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 1x6  VOYAGE  au  L E V A N T  
 contre  nature,  vice  aflez  coramun[dn  Cadi,  fans  dire  un  feiil  mot  
 dans  l'Orient,  font  auffi une  raifon  Outre  qu'on  accorde  à  la  femme  fa  
 aux  femmes  pour  demander une  fe-  demande  ,  le mari  après  avoir  été  
 wation.  Dans  cette  occafion,  el-  convaincu  ,  non  feulement  pert  fa  
 es  ne  font  que  tourner  leur  pan-  femme,  mais reçoit encore des coups  
 touHe  le  haut  en  bas  en  prefenee'de  bâton.  
 C h a p i t r e  XIX.  
 Tarticulante^  de  la  Sepulture  des  Turcs  &•  du  dueil  du  ils  
 font  fur  les  morts.  Etiquete  qu'on fait  fur  les morts  après leur  etiterrevtent  
 .• letat  île  ceux  qui  ont  bien  ou mal  -vécu.  Sentimcns  fur  le  dernier  
 Jugement  &  fur  la. RefurreBion  &c.  
 Grandes O ' I l  y  a  quelque  endroit  au  mon- 
 O  de'où  la  mort  des hommes fafjet  
 ^"deî'^  bruit,  c'eft  en  Turquie.  
 morts.  Car  fi  tôt  que  quelqu'un  eft  mort  
 principalement  fi  c'eft  un  Pere  de  
 famille,  les  femmes  menent  un  tel  
 dueil,  qu'on  ne  fçauroit  pafler  auprès  
 de  la  maifon  mortuaire  fans  
 être  faifi  de  frayeur.  Dans  les  autres  
 païs  on  va  s'entre-confoler dans  
 ces  occafions:  mais  chez  les Turcs,  
 les  amies  &  les  voifines  vont  pour  
 aider  la  femme  du  deffunt  à  pleurer, 
 ou pour mieux dire elles vont  hurler  
 avec elle.  Parmi ces plaintes  lugu.  
 bres  on  mêle  à  diverfes rcprifes  les  
 louanges  du  mort,  &  l'on  rapporte  
 toutes  les  bonnes  qualitez  qu'il  
 a  eues.  C'eft la veufve qui tient le deffus  
 dans  ce  concert,  &  elle  eft fuivie  
 de  toutes  les  autres  femmes,  qui  
 repetent  fes  paroles  &  qui  imitent  
 fes  geftes  ,  mais  avec  des  cris  fi  
 effroyables  qu'on  les  peut  entendre  
 dans  toute  la  ruë,  principalement  
 quand ce font des pleureufes à louage:  
 car  celles  ci  pour  faire  voir  qu'elles  
 mentent  bien  leur argent,  pleurent  
 &  glapiifent  fi  fort  que  tout  
 l'air  en  retentit.  Cela  dure  ainfi  
 quelques  jours,  mais  quand  la compagnie  
 fe  fépare  le  bruit  cefîe  auffi, 
   &  les  voifins  ont  un  peu  de  repos. 
   
 Ablation  Après  donc  que  les  plaintes  ont  
 morts p^jf  place  aux foins de l'enterrement,  
 les  parens  ou  les  amis  du  dcft'unt  
 mettent  fon  corps  à  terre  Se  le  lavent  
 ,  ils  lui  font  le  poil,  car  la  
 j propreté  des  Turcs  s'etend  jufqu'- 
 .aux  morts,  &  enfuite ils font  brûler  
 |des  parfums  autour,  afin  de  chaifer  
 les  mauvais  Efpnts.  Apres  ils  le  
 coulent  dans  un  Drap,  mais  ils laiffept  
 la  tête  &  les  pieds  découverts  
 afin  qu'il  puiflè  plus  aifément  fe  
 mettre  à  genoux  devant  les  Anges  
 qui  le  viendront  interroger.  Alors  
 on  le  met  dans  un  cercueil  
 fait  comme  les  nôtres,  excepté  que  
 la  couverture  en  doit  être  peinte  
 de  quelque  couleur  qui  eft  différente, 
   félon  la  différence  des  perfonnes. 
