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lerins y logent )ufqu'a ce qu'ils aillent
à Jerufalcm. Ce Couvent
qui a une fort belle Eglife à été
bâti, à ce que l'on dit, dans l'endroit
même oii étoit autrefois la maifon
de Nicodemc. Celle du S'. Lub
qui eft tout auprès, étoit renfermée
avec elle dans une même enceinte de
murailles. Outre ce Marchand Hollandois
il y a encore trois ou qua^
tre Marchands François qui de»
tneurent à Rama. Le Negoca
qu'on y fait confifte en huile > en
favon , & en fil & toiles de Coton.
Les habitans font , autant
que je le puis conjefturer, environ
trois mille ames , tant Chrétiens
que Turcs. Toutes les Caravanes
qui vont du Caire à Damas
, àAlep, &à Conftantinople
doivent paiTer près de Rama, auffi
y en eut-il une qui y dreffa fes
Tentes pendant que j'ctois occupé
à dcffiner cette place.
Quantité Quelques femaines après que j'y
rcilef "'S ' ^ '^'^¿tovîeiîLnt"'
on eut ici un vent Sud-Eft
du Defert qui comme il venoit du defert par
Jourdain caufa un grande
J-ourdata. chaleur & qui dura quelques jours.
C'eft peut-être à ce vent qn,il faut
attribuer le prodigieux amas de
fauterelles qui viennent fondre ici
dans de certaines années, qui couvrent
tellement la terre qu'à p)cine
la peut-on voir. La grandeur de
ces infeftes qui font tant de dégât,
eft à peu près la même que celle
de nos cigales. On me raconta
qu'une fois elles mangèrent dans
l'efpace de; deux heures toutes les
herbes qui étoient autour de Rama,
& que même dans le jardin de
la maifon ou j'étois logé, elles
avoient mangé la tige des artichaux
jufquc dans la terre, d'où
il eft aifé d'inferer le dommage
qu'elles peuvent caufer , comme
je le rapporterai lors que je
parlerai de l'endroit ou je l'ai vu
de mes propres yeux. La plus
attribuer cette prevoiance à des
oifeaux. Il n'y a pas jufqu'aux
Cicognes qui leur font la guerre,
car lors que le Soleil commence à
fe coucher ces fauterelles fe pofent
toutes à terre n'aiant plus la force
de voler , & elles y demeurent
jufqu'a ce que le Soleil fe leve.
Dans le temps qu'elles couvent
elles font une foilè en terre de la
profondeur d'un bon pied, & elles
y mettent leurs oeuft qui font de
la groiTeur de l'anis fucré , & qui
s'entretiennent en un petit faifceau
long ou il y en a autour de quatrevmgt
plus ou moins. De ces oeufs
il vient au bout de quinze ou feize
jours de petites Sauterelles, mais
en fi grande quantité qu'on en
eft effrayé, elles font toutes noires
quand elles ' viennent d'eçlorrej •
mais elles changent en un jour ,
& elles deviennent vertes comme
fi l'Herbe fur laquelle elles fe jettent
leur communiquoit là couleur,
neantmoins il leur faut bien quinze
jours ou trois femaines avant
qu'elles puiiTent fe fervir de leurs
ailes.
Pendant que je demeurois à Ra- f«™«-
ma il y vint un Omar Baflà qui fit J ™ %
plufieurs fois l'honneur au S'. Luh cruauté
de venir manger chez lui. Il étoit Î'
BalTa de Gaza, de Rama & de "
tout le païs des Philiftins. C'étoit
au refte un homme d'une fi prodigieufe
force qu'étant à cheval il
manioit une lance ou une picque
du poids de fix vingt livres, avec
autant d'agilité que fi elle n'euft
été que d'une pefanteur ordinaire.
Deux hommes à pied portoient
ordinairement cette lance après lui.
Son plus grand divertiflèment étoit
la chaiTe qu'il aimoit beaucoup, &
à laquelle il étoit fort adroit , car
il tuoit ordinairement les fangliers
du premier coup, & rarement falloit
il qu'il en donnât un fécond.
Il envoia un jour au S'. Lub la
hure avec une partie du corps d'un
part des oifeaux les mangent & en ' fanglier qu'il avoit tué de fa profont
une grande deftruiStion , tant pre main, & qui étoit fi effroiapour
s'en fervir de nourriture que i blemenc grand que je n'en n'ai japour
prevenirle dommage qu'elles I mais vu de femblable. /e lui aidai
cauferoient, fi du moins on peut à le manger en buvant à fa fanté
&
e n E G Y P T E , S Y R I E . &c.
& je le trouvai bon par excellence.
