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 V O Y A G E  au  L E V  ANT  en  EGYP T E ,  SYRIE,  &c.  
 me  du  haut  du  Château.  Il  s'eleve  
 tout  enfemble  &  s'etend  tellement  
 en  rond  par  la  quantité  de  feux >  
 que  quand  on  eft  deflbus  autour  du  
 Château  ,  il  reprefente  le  Ciel  coinme  
 s'ouvrant  ,  &  lors  qu'on  en  eft  
 à  une  bonne  demie  lieuë,  on  le peut  
 encore  voir  aflez  diftinitement.  J'ai  
 eu  la  curiolîté  ,  comme  j'ai  paffé  
 plus  d'un  an  à R ome ,  de  l'aller  voir  
 d e  differens  endroitSj  mais  j'ai  trouvé  
 que  de  le  voir  quand  on  eft  deffous  
 ,  c'eft  où  il  eft  le  plus  agréable. 
   
 Quelques  Lors  que  le Jubilé  eft  fini  on  reparticula 
   malTonne  la  Porte  Sainte.  Au  reft  
 «  du  '  plufieurs  perfonnes  ne  
 Jubilé,  "ijavent  pas  precifément  ce  que  c'eft  
 que  le  Jubilé  ,  il  faut  leur  dire  que  
 c'eft  une  Cérémonie  de  l'Eglife  Romaine  
 pour  obtenir  une  Indulgence  
 Pleniere  ,  c'eft  à  dire  une  remiiSon  
 de  tous  lies  pechez.  Le  Pape  l'accorde  
 dans  ce  temps  là  à  toute  l'Eglife. 
   Ce  Jubilé  fut  premièrement  
 inftituél'an  1300. par  Boniface  VIII.  
 qui  ordonna  qu'on  le  celebreroit  
 tous  les  Cent  ans,  à  l'imitation  des  
 Juifs  qui  celebroient  un Jubilé  tous  
 les  Cinquante  ans.  Clement  VI.  qui  
 .vint  depuis  jugea  à  propos  qu'il  fe  
 célébrât  tous  les  Cinquante  ans.  
 Urbain  VI.  le remit à trente  trois,  &  
 enfin  Sixte  V.  le  fixa  i  vingt  cinq,  
 comme  il  eft  encore  à  prefent.  
 Mortdu  Pendant  que  jétois  à  Rome  arri- 
 Pape Ce- ya  ig  niort  du  Pape  Clement  X.  Ce  
 •  fut  le  22.  Juillet  167Ó.  après  avoir  
 tenu  le  fiege  fix  ans  &  quelques  
 mois.  
 Lors  que  la  mort  du  Pape  approche  
 c'eft  la  coutume  que  le  Cardinal  
 Patron  le  faflè fçavoir  à  tous les Cardinaux  
 &  aux  Ambafladeurs  ,  qui  
 ne  manquent  pas  de  fe  rendre  aufli  
 toft  au  Palais  du  Pape,  pour  témoigner  
 le  déplaifir  qu'ils  ont  du  dangereux  
 état  oil  eft  le  Saint  Pere.  Au  
 même  temps  il  fait  mener  au  Château  
 Saint  Ange  tous  les  prifonniers  
 qui  l'ont  reflerrez  pour  quelques  
 grands  crimes,  afin  qu'ils  foient  en  
 plus  grande  feureté  ;  On  ne  laifle  
 dans  les  prifons  que  ceux  qui  y  font  
 pour  leurs  dettes  ou  pour  quelques  
 crimes  moms  confiderables,  &ceux  
 c i ,  dés  que  le  fiége  eft  déclaré  vacant  
 ,  Ibnt  mis  en  liberté  par  le  
 Confeil  de  la  ville,  qui  veut  donner  
 en  cela  une  marque  de  fa  Souveraine  
 puiffance.  
 Le  lendemain  au  foir  ontraniporta  
 le  corps  du  Pape  de  Monte-Cavallo  
 au  Vatican.  Il  etoit  porté  par  
 deux  mulets  dans  une  litiere  découverte, 
   toute  revetuë  de Velours  rouge  
 en  broderie,  &  accompagnée  de  
 quantité  de  torches  allumées.  On  
 euft  dit  à  voir  l'appareil  du  convoi  
 que  c'etoit  un  General d'armée  mort  
 en  combattant,  que  l'on  alloit  
 porter  en  terre.  Car  on  voioit  à  la  
 fuite  quantité  de  Chevaux-Iegers,  
 de  Cuiraffiers  j  de  Suiflès  armez,  
 de  Trompettes  ,  de  Timbales  ,  de  
 Fifres  ,  &  de  Tambours  avec  quelques  
 pieces  de  Canon  dont  la  bouche  
 etoit  tournée  derriere.  
