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Sup.n» 3-6,
4 6 2 H i s t o i r e E c c l e s i a s t i q u e .
dit Juftin. Rien n’eft plus précieux que la philo-
fopnie, qui feule nous approche de Dieu. Mais
la plûpart ne fçavent pas quelle elle eft , ni pourquoi
elle a été envoyée aux hommes. Car il n’y
auroit , ni Platoniciens, ni Stoïciens, ni Peripa-
teticiens , ni Pithagoriciens ' ' ue c’eft une
feule fcience. Ce qui l’a ainfi divifée , c’eft que
ceux qui s’y font attachez les premiers , font devenus
illuftres, & ont été fuivis par les autres qui
n’ont point examiné la vérité : mais frappez des
vertus &c des difcours extraordinaires de leurs
maîtres, ils ont tenu pour vrai ce qu’ils avoient
appris d’eux. Ils ont enièigné les mêmes dogmes
à ceux qui les ont fu iv is, k ont gardé le nom
du pere de chaque opinion. Juftin raconte en-
fuite les differens maîtres, dont il avoit eifayé ; jufques
à ce vieillard, qui le déiàbufanr de laphilo-
fophie humaine, lui fit connoître l’autorité des
prophetes,& lui perfuada que la doétrine de Jefus-
Chrift étoit la feule philofophie fèure k utile.
V o ilà , dit Ju ftin , comment je fuis philofophe.
Je voudrois que tous euffent le même courage,
pour ne point quitter les difcours du Sauveur.
Car ils ont je ne fçai quoi de terrible , capable de
confondre ceux qui s’écartent du droit chemin:
k font au contraire un repos très-doux à ceux
qui les médirent. Si vous avez donc quelque
foin de votre fà lu t, k quelque confiance en Dieu:
vous pouvez devenir beureux , vous à qui cetre
doétrine n’eft pas étrangère : en reconnoiffant !e
L i v r e t r o i s i e ’ m e . 4 63
Chrift, k prenant le chemin de la perfeétion.
Après que Juftin eut ainfi parlé, ceux qui é-
toient avec Tryphon s’éclatèrent de rire : mais
Tryphon fouriant feulement, lui dit : Je reçois
rout le refte , k j ’admire votre a rd eu r, pour la
divinité : mais il valoir mieux vous attacher à la
philofopbie de Platon, ou de quelqu’autre ; vous
exerçant à la patience & à la tempérance : que
de vous laiffer tromper par des menfonges, k
fuivre des hommes de néant. Car demeurant dans
les moeurs de philofopbe , & vivant fans reproche
, vous pouviez efperer un meilleur fort. Mais
ayant quitté Dieu , pour mettre votre efperance
en un homme, quel fàlut pouvez-vous attendre ?
Si vous voulez donc me croire, car je vous compte
déjà pour mon am i, commencez par vous faire
circoncire ; enfuite gardez le fabbat & les fêtes ordonnées
de Dieu , en un mot tout ce qui eft écrit
dans la lo i, k peut-être qu’alors Dieu vous fera
mifericorde. Quant au C b rift, s’il eft né, k s’il
eft quelque p a r t , il eft inconnu & ne fe connoît
pas lui-même, k il n’a aucune puiffance jufqu’à
ceque Elie vienne le facrer ,& le faire connoître à
tout le monde. Cependant vous avez reçû une
fauffe o p in ion , k vous vous figurez un Chrift,
pour lequel vousperiffez mal à propos. On void
ici que les Juifs, forcez par les prophéties, qui marquoient
le tems du Meffie ; n’ofoient dire qu’i!
ne fût pas venu, k cherchoient des fubtilitez pour
les éluder, comme ils ont toûjours fait depuis,
y - G em a t '. a i
S a n h ed r , c . x j .
16.
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