher des trésors que les
Arabes supposent être enfermés dans tous les édifices anciens.
La construction de ce monument est si différente de tout oe qu’on
voit ailleurs, qu’il n’est pas peut-être hors de propos d’entrer
dans quelques détails à son égard. Les briques qu’on y a employées
ne sont pas cuites au feu , mais seulement séchées et durcies au
soleil : elles ont environ treize pouces en carré de surface, et deux
pouces et demi d épaisseur. On les a posées à plat, les unes sur les
autres, et cimentées avec la même tprre dont elles furent faites. On
en compte huit ou dix rangées, qui forment une couche de deux
pieds ou deux pieds et demi d’épaisseur. On a placé au dessus de
ces briques quatre ou cinq pouces de gravois ou terre grossière,
puis une couche de deux à trois pouces, formée de trois rangées
de paille ou de roseaux qui se croisent. Les couches de briques
recommencent au dessus de celles de roseaux , et les gravois sont
toujours placés au dessus des briques. Le tout se continue avec le
même ordre jusqu’au sommet de la tour. La seule chose que nous
ayions remarquée, c ’est que les lits de briques ne sont pas toujours
égaux : on en voit qui ont à peine deux pieds d ’épaisseur, et d’autres
qui en ont près de trois. On avait ménagé, à peu de distance
les uns des autres, des trous oarrés , qu’on dirait avoir servi aux
échafaudages, et peut-être aussi à .faciliter le dessèchement de cette
masse 5 car on voit évidemment qu’ils pénètrent fort avant dans
l’intérieur.
Les lits de paille, qui saillent aujourd’hui hors des briques, paraissent
d e loin ; ils sont parfaitement-conservés, et ont résisté a-u
teins, bien plus que n’aurait fait le bois le plus dur. Ils ont seulement
un peu bruni là où ils ont été exposés à l’air. Si l ’on parvient