que l’heure de l’assaut général ü ’était pas encore venue. Les Turcs
cependant réparaient leurs murailles, et se tenaient prêts à repous-
ser les Persans s’ils osaient se présenter.
A u x premières nouvelles dés entreprises de K erim, les pachas de
"Mossul, de V an , de Diarbekir, d’Alep et de Damas reçurent l’ordre
de marcher vers Bagdad avec les troupes qu’ils avaient autour
d’eux. On crut qu’ils/allaient se joindre à Omar , et agir de concert
avec lui pour faire lever le siège de Bassora ; mais leurs instructions
sans doute portaient seulement de donner satisfaction au roi de
Perse ; car à leur arrivée à Bagdad ils firent couper la tête au pach
a , après quoi ils retournèrent à leur gouvernement sans faire
aucune tentative'pour délivrer Bassora.
Lorsque Kérim apprit la mort d’Omar, il parut satisfait, et promit
de retirer ses troupes du territoire othoman : néanmoins l’armée
de Sadek ne fit aucune disposition à cet effet ; le siège, au
contraire, fut continué et poussé avec plus de vigueur qu’aupa-
rayant;
En ordonnant la mort d’Omar ? la Porte n’avait pas senti qu en
sacrifiant un pacha du premier rang dont la conduite était irréprochable
, c’était favoriser les vues de Kérim, c’était lui fournir
les moyens de s’emparer, ainsi qu’il le desirait, dearives du Tigre
et de l ’Euphrate, depuis Hit et Bagdad, jusqu’au golfe Persique.
La Porte fut donc trompée dans son attente, et la perte de Bassora
assurée, puisqu’il n’était plus tems de lever une armée pour marcher
à la défense de cette ville.
Il y avait treize mois que le mutselim ne recevait aucun secours
ni aucune nouvelle du pacha de Bagdad. Ses vivres étaient consommés;
les munitions lui manquaient ; la famine faisait un ravage,
effrayant dans la ville ; plusieurs fois le divan assemblé avait représenté
au mutselim qu’une plus longue résistance n’ajouterait rien .à
sa gloire, et ferait périr sans nécessité un très-grand nombre d’ha-
bîtans : il le conjura‘enfin de ne pas prolonger l’état de souffrance
et d’alarmes dans lequel chacun se trouvait, et de livrer à l’ennemi
une ville qu’on ne pouvait plus défendre sans être tous exposés à
périr. Le mutselim se laissa toucher et se rendit à discrétion.
Satlek-Klian entra dans la ville vers le milieu de mai 1776 > s empara
du mutselim et de ses principaux officiers, les envoya au roi
de Perse, et mit une forte contribution sur les habitans. Il fit observer
à sa troupe une très-bonne discipline; dë sorte que le commerce
reprit bientôt son cours ordinaire, et la ville jouit de la plus
grande tranquillité, Les Anglais ne tardèrent pas à revenir et à
reprendre leurs spéculations de commerce.
Bassora resta au pouvoir des Persans jusqu à la mort de Kerim,
qui eut lieu en 1779. Sadek , qui avait 1 espoir de succéder à son
frè re , évacua promptement la ville et se rendit en Perse : Hassan,
alors pacha de Bagdad, y envoya aussitôt un mutselim, qui en prit
de nouveau possession au nom du grand-seigneur.
Après la mort de Kérim et l’évacuation de Bassora, Suleiman
obtint sa liberté et la permission de retourner enTurquie. Sa bonne
conduite avait fixé sur lui les regards de la Porte; il s était fait a
Bassora une réputation de bravouve, d’intelligence et de droiture
qui se répandit à Bagdad et dans tout le pachalik. Hassan déplaisait,
et aux grands, et au peuple; il n’était point capahle de satisfaire
la Porte , de réprimer les Arabes, de contenir les Curdes et
d’en imposer aux Persans. Suleiman s’était mesuré avec ceux-ci ; il
avait obtenu leur estime ; il avait été leur prisonnier. Suleiman ,
sous tous les rapports, était l’homme qui convenait à la Porte ; il
reçut donc les trois queues, et fut nommé pacha de Bagdad en
1780.
Suleiman, à l ’exemple de ses prédécesseurs, n’a pas été plutôt
installé, qu’il n’a négligé aucun moyen de se maintenir dans sa
place ; mais bien loin d’accabler le peuple par dés extorsions et par
le monopole , comme font la plupart des autres pachas , il s’est
appliqué, au contraire, à soulager la classe malheureuse, et empêcher
que ses principaux officiers ne commissent des injustices, ne
se permissent des actes de tyrannie. Il n a pas souffert que les A ra bes
troublassent la navigation des deux fleuves. Il a favorisé le
commerce en le protégeant de tous ses moyens, en ne mettant
aucune taxe nouvelle, en veillant à la sûreté dés caravanes, en prêtant
même de l’argent sans intérêt aux négociant qui avaient éprouvé
E e e 2