   Car  fi  le  mort  à  été  un  
 homme  de  guerre  ,  fon  cercueil  
 doit  être  rouge  ;  fi  c'eft  un  Sciienf  
 (c'eft  le  nom  qu'on  donne  aux  
 parens  de  Mahomet^  il  doit  erre  
 verd  ;  &  s'il  n'eft  ni  l'un  ni  l'autre  
 ,  il  faut  que  le  cercueil  foit  
 noir.  On  met  de  travers  fur  la  
 Icouverture,un  Turban  dont  la  cou- 
 ¡leur  fe  diftmgue  aullî  félon  l'emploi  
 qu'ils  ont  eu  pendant  leur  viCi  
 ¡Par  exemple  un  Janiffaire  a  un  
 Turban  rouge,  un  Spahis  en  a  un  
 rouge  &  blanc,  un  Scherif  en  a  un  
 verd  ,  d'autres  un  blanc  &c. .  
 Apres  avoir  été  ainfi  expofé  en  Entcrrc- 
 3arade  aflez  longtemps  ,  on  enleve ment,  
 e  corps  pour  le  porter  en  terre;  
 quatre  hommes  portent  le  cercueil  
 fur  deux  bâtons,  &  ils  font  relaiez  
 de  temps  en  temps  par  quatre  autres  
 ièlon  la  longueur  du  chemin.  
 Ils  vont  ainfi  au  Cimetiere  précédez  
 par  leurs  Prêtres  qui  prononcent  
 quelques  oraifons,  &  de temps  
 en  E G Y P T E ,  S Y R I E ,  &c.  127  
 en  temps  invoquent  à  haute  voix  
 le  nom  de  Dieu.  Les  Parens  &  amis  
 marchent  enfuite,  &  enfin  les  
 femmes  qui  font  à  diverfes  reprifes  
 un  grand  dueil  ,  frapant  de  
 grands  coups  fur  leur  poitrine,  &  
 s'arrachant  les  cheveux,  comme  fi  
 la  trifteflè  les  avoit  mifes  hors  du  
 fens.  Lors  qu'on  eft  arrivé  au  Cemetîere  
 on  ôte  le  corps  de  dedans  
 le  ¡cercueil  ,  &  on  le  met  dans  la  
 foiTe ,  car  les Turcs  n'enterrent  jamais  
 leurs  morts  avec  le  coffre.  Si  
 tôt  que  la  fofl'e  eft  remplie  de  terre  
 ils  mettent  à  l'un  des  bouts  ,  
 fçavoir  du  côté  où  eft  la  tête,  une  
 pierre  qui  doit  difent-ils  fervir  de  
 iiege  aux  Anges  Examinateurs.  Au  
 refte  on  ne  voit  pas  de  ces  pierres  
 feulement  fur  les  foffes  des  
 Turcs,  mais  auflî  fur  celles  de  toutes  
 les  autres  Nations  de  ces  païs,  
 où  elles  fervent  de  mai'que  que  
 quelqu'un  y  eft  enterré,  on  les  enterre  
 aulïï  tous  fans cercueil,  il  n'y  
 a  que  les  Francs  qui  fe  faiGnt  enterrer  
 avec  un  coffre  comme  nous  
 faifons  en  Europe.  
 J'avois  prefque  oublié  de  dire  
 qu'on  etend  une  planche  en  travers  
 fur  le  corps,  un  des  bouts  de  la  
 quelle  touche  à  terre,  &  l'autre  au  
 haut  de  la  foilê  ,  ce  qui  eft  une  
 chofe  en  quoi  les  Turcs  différent  
 de  toutes  les  autres  nations,  mais  
 mi  les  Chrétiens  une  efpece  d'orgueil  
 qui  paroift  jufque  fur  leurs  
 Tombeaux  ;  car  ils  les  font  faire  
 de  marbre  &  devez,  &  ils  ne  reffemblent  
 pas mal  à  nos Tombes.  Il  y  
 a  au  defllis  une  pierre  où  ils  font  
 graver  le  Turban  du  deffunt:  Et  
 dans  plufieurs  lieux  c'eft  auifi  la  
 coutume  de  mettre  une  de  ces  pierres  
 au  bout  de  la  fofle  où  eft  la  
 tête  ,  avec  un  Turban  de  la  même  
 façon  que  ceux  qui  font  morts  le  
 portoient  pendant  leur  vie.  Car  
 il  faut  remarquer  que  les  Turbans  
 font  fort  differens  les  uns  des  autres  
 ,  &  faits  de  plufieurs  maniérés. 
