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 aoo  V O  Y A G E  au  L  E V  A N  T  
 comme  nous l'avons dit, qu'une efpecc  
 de  Cimetiere,  &  auprès  des  Py-!  
 ramides,  & des Grottes qui  n'etoient  
 autre  chofc  que  des  lieux  de  fepulture  
 ;  Mais  de  içavoir  fi  çà  été  precifement  
 celui  du  Roi  Amafis, 
   c'eft  ce  que  je  n'oferois  aflcurer  
 ,  par  ce  qu'il  n'y  en  a  point  de  
 preuves  certaines,  tous  les  mémoires  
 de  cette  antiquité  aianc  été  perdus. 
   D'autres  veulent  qu'un  Roi  
 d'Egypte  ait  fait  faire  ce  Sphinx  à  
 la memoirê  d'une  certaine  Rhodope  
 de Corinthe  dont  il  etoit  paflionnement  
 amoureux.  Les  Auteurs  font  
 bien  des  contes  de  cette  ftatuë  du  
 Sphinx.  Ils  difent  entre  autres chofes, 
   que  iors  qu'on  l'alloit confulter  
 au  lever  du  Soleil,  elle  rendoit  reponce  
 comme  un  Oracle  :  mais  la  
 plus  part croycnt  que  cela  fe faifoit  
 par  la  fourberie  des  Prêtres,  par  le  
 moien  de  quelques  conduits  fous  
 terrains.  Quelques  uns  croyent  que  
 le  Puits  dont  nous  avons parlé,  qui  
 efl:  dans  la  grande  Pyramide  pourroit  
 avoir  fervi à  cela.  Mais  ce  qui  
 fait  voir  que  cela  n'eft pas vrai,  c'eft  
 que  de  tous  ceux  qui  ont  eu  la  curiofité  
 d'y  defcendre,  il  n'y  a  perfonne  
 qui  ait  trouvé  un  paifage au  
 fond  de  ce  puits.  De  forte  qu'on  
 ne  fçauroit  dire  avec  aucune  certitude  
 ,  quoi  qu'il  en  puiiTe  être,  
 s'il  y  a  un  conduit  fous terre  d'un  
 côté  ou d'autre qui mène à ce Sphinx.  
 Au  moins  efl-il  certain  qu'il  n'y  a  
 aucune  ouverture,  m  à la  bouche, ni  
 au  nez,  ni  aux  yeux,  ni  aux  oreilles  
 ;  &  fi  les  Prêtres  ont  mis  ici  
 quelque  fourbe  en  ufage,  il  faut que  
 c'ait  été  par  le moien d'un trou,  qui  
 à  ce  que  diiènt  ceux  qui y font montez  
 avec  des echelles  ,  eft  au  haut  
 de  la  téte  , •  qui  allant  toujours  en  
 apetiiTant  va jufque dans  la  poitrine  
 où  il  finit.  Le  Confuí  avec  la  plus  
 part  de  notre  compagnie  étoient  à  
 l'ombre  de  cette  groife  mafle  pendant  
 qui je m'occupois  à  la defliner  
 avec  les  Pyramides  qui  font  auprès.  
 On  voit  cela  N°.  8j.  où  l'on  peut  
 juger  de  la  grandeur  de  cette  Statue  
 monftrueufe par  la  proportion  qui a  
 été obfervée  entre  elle  &  lesperfonnages  
 qu'on  y  voit  reprefentez  auprès. 
  Pour ce qui eft des particularitez  
 des  Sphinx  en  general  je  me  contenterai  
 de  rapporter  ce  que  le  D'.  
 O.  Dapper  en  a  écrit,  &  qu'il  a lui  
 mêmeemprunté des autres.  
 Lors  que  les Egyptiens  ,  dit  il  ,  l'articutraittoient  
 des  choies  naturelles,  ils'"'""  
 reprefcntoient  les  Sphinx  de  deuxSin.  
 maniérés,  fçavoir  ou  fous la  figure  
 d'un  lion  couché  fur un  buffet,  ou  
 fous  la  forme  d'un  certain  monftrc  
 qui  avoit  le corps  d'un  lion  &  le vilage  
 d'une  fille.  Par  la  premiere  figure  
 ils  reprefcntoient  Momphta  qui  
 étoit  une  des  Divinitez  des  Egyptiens  
 qui  prefidoit  fur  toutes  les  
 eaux,&  particulièrement  qiiiconfervoit  
 &  entretenoit  les  cauies  du  débordement  
 du  Nil,  &  par  la  feconde  
 ils  reprefentoicnt  l'accroiflemcnc  
 même  de  ce  fleuve.  Et  ils  reprefcntoient  
 cela  par  cette  figure,  non  
 pas  qu'ils  crulTent  qu'ils  le  trouvât  
 quelque  part  de  tels  animaux,  niais  
 pour  donner  à  connoitre  par  la  les  
 îenfécs  &  conceptions  fecrettes  de  
 'efprit.  Ainfi  les  Sphinx  reprefentez  
 de  cette  maniere  fignifioient  l'état  
 du  Nil  qui  inonde  l'Egypte :  
 Car  comme  le  débordement  de  cette  
 Riviere  dure  tout  l'été  &  tout  le  
 temps  de  la moiiTon  ,  c'eft à  dire  
 pendant  les  mois  de  Juillet  &  
 d'Août, & que pendant ces deux mois  
 le  Soleil  parcourt  ordinairement les  
 deux  figues  du  J.ion  &  de  la Vierge,  
 il  fut  aiîèz  naturel  aux  Egyptiens  
 qui  avoient  un  grand  penchant pour  
 les Hiéroglyphes  &  les  rcprefenrations  
 myfterieufes, de faire d'une Vierge  
 &  d'un  Lion  desmonftres  qu'ils  
 appellerent  Sphinx  ,  & qui  étoient  
 confacrez  au  Nil  ,  &  ce  qu'ils  les  
 reprefcntoient  couchez  furie ventre,  
 c'etoit  pour  exprimer  le Nil  qui  fe  
 débordé.  
 S'il  en  faut croire Pline,  il y avoit  
 un  grand  nombre  de  ces  Sphinx,  
 &  entre  eux  il  y  en  avoit  quelques  
 uns  qui  étoient  de  fort  grandes  Statues  
 placées  dans  les  endroits  les  
 plus  remarquables  d'Egypte  ,  fur  
 tout  dans  les  lieux  où  le  Nil  fe  débordé  
 ,  comme  dans  les  Villes  
 d'Heliopolis  &  de  Sais,  &  dans  le  
 deferc de  Memphis  ou  du Caire,  où  
 eft  
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