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8 0 V O Y A G E au L E V A N T
que cc fût pour mieux reconnoitre rivé avoir la hardicflc d'aflifter à la
les corps dc fcs Mufulmans qui fe- Pnere, & qu'il y fût pris fur le fait.
roicnt morts dans les guerres qu'il
faudroit entreprendre & ibutenir
pour l'introduûion & pour le maintien
dc fcs Loix , afin dc les honorer
comme des Martyrs après leur
fcpulture, foit comme nous avons
dit, afin d'attirer plus aifément les
Juifs à íes erreurs par cette conformité
dc Cérémonie, foit enfin que
ce Legidateur impur par cette faufle
aft'cÊtation d'une pureté extericure
voulût cacher plus aifément aux
yeux du monde iesimpuretcz de fon
ame. Quoi qu'il en foit il obligea
ceux qu'il avoit déjà engagé dans
fcs erreurs, à fe faire ôter le prcpucc,
parce que comme quelque uns
le prétendent, cette partie pouvant
ailcmcnt cacher quelques faletez , il
pourroit arriver qu'un Mahometan
qui viendroit à prier Dieu fans s'etre
parfaitement purifié, ne fiit pas
exaucé dc Dieu, mais regardé delui
comme Mordar, c'cfl à dire
comme un Infidèle , impur &
fouillé.
Cette Circoncifion que les Turcs
appellent Schounnet, n'eft regardée
que comme une marque de l'obeif-
Jance qu'ils rendent à la parole non
écrite de Mahomet , car il n'en a
il feroit brûlé tout vif, ou du moins
il feroit empalé.
Quoique ceux qui fe font circoncire
doivent avoir l'aagc d'onze ou
douze ans, pour les raifons que
nous avons déjà dites, il y en a
pourtant quelques uns qui le font à
fcpt ou huit. D'ordinaire on ne les circoncit
pas plus jeunes, mais bien,
plus aagez, comme de quatorze ou
quinze ans, & plus, fuivant la volonté
des parens , parce que cette
Cérémonie fe peut fort bien diiTérer
par pauvreté, lors que celui qui
doit être circoncis, ou bien fcs parens,
ne font pas en état de faire les
frais de la Circoncifion , auquel cas
ils font obligez d'attendre que qvielque
perfonne puiflânte fe failê circoncire
, afin que fe cachant pour
ainfi dire fous cette compagnie,, ils
puiflènt être dcchargez de la depenfe.
Quand le jour de la Cérémonie
eft arrêté, on prépare unfeftiiidans
la maifon de celui qu'on doit circoncire
, & cependant on lui fait
prendre fes plus beaux habits, on le
fait monter fur un cheval , ou fur
un chameau, & on lepromenepar
toute la ville fi elle n'eft pas trop
rien écrit dans fon Alcoran ; maisi grande , ou bien , comme cela fe
voiant qu'il avoit déjà beaucoup dc
SeftateuiS) & qu'il lui en venoitencore
tous les jours davantage, il
leur ordonna feulement de fediftinguer
ainfi, tant des Chrétiens qui
ont le prepuce , que des Juifs qui
font circoncis , mais d'une autre
maniere qu'eux, quoique pourtant
les Mahometans admettent leur Circoncifion,
Or comme ce feroit une marque
dcdelbbeiflàncc àlaLoi , que d'être
incirconcis, ceux qui ont encore le
prépuce, comme les enfans de cinq
ou fix ans, les Chrétiens & les autres
qui n'ont jamais receu la Circoncifion
, ne font point admis aux
prières publiques. II eft vrai qu'il
n'y a point à la porte de leurs Temples
de gens commis pour faire cette
pratique à Conftantinople , par
tout le quartier où il demeure. Ses*
Camarades d'ecole, ou fes amis, le
fuivent tous à pied , en jettant dc
grands cris de joye, dc cc qu'on va
le recevoir au nombre des Mufulmans
ou des vrais fidèles. Lors que
cette Cavalcade eft achevée & que
le monde eft retourné à la maifon
l'Imam dc la Mofquée du Quartier
fait une petite exhortation au fujet
de l'opération qui fe va faire, après
quoi un Chirurgien aiant mis le
jeune honrme fur le Sopha ou eftradc,
deux de fes ferviteurs tiennent
un linge etendu devant lui, & alors
tirant le prépuce le plus qu'il eft poffible
, & le ferrant avec une petite
pincette tout auprès dc la tête, il le
coupe avec un rafoir. Cela tait il
recherche; mais fi quelque Chrê-j montre aux affiftans la partie coupée
tien, conwe il eft quelque fois ar-! qu'il a raife fur le bout de fondoigt
pour
e n E G Y P T E , S Y R I Ë , &c. 8 t
pour la faire voir à la ronde, criant dire comme un proverbe ordinaire ;
cependant plufieurs fois alla. Hec- Er Kimfena Giaour Olmkhidieche
her ja alla alla. Enfuité il bande cc- ci Mufulman olur. C'eft à dire celui
lui qu'il vient de circoncire, qui fait' qui a été un mauvais Chrétienne Jera
aflTez connoitre par fes cris quelle
douleur lui caulè une plaie faite
dans une partie fi fenfible , & les
affiftans redoublant leurs cris, félicitent
la nouveau circoncis de ce
qu'il eft reccu au nombre des fide-
•les, après quoi ils vont prendre place
au Sofra c'eft à dire à la Table,
où ils font rcgalez félon les moiens
des parens du nouveau Mufulman.