   Une  autre  pierre  qui  eft a l'autre  
 bout  de  la  folTe,  du  côté  des  
 pieds,  fert  à mettre  l'Epitaphe,  qui  
 d'ordinaire eft  enrichie de l'Eloge  de  
 celui  qui  y  eft  enterré.  
 Apres  l'enterrement  le  dueil  des  
 Femmes  dure  encore  aftèz  longtemps  
 ;  car  elles  vont  à  di\ erfcs  
 fois  paflèr  quelques  heures  auprès  
 du  Tombeau.  Les  parens  &  les  
 amis  du  deftàint y viennent auffi,  afin  
 de  prier  Dieu  qu'il  le  vueille  
 délivrer  des  tourmcns  que  lui  pourroient  
 faire  les  Anges  noirs,  &  en  
 l'appellant  par  fon  nom  ils  lui  crient  
 ,  Ne  crain  point  ,  Répons  har-  les morts  
 diment  -,  Car  ils  croient  que  les  a- 'nfenogez  
 mes  des  morts  retournent  dans  les t^irênt"'"  
 corps;  &  qu'auftî  t „  uuii.  luôLt   qijuu»e,   qquiiecliquuu'-- 
 ce  que  lignihe  cette  planche,  c'eft I un  eft  enterré,  deux  Anges  noirs  
 ce  que  je  ne  fçai  pomt  du  tout,  ¡d'une  figure  effroiable  viennent  
 Apres  avoir  ainfi  enterré  le  corps,'dans  la  fofle,  que  là  ils le prennent  
 les  hommes  s'en  retournent  à  la  1 par  un  toupet  de  cheveux  que  les  
 ville  ,  &  ils  laiffent  les  femmes  au- : Turcs  laiflent  pour  cet  effet  à  la  
 près  de  la  foffe  pour  y  continuer  j tête  de  leurs  morts  ,  &  qu'ils  le  
 leurs  plaintes  lugubres  amant  qu'il  font  mettre  à  genoux,  afin  de  l'in-'  
 leur  plait.  Ce  que  j'ai  parlé  de I terroger  en  ces  mots  ,  àid  efl  ton  
 retourner  à  la  ville  ,  c'eft  qu'en  !©/>«.?  ^.elle  efl  ta  Relmon  ?  à- 
 Turquie  tous  les  Cimeticres  font  qui  ejî  ton  Trophete  ?  A  cela  il  doit  
 hors  des  villes  &  à  côté  des  grands  
 chemins  ,  en  partie  afin  que  l'air  
 des  villes  ne  foit  point  infefté par  
 les  mauvaifes  exhalaifons  qui  fortent  
 des  Sepulcres  ,  &  en  partie  
 auffi ,  afin  que  les  paffans  prient  
 Dieu  ^pour  les  ames  des  deffiints,  
 Toni  &  qu'ils  facent  des  voeux  pour  elbraux  
 des les.  
 dillin-  Les  perfonnes  de  diftinition  ont  
 âion.  parmi  
 répondre  Mon  THeu  ejl  le  -vrai  
 T>ieu,  ma, Religion  efl  la  vraie  Religion, 
   ù-  mon  Vrophete  eft  Mahomet. 
   Mais  fi  le  mort  à  caufe  de  
 tous  fes  péchez  fe fent  convaincu,  
 la  crainte  lui  fait  dire  Tu  es  mon  
 •'Dieu &  mon  Trophete,  &  jecroien  
 Toi.  A  cette  reponfe  un  des  Anges  
 dont  nous  avons  parlé  lui  donne  un  
 Il î  gra«ni.vdi   coup  du 'uttlnHe^   mllldalilLfulCe   duec   fleerr   
 es  Turcs  auffi  bien  que  par-  fur  la  tête,  qu'il le fait enfoncer  fept  
 brades  
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