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vent nous redevint contraire ,
Maniéré fallut nous arrêter. Ce fut à
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bes. ^ " m a i f o n à Caffé
civilement.
C e même jour je deHInai de fi
maifon une vue de quelque vaif-' Paiticaaflez
grande &]icaux qui étoient au bord de
pleine d'Arabes j'y vis danfer pki- riviere, cela eil: reprefenté N°. 95-.
Eijfuite j'allai voir la ville & fes
jardins qui font fort agreables, aulli
a-t-elle autrefois paiTé pour le Jardin
& le lieu de delices de l'Egypte.
La ville même n'eft pas grande >
mais elle cfl: fort peuplée, & cilene
fubiifte en grande partie que par le
commerce qui s'y fait le long de la
riviere , où arrivent toutes les
richeflès du Caire & d'Alexandrie.
Les maifons y font aflez bien bâties
& fort exhauflees. On y a aulïï
plufieurs beaux Hans ou Marchez
publics , oil il y a continuellement
une grande fo.ule de monde. En
un mot Rozette eft une vraye ville
de commerce, &àcetegardellcpeuc
paiTer pour une des prnicipales
villes d'Egypte.
Les Arabes qui font grand» vo.
„ leurs rendent les habitans de cette caure®"e,
Les Arabes ecoutoient fort atten- ville fort prévoians, & leur font voleurs Ativement
ce que l'on chantoit, &j faire bonne garde toute la nuit,"''"-
ceux qui cntendoient la langue me : car la moindre negligence feroit
dirent que ces airs ou chanfons | capable de leur caufer de grandes
pertes. Ces voleurs
iieurs jeunes garçons en habit blanc.
Leur danfe ne confiftoit giieres
qu'en quelque mouvement des épaules
, le refte du corps étant prefqiie
immobile, & cette danfe étoit
accompagnée de quelque chant
qu'il y mèloient. Les joueurs d'initrumens,
à la mufique defquels la
danlé etoit réglée , me parurent
fort divertiflîms & extraordinaires.
L'un avok quatre morceaux de plats
rompus, deux à chaque main, dont
lis fe fervoient comme de caftagnettes
, qui quoi qu'elles ne rendiiTent
aucun fon mufical, ne laiffoient
pas d'être aflez divertiflàntes.
D'autres avoient des infl-rumens
de Mufique qui reflembloient
à peu près à de petites Timbales ,
mais un peu plus longs, fur lefquels
ils jouoient avec les doigts,
étoicnt fort jolis, & que le fujet en
écoit fpirituel , ce qui étoit la
caufc qu'on les écoutoit avec tant
d'attention.
Au coucher du Soleil nous penfions
éprendre notre cours, mais le
rude vent qu'il faifoit nous fît bien
tôt retourner à notre Bourg. Sur ; le
le midi le vent s'etant un peu la
moderé & nous étant plus favorable
on remit à la voile, & le lendemain
qui étoit le cinquième de notre
voiage nous pafllmes dès le matin
Foia , qui eft un Bourg fort agréable
, fitué fur le bord de la riviere
& raifonnablement grand. C'étoit
autrefois le Port du Grand Caire,
comme Rozette l'eli à prefent, on
eftime qu'elle en eft éloignée de dix
lieuës.
Ar iv&à arrivâmes à Rozette
appellee autrefois Canopus, & qui
a été fort connue fous ce nom.
Aufli tôt j'allai au logis du Vice
Confuí de la NationFrançoife, je le
trouvai à table, & j'en fus reccu fort
pertes. Ces voleurs fe déîouillent
tout nuds & fe frottent
e corps d'huile, afin de ne pouvoir
pas aifément être faifis au
corps , & fi leur vol efl: découvert
& qu'on les pouriuive
de trop près , ils fe jettent dans
Nil j & traverfent la riviere à
nage. C'eft pour cela qu'ils
font de dangereux voleurs, & qu'il
eft très difficile de s'en donner de
garde.
Entre les autres commoditez
qu'on a ici pour l'entretien de la
vie , il y a quantité d'oifeaux
principalement de riviere , à quoi
contribue beaucoup la grande
quantité de marais & d'etangs
qu'on rencontre de tous côtez.
Le fejour que je fis à Rozette
ne fut pas long
me je me hâtois d'être le plus
tôt que je pourrois à Alexandrie,
je louai deux mulets, afin de partir
le lendemain, je le fis en effet
environ huit heures avec un
Arî
e n E G Y P T E , S Y R I E , &c.
Arabe More que le vice-Conful
m'avoit donné pour m'accompagner
, mais je ne pus parler un
feul mot avec lui , parce qu'il ne
fçavoit point d'autre langue que
l'Arabe.
Nous cheminâmes environ deux
heures par une plaine fablonneufe
bornