4 REPTILES OPHIDIENS.
quoique très piquants et acérés, ne sont destinés réellement
qu'à retenir momentanément la proie qu'ils ont saisie et lorsqu'elle
jouit encore de la vie et des moyens de résistance.
Ces crochets, lisses sur toute leur surface, pointus, courbés
tous dans le même sens, de devant en arrière, espacés
entre eux et distribués sur les deux mâchoires, sont arrangés
sur chacune d'elles comme les pointes des fils métalliques dont
sont garnies les plaques des cardes employées pour agir sur
les filaments qui doivent composer le tissu de nos étoffes.
Ces crochets retiennent la proie vivante que les mâchoires
ont saisie et qui y demeure accrochée, comme par des hameçons
multiples; puis le jeu de ces mâchoires agissant alternativemenfde
devant en arrière, fait avancer cette proie peu à
peu vers le pharynx, pour aider l'acte de la déglutition,
cette action d'avaler ne pouvant s'opérer que sur la totalité
de la masse saisie et non par portions séparées, distinctes,
comme cela a lieu chez la plupart des animaux carnivores.
Telle est la principale différence, reconnue et bien établie,
pour les deux premiers sous-ordres de cette section des Reptiles
qu'on nomme les Ophidiens ou les Serpents. Tous,
( nous le répétons à dessein), ont constamment les dents ou
les crochets sus-maxillaires courbes, lisses sur toute leur surface
ou sans cette entamure longitudinale qu'on nomme cannelure
ou sillon. Nous avons cru pouvoir indiquer ces deux
premiers sous-ordres par la désinence d'un nom caractéristique
et notable qui leur reste commun ou général, et qui signifie
dents : Odontes ; mais nous faisons précéder cette marque
distinctive d'un terme rappelant la particularité qui dénote
ces deux sous-ordres, selon la différence du mode d'implantation
de ces crochets sur l'une ou sur les deux mâchoires.
Les trois autres sous-ordres, dont le caractère se trouve
inscrit dans la rainure, l'entaille ou le sillon que l'on peut
aisément reconnaître à la surface de l'une ou de plusieurs de
Jeura dents, ont reçu également un nom dont la désinence,
CLASSIFICATION DES SEItPEMS. 3
restant aussi la même pour chacun d'eux, indique la présence
de cette sorte de gouttière destinée à laisser couler et à
inoculer chez la victime, piquée par cette pointe, l'humeur
vénéneuse dont toutes ces espèces paraissent armées. Cette
rainure, ou le sillon longitudinal inscrit sur les dents, dites
crochets à venin, est exprimé par la terminaison d'un mot
composé d'ailleurs, mais qui, par sa désinence, rappelle cette
ligne enfoncée et creuse. CTest une expression grecque, souvent
empruntée en français et dans presque toutes les autres
langues vivantes, surtout dans les arts: c'est le mot Glyphe,
qui peut se joindre facilement à d'autres termes initiaux
indiquant la position ou la forme de ces dents sillonnées.
Dans l'un des premiers sous-ordres, dont tous les crochets
sont lisses ou sans cannelures, on n'a observé leur présence ou
leur absence que sur une paire de mâchoires seulement : tantôt
sur celles du côté du crâne ; tantôt sur les branches de l'os
sous-maxillaire. Or, c'est là un caractère unique et très-évident
qui réunit plusieurs genres dont les espèces sont jusqu'ici peu
connues, parce qu'aucune ne parait vivre en Europe. Ces Serpents,
très-petits et très-faibles, ne peuvent être rapportés
qu'à un seul sous-ordre, subdivisé lui-même en deux familles
et en huit genres distincts. Toutes les espèces ont un corps
arrondi, dont les deux extrémités sont à peu près de même
grosseur ; leur bouche est fort petite et leurs crochets trèsgrêles.
Comme ces Serpents sont de petite taille, de la gros-
. seur au plus d'une plume à écrire, que leur corps est couvert
de très-petites écailles polies et luisantes, qu'ils ressemblent
un peu, pour la forme, à des vers de terre, aux Lombrics avec
lesquels on a pu les comparer à cause de leurs habitudes et
de leur manière de vivre en se retirant dans des galeries sous
terre: nous les avions d'abord nommés Scolécophides, ce qui
signifie Vermiformes. Maintenant, nous préférons une désignation
qui porte spécialement sur cette particularité que Tune
des deux mâchoires n'a pas de dents, lorgque l'autre en est