l’êlre qui les punit est libre de ne pas le faire,
prennent devant lui l ’air suppliant quand ils. se sentent
coupables ou qu’ils le voient fâché. Ils se perfectionnent
ou se corrompent dans la société de
l ’homiüe; .ils. sont susceptibles d’émulation et de
jalousie ; ils ont entre eux un langage naturel qui
n’est, à la vérité, que l’expression de leurs sensations
du moment ; mais l’homme leur apprend à entendre
un langage beaucoup plus compliqué par
lequel il leur fait connaître ses volontés et les détermine
à les exécuter.
En un mot, on aperçoit dans les animaux supé-
rieurs un certain degré de raisonnement avec tous
ses effets bons et mauvais, et qui paraît être à
peu près le même que celui des enfants lorsqu’ils
n’ont pas encore appris à parler. A mesure
qu’on descend à des animaux plus éloignés de
l’homme, ces facultés s’affaiblissent ; et, dans les
dernières classes, elles finissent par se réduire à des
signes, encore quelquefois équivoques, de sensibilité
, c?est-à-dire à quelques mouvements peu
énergiques pour échapper à la douleur. Les degrés
entre ces deux extrêmes sont infinis. -
. Mais il existe dans un grand nombre d’animaux
une faculté différente de l ’intelligence ; c’est celle
qu’on nomme instinct. Elle leur fait produire de
certaines actions nécessaires à la conservation de
l ’espèce, mais souvent tout-à-fait étrangères aux
besoins apparents des individus , souvent aussi très
compliquées, et qui, pour être attribuées à l’intelligence,
supposeraient une prévoyance et des con-
nai^ances infiniment supérieures à celles qu’on peut
admettre dans les espèces qui les exécutent. Ges
actions, produites par l’instinct, ne sont point non
plus l’effet de l’imitation, car les individus qui les
pratiquent ne les ont souvent jamais vu faire à
d’autres; elles ne sont point en proportion avec
l’intelligence ordinaire, mais deviennent plus singulières,
plus savantes, plus désintéressées, à mesure
que les animaux appartiennent à des classes
moins élevées, et, dans tout le reste, plus stupides.
Elles sont si bien la propriété de l’espèce, que tous
les individus les exercent de la même manière sans
y rien perfectionner.
Ainsi les abeilles ouvrières construisent, depuis
le commencement du monde, des édifices très ingénieux
, calculés d’après la plus haute géométrie,
et destinés à loger et à nourrir une postérité qui
n’est pas même la leur. Les abeilles ét les guêpes
solitaires forment aussi des nids très compliqués
pour y déposer leurs oeufs. Il sort de cet oeuf un
ver qui n’a jamais vu sa mère , qui ne connaît point
la structure de la prison où il est enfermé, et qui,
une fois métamorphosé, en construit cependant une
parfaitement semblable pour son propre oeuf.
On ne peut se faire d’idée claire de l ’instinct,
qu’en admettant que ces animaux ont dans leur sen-
soriuin des images ou sensations innées et constantes,