Les liberalitez que les perfonnes
riches exercent à la Circoncifion dc
leurs enfans montent fouvent à de
grandes ibmmes, car outre les prejamais
bon Turc, Et à dire le vrai
tout le mal qui fe fait en Turquie
vient plutôt du côté de ces Renégats
que de celui des Turcs, qui
font ordinairemeiit d'un naturel fort
civil & fort traitable, principalement
lors qu'ils fe rencontrent avec
des perfonnes qui lavent s'accommoder
à leurs maniérés, & s'abftcnir
des chofes qui les fcandalilént.
11 eft vrai que le nombre de ces
Renégats eft plus grand que celui
des Turcs mêmes , & que la plus
part des Bailâs & dc toute leur
fens qu'ils font à quantité de jeunes, faire, ne font»que de ces defcrtcurs
garçons qui fe font circoncire à cet- ! de la Religion Chrétienne , ou de
te occafion & aux depens de ces per- celle des Juifs.
fonncs riches, outre auiïï la depcn
fe du fcftin qui fc fait à toute la compagnie
, ils diftribuent encore de
grandes aumônes aux pauvres de
leur voifinage , afin que par leurs
prières ils attirent la grâce dc Dieu
llir le nouveau Circoncis , & fur
toute la famille.
La cérémonie qui s'obferve à la
circoncifion des Renegáis eft prefque
la même, excepté que comme
II y a trois fortes de Rencgats.
Les premiers font ceux que le fort a
fait trouver entre les enfans de Tribut
ce ne font pour l'ordinaire que des
miferables, on porte après eux deux
baflins pour y amaflèr les aumônes
que la plus part des Speftateurs ne
leur refufent point. Ils portent auffi
bien que les autres , une fleche
dans leur main , laquelle ils tien-
que le Grand Seigneur levé de
temps en temps par tout fon Empire:
les féconds, ceux qui changent
à deffein de Religion , peut être
dans l'efperance de rendre leur condition
meilleure : & les troifiémcs,
ceux qui ne le deviennent que par la
crainte dps châtimens qu'ils ont
peut-être méritez pour quelque faute
qu'ils auront commife , ou bien
à caufe du mauvais traittement des
maitrcs qu'ils ont eu le malheur de
rencontrer : mais le nombre de ces
derniers etl le moindre.
Les Efclaves des Turcs ne font
nent en haut, le fer tourné en bas, pas fi malheureux qu'on fe l'imagipour
faire croire à tout le monde ne d'ordinaire. Ils font fouvent les
qu'ils fe laillèront plutôt percer de
mille coups , que de renier jamais
féconds maitres de la maifon, &
l'on a même des exemples d'Efclaves
la foi Mahomctane. Mais les gens qui lë trouvoient fi bien chez leurs
d'efprit doutent ordinairement de la
fincerité de ces nouveaux Mufulmans
, parce qu'ils ont experimenté
depuis longtemps que ces fortes de
gens qui ont fi aifément quitté leur
premiere Religion , de laquelle
peut-être ils n'ont jamais été bien
perfuadez , ne feront pas plus dc
difficulté d'abondonner la nouvelle
ylgas, qu' après en avoir obtenu la
liberté , & être retournez en Europe,
où ils ne trouvoient pas ce qu'- '
ils avoient efperé, ils font retournez
en Turquie pour s'engager une feconde
fois de leur bon gré à une
fervitudc qui leur avoit femblé d'abord
infupportablc. Ces Efclaves
font heureux dans leur malheur,
qu'ils embraflfent & pour laquelle ils lors qu'étant en quelque ville confiibumcttent
leur corps à une ceremo-1 derable ils rencontrent un bon Mainte
fi douloureufe. Ce qui leur fait'tre, & qu'ils ont quelque talent.
L Car
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