 Le  matin  fuivant  ,  le  corps  fiit  
 porté  du  Vatican  à  l'Eglife  de  Saint  
 Pierre,  où  pendant  trois  jours  il fut  
 expofé  dans  la  Chapelle  de  la  Trinité  
 ,  à  la  vue  de  tout  le  monde.  
 Ses  pieds  qu'il  avoit  dans  des  pantoufles  
 de velours cramoifi,  paflbient  
 au  travers  des  treillis  ,  &  tous  
 les  paflàns  les  alloient  baifer  avec  
 grande  dévotion.  J'eus  le  bonheur  
 d'entrer  dans  la  Chapelle  &  de  toucher  
 la  main  du  Pape  mort,  ce  que  
 l'on  regarde  comme  très  grande  faveur. 
   
 Pendant  les  neuf  jours  que  le  Particucorps  
 demeura  fans  être  enterré  on laritez  
 mit  ordre  à  tout  ce  qui  étoit  necef- »"diant  
 faire  pour  le  Conclave,  &  l'on  pré-ve  
 para  les  Chambres  pour  les  Cardi-  kàion  
 naux  ;  Cependant  chacun  avoit  la  
 iberté  de  l'aller  vifiter  
 qu'il  y  
 foule  de  
 en  fortoit.  
 Quand  les  Cardinaux  font une fois  
 entrez  dans  le  Conclave,  ils  n'ont  
 plus  la  liberté  d'en  fortir  jufqu'à  ce  
 qu'on  ait  fait l'eledlrion d'un  nouveau  
 Pape.  On  permet  à  chaque  Cardinal  
 de  forte  
 I  avoit  continuellement  une  
 le monde  qui  y  entroit  &  qui  
 d'avoir  deux  perfonnes  pour  les  
 fervir  ,  &  on  leur  apporte  tous  les  
 jours  à  manger  de  leur  Palais.  Sur  
 le  foir  on  y  fonne  une petite  cloche,  
 au  fon  de  la  quelle  trois  Cardinaux,  
 avec  
 nouveau  
 Pape. 
   
 avec  le  Maitre  des  Ceremonies,  
 vont  chercher  avec  foin  dans  toutes  
 les  avenues  &  dans  tous les coins  
 de  l'appartement  où  l'on  s'aiTemble  
 pour  faire  l'Eleftioni  afin  qu'il  ne  
 s'y  cache  perfonne  de  ceux  à  qui  il  
 n'eft  pas  permis  d'y  entrer.  On  met  
 ordre  auilî  qu'on  y  pofe  de  bonnes  
 gardes.  Sur  la  place  de  Saint  Pierre  
 il  y  a  quatre  principales  Gardes  
 qui  y  font  cnvoiées  par  l'ordre  du  
 General  de  l'Eglife  Romaine.  A  la  
 porte  du  Palais  Vatican  fe  tient  la  
 garde  Suiife,  munie  de  cuiralTes,  de  
 moufquets,  de  deux  picces  de  Canon  
 ,  &  de  toutes  les  armes  néceffaires. 
   Les  autres  gardes,  qui  font  
 pofées  en  divers  endroits  par  les  
 rues,  font  commandées  par  le  Prince  
 Savelli  ,  à  qui  appartient  héréditairement  
 la  garde  du  Conclave.  
 Le  ferment  que  chaque  Cardinal  
 cft  obligé  de  faire  devant  un  Crucifix  
 eft  conceu  en  ccs  termes,  Tejlor  
 Chfifitim  Dorninum  qui  me judiceiturus  
 efi  ,  eligere  qucm  fecundum  
 Deim  judico  eligere debere ,  & qnod  
 idem  in  acceffu prisjiabo.  C'eft  à  
 dire  je  protefte  devant  Nôtre  Seigneur  
 Jefus  Chrift  qui  me  doit  juger  
 un  jour,  que  j'élirai  celui  que  
 je  dois  élire  félon  Dieu,  &  que  je  
 le  ferai  auffi quand  il  faudra  venir  à  
 l'Accès  i  c'eft  ainfi  qu'on  appelle  fc  
 ranger  à  la  voix  d'un  autre.  
