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2 6 4 H i s t o i r e E c c l e s i a s t i q u e .
dix ftad e s, c’eft-à-dire près de quaux licuës, &
ils en dépoüillerent tout le païs ; en forte que les
environs de Jerufalem", auparavant délicieux à
v o ir ,fu ren t entièrement défigurez &: niéconnoif
fables. Enfinaprès descombats fu r ieu x ,T ite prit
la fortereife Antonia : la ru in a , & vint jufqu’aii
teniplc le dix-feptiéme de Ju ille t : jour auquel le
Tamide ou facrifice perpctuel avoit ccfl'é faute
d’h om m e s, pour j ’oifiir : ce qui alîîigeoit extrêmement
le peuple. Titc eifa'ïa encore par Jofe
& par lui-même d’obliger les féditieux à fe rendre,
fans forcer le lieu fiin t , mais inutilement. Il vint
aux a ttaq u e s, k fe rendit maître des deux galeries
extérieures du temple , qui le fermoienc au
feptentrion k à l ’Occident. Les Ju ifs avoient
déjà brûlé une partie de ces g ale ries, & les Romains
achevèrent.
Cependant la fimine croilToit toujours dans
la ville. Sur la moindre apparence de nourriture
dans une maifon , c’étoit une guerre ; k les perfonnes
le.s plus cheres en venoient aux mains. Les
voleurs couroient comme des chiens enragez h
gueule béanteifrappoicnt aux portes,& rcntroient
aux mêmes m a ifo n s, deux ou crois fois en une
heure. On mettoit tout fous la dent : même ce
qui ne feroit pas à Tufagc des bêtes les plus fales,
Ils ne laifferent, ni leurs ceintures, m les cour-
ro'ïes de leurs fan d a le s, ni les cuirs de leurs bouchers.
On mangeoit les relies de vieux foin : on
çn ramuffoit ■ jufqu’aux moindres brins , dont
une
î- XXXIX.
Mere q ui mange
Ton en fan t.
L i v r e S e c o n d . 26;
une petite quantité fe vendoit au p o id s , quatre
dragmes attiques : on eftime la dragme environ
huit fols de notre mohno’ïe.
Une femme nommée Marie , fille d’Eleazar
d’aii-de-Ià du Jo u rd a in , diftinguée p a r fo n b icn&
par fa naiffance, fe trouva comme les autres enfermée
dans la ville. Les féditieux lui prirent tout ce
qu’elle avoir apporté ,& enfin le refte de fes joïaux-,
& jufqu’a la nourriture qu’elle pouvoir trouver de
jour en jour.Ou trée d cd o u leu r,e lle le sch a rg eo it
d’injures k de malédidions : faifanc fon poffible
pour les obliger à la tuer. Enfin preiléc de la faim
& du defefpoir, elle prit fon enfant qu’elle nour-
riiToit de fon lait : & le regardant avec des yeux
égarez, elle dit ; Malheureux e n fan t, à qui eft-ce
que je ce garde ? Eft ce pour mourir de faim , ou
pour devenir efclave des R om ains, ou pourtom-
ler entre les mains de ces féditieux encore pires ?
Elle le tue , le rô t it, en mange la moitié , k cache
le telle. Auffi-tôt les féditieux accoururent , attirez
par l’odeur de la viande ; k tirant leurs épées
mcnaçoient la femme de l’égorger fur le champ ,
fi elle ne la leur montroit. Je vous cn ai gardé
une bonne p a r t , dit-elle , & leur découvrit ce
qui reftoit dc fon enfant. Ils furent faifis d’hor-
teur , & regardant fixement ils demeuroient immobiles
k hors d’cux-mèmcs. Elle continua :
C eft mon en fan t, c’eft moi qui Tai tué ; vous en
pouvez bien manger après moi. "Vous n’êtes pas
plusdélicatsqu’unefemmejni plus tendres qu’une
Tome 1. L i
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