eaux ont fait couler dans l’intérieur, empêchent de pénétrer dans
toutes les chambres et d’en suivre toutes les divisions.
Dans les premiers jours de pluviôse les négocians français, voulant
nous donner unè fête qui nous fût très-agréable , arrêtèrent
que nous parcourrions avec eux la ville des morts, jusqu’au-delà
des bains de Cléopâtre, et que nous viendrions dîner aux environs
d ’une mosquée située vers le lac Maréotis. Quoique la ville eût
fa it, depuis quelques jo u r s , sa paix avec les Arabes, la prudence
exigeait qu’on ne négligeât aucune des précautions que l’on prend
en pareil cas. On se fît escorter par plusieurs militaires, et on invita
à se joindre à nous quelques scheiks arabes et un grand nombre
de Turcs qualifiés.
Nous partîmes sur les huit heures du matin, bien armés, et montés
sur des chevaux arabes que nous avions bien de la peine à retenir.
Nous sortîmes par la porte de la colonne, et après avoir
longé les murs à l ’ouest nous dirigeâmes notre marche vers la mer.
Il n ’y avait pas un quart d’heure que nous avions quitté les murs
de la ville lorsque notre troupe s’arrêta pour nous laisser visiter
une catacombe. Nous en avions déjà rencontré un grand nombre,
mais leur ouverture était trop obstruée pour nous permettre d’y
entrer. Celle-ci ne s’annonçait guère mieux. Que l ’on se figure un
trou de renard presque horizontal, situé dans un enfoncement, et
l’on aura une idée assez juste de son entrée. Il faut se glisser, en
rampant avec effo rt, l ’espace de douze à quinze pieds, après quoi
on se trouve dans une chambre carrée, assez grande, mais si comblée
par les terres que les eaux pluviales y ont entraînées, qu’on
peut à peine s’y tenir assis sans toucher de la tête contre la roche
taillée qui en forme le plafond. L ’un des côtés est terminé par un
enfoncement semblable à une alcove. On passe de là , encore en
rampant, dans d’autres chambres également encombrées par les
terres, dont les parois ne présentent rien de remarquable. On y
distingue, en quelques endroits, les loges à momies, qui ont été
détruites avec intention, et dans d’autres on les trouve encore entières
et parfaitement semblables à celles dont nous avons déjà
parlé, Ces loges, dans quelques chambres, n’avaient pas été vidées
a u .
au ciseau, mais leur position y était indiquée par des lignes rouges
tracées sur le mur, aussi fraîches que si on venait tout récemment
de les former. L ’une de ces chambres présente une sorte de décoration
en sculpture, au milieu de laquelle on voit une statue en
forme de momie , de la taille d’un enfant, saillante de huit à neuf
pouces, mais adhérente à la roche.
Quelques-unes des loges furent fermées après qu’on y eut placé
le corps embaumé ; car elles portent l’empreinte de leur cloison
en maçonerie, formant des bavures tout autour de leur ouverture.
Ces cloisons étaient enduites d’un ciment à chaux et à sable de
deux ou trois lignes d’épaisseur, qui existe encore en beaucoup
-d’endroits, et qu’on retrouve aussi sur les murs et sur le plafond
de toutes les chambres;..ce qui n’a pas empêché que quelques murs
ne soient endommagés, et qu’une partie des voûtes ne soit affaissée.
Ceux d’entre nous dont le corps avait un peu trop d’ampleur,
ou n’étaient pas entrés dans la catacombe , ou n’avaient pu nous
suivre dans tous les détours qu’on est obligé de faire dans ces souterrains.
Nous parcourûmes de cette manière plusieurs salles, glissant
avec peine dans des passages:forcés, étroits, tantôt horizontaux
, tantôt en pente et quelquefois presque perpendiculaires ;
après quoi nous sortîmes couverts de sueur et de poussière, et
extrêmement fatigués d’une marche aussi pénible. Les tours èt les
détours qu’on est obligé de faire dans cette course souterraine ne
laissent qu’une idée confuse du plan et de la disposition de la catacombe
; Cependant on ne doit pas douter que ces travaux n’aient
de la régularité. La confusion qu’on y trouve, dépend moins de lâ
nature des lieux que l ’on parcourt, que de celle des passages par
où on arrive. . .
: Lorsqu’on réfléchit sur les progrès de l’ensablement qui a eu lieu
dans ces souterrains, et sur son élévation bien au dessus1 des véritables
portes dé communication d’une chambre à l ’autre , on est
réellement surpris, et d’autant plus qu’il n’a pu s’opérer que par
les Ouvertures naturelles, puisque les parois des chambres sont revêtues
d’un ciment peu altéré', et que: lé plus grand nombre des
Tome I I . D