Je l'ay vu fouvcnt aller a la chalTe
des Chakalles ou chiens fauvages
qui font ici en grande quantité. J'ai
parlé de ces animaux au fueillet f6.
de forte qu'il n'eft pas necciT'aire d'en
rien redire ici. Cette cliaflè fe fait
avec un Leopard qui y eftdrelTédês
fa jeunefle-, le chafleur le tient devant
foi fur fon Cheval, & va toujours
ainfi jufqu'a ce qu'il rencontre
un Chakal , audi tôt le Leopard
faute en bas , & va en fe tapiflânt
contre la terre jufqu'a ce qu'il croye
qu'il pourra attemdre la bête. Alors
il fait quelques faïus avec une agilité
incroyable , mais il n'en fait jamais
plus de trois qui font chacun
de dixfept ou dixhuit pieds, il faut
qu'il attrape le Chacal en ces trois
lauts , autrement il le laiiFc là, &
ne fe donne plus la peine de le
pourfuivre, paroiifant même tout triîle
d'avoir manqué fon coup; jufques
là que fon Maitre eft obligé
de l'appeller à foi, en le careiTant,
comme s'il le plaignoit du malheur
qui lui eft arrivé, & qu'il lui voulût
donner courage en lui difant qu'une
autre fois il fera mieux.
Mais la cruauté de cet Omar Baffa
paiToit encore fa force, Se il s'y
laiiToit quelque fois aller à de tels
excez que tout le monde en avoit
horreur. Un jour qu'il étoit à la
chafle un de fes Pages eut le malheur
de faire quelque chofe qui lui
déplut, & quoi que ce fut une chofe
de peu d'importance & qu'il aimât
beaucoup ce jeune homme à
caufe de fa beauté & de fa bonne
mine, il fe laiifa par fa promptitude
tellement tranfporter à la colere,
qu'il lui paflà au travers du corps la
lance qu'il tenoit , de forte que le
pauvre jeune garçon tomba mort à
terre.
Mais en voici un autre exemple
d'une exercée de fang froid. Pendant
qu'il étoit BalTa de Gaza, ilalloit
de côté & d'autre faire des courfes
fur les Arabes, qui en ce temps
là étoient divifez entre eux, & en
diverfes occafions ils en furent battus.
Dans l'un de ces combats il avoit
pris prifonnier un de leurs Princes^ &
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après l'avoir gardé quelque temps,
un jour qu'il étoit de fang froid à
fumer une pipe de tabac, il fit, je
ne fcai à quelle occafion , & apparemment
fuivant le penchant qu'il
avoit à la cruauté , ecorcher ce prince
tout vif , & même en prefence
d'un fils de ce pauvre malheureux ,
lequel n'avoit encore qu'onze ans,
& comme il crioit pitoiablement à
cette vue , le pere avec un gefte
intrépide commanda au fils de fè
taire , ou qu'autrement il ne le
reconnoitroit pas pour fon fils,
mais que quand il feroit devena
homme il fe reflbuvint de quelle
maniéré fon pere avoit été traitté
par les Turcs. Mais les Arabes
& tous ceux qui avoient fujet
de redouter fa cruauté en furent
bien tôt délivrez , car peu de mois
après que je fus parti de Rama lors
qu'a peine il avoit été un an
Bafla de Gaza, il alla faire une fécondé
expedition contre les mêmes
Arabes , aiant avec lui environ
deux mille hommes , mais il tomba
imprudemment entre les mains
de l'avant garde , dont quelques
uns le tuerent & le renverferent de
deiTus fon cheval. C'etoit un Efclave
Géorgien qui avoit été elevé à
la Cour du Grand Seigneur Sultan
Achmet qui lui aiant par malheur
crevé un oeil d'un coup de javelot,
pour le recompenfer de cette perte
l'eleva peu de temps aptes à la dignité
de Sangiac , ou d'un des vingt
quatre Princes du Grand Caire , &
depuis le fît Baflâ de Gaza.
Ce n'eft pas une chofe extraordi- voiaw
naire que des hommes entreprcn- d'une Danent
de ftire le voiagedejerufalem, Anmais
que des femmes auiîî fe lemet-fj'"'^'^',™
tent en tête , c'eft ce qui peut Sainte,
paroitre furprenant. Cependant
c'eft ce qui s'eft fait, & l'on en a
vu des exemples de temps en
temps.
Peu de temps devant que j'arrivaflê
a Rama , une Demoifelle
Angloife d'âge mediocre y étoit venue
aiant un valet avec elle. Apres
qu'elle eut accompli fon voiagc
de Jerufalem , Se qu'elle y eut fait
fes devotions , elle s'en alla en
I i Fran-
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