 Pour  ce  qui  regarde  l'eleftion  du  
 Pape,  afin  qu'elle  foit  eftimée  legitime  
 ou  valable,  elle  fe  doit  faire de  
 l'une  de  ces  trois  maniérés,  ou  bien  
 premièrement  par  Infpiration  ,  ou  
 bien  par  Compromis  ,  c'eft  à  dire  
 de  s'en  remettre  à  quelques  Cardi- 
 La  porte  de  l'appartement  où  fe  fait  naux,  ou  bien  enfin  par  Suffrage.  
 rElcftion  eft  fermée  de  quatre  fer- ]  L'Eleftion  fe  fait  par  Infpiration  
 rures  ,  de  deux  defquelles  les  Clefs  lors  que  tous  les  Cardinaux  unanifont  
 gardées  par  des  Prélats  cj^uL  fe  
 tienncnc  hors  du  Conclave,  &  celles  
 des  deux  autres  font  entre  les  
 mains  du  Maitre  des  Ceremonies,  
 qui  demeure  dedans.  
 Outre  les  Cardinaux  il  y  a  quelques  
 autres  perfonnes  qui  peuvent  
 aufti  demeurer  dans"  le  Conclave,  
 comme  le  Sacriftain  avec  ceux  qu'il  
 a  fous  lui,  deux  Maîtres  des  Ceremonies  
 ,  un  Confefteur  ,  un  Secretaire  
 du  Sacré  College,  deux  Médecins  
 ,  un  Chirurgien  ,  un  Apoticairc, 
   un  Charpentier,  un  Maflibn,  
 &  deux  Barbiers.  Et  outre  ceux  là  
 on  y  laifle  encore  huit  ou  dix  Valets, 
   tant  par  le  fervice  de tous  ceux  
 qui  y  font  renfermez  ,  que  pour  
 nettoier  les  chambres  du  Conclave,  
 porter  du  bois  &c.  Ils  font  paiez  de  
 l'Eglife,  mais  aurefte  on  prend  bien  
 garde  qu'aucun  d'eux  n'ait  été  au  
 fervice  de quelqu'un  des  Cardinaux.  
 Au  refte  depuis  que  le  Conclave  
 eft  une  fois  fermé,  on  ne  l'ouvre  
 îlus,  fi  ce  n'eft  pour  y  laiiTer  entrer  
 es  Cardinaux  Etrangers  ,  &  pour  
 en  faire fortir ceux qui font malades à  
 la  mort  ,  del'etit  defquelsil  fautque  
 les  Médecins  donnent  une  atteftation  
 fuffifante,  pour  les  laiffer  fortir. 
   
 mcmenc,  Se  comme  s'ils  écoient  infpirez  
 du  Saint  Efprit,  donnent  leur  
 voix  à  une  même  perfonne  pour  le  
 faire  Pape.  Elle  fe  fait  par  Compromis  
 quand  les  Cardinaux  donnent  
 plein  pouvoir  à  quelqu'un  de  leur  
 College  d'elire  un  Pape,  avec  aflùranee  
 de  reconnoitre  comme  légitimement  
 élu  celui  qu'ils  aurontelCTé  
 à  cette  dignité.  Elle fe fait par  ¡tífjalors  
 qu'on  compt e  les voix j  C'eft  
 de  cette  derniere  dont  on  ufe  aujourd'hui  
 ,  &  il  faut  que  celui  qui  
 doit  être  ainfi  élu  chef  de  l'Eglife  
 Romaine  ,  ait  les  deux  tiers  des  
 voix.  
 Voila  quelqjes  unes  des  principales  
 chofes  qui  s'obferventà  l'eleftion  
 d'un  nouveau  Pape,-fur  lefquell«  de  
 je  m'etendrois  davantage  fi l'on n'en  la Courde  
 trouvoit  pas  (a)  ailleurs  une  ample  
 defcription.  
 Le  21.  Septembre  de  la  même  
 année  ití/ó.  les  Cardinaux,  après¿.¡„„f,'™  
 avoir  été  enfermez  cinq  ou  fix  fe- cent  XI  
 maines  dans  le  Conclave  ,  durent  
 pour  Pape  Benoi[l  Odefcaichi^  qui  
 prit  le  nom  d'Innocent  XI.  
 Ce  nouveau  Pape  incontinent  
 après  fon  exaltation,  donna  ordre  
 d'ouvrir  toutes  les  prifons,  &  d'en  
 faire  fortir  tous  ceux  qui  y  avoient  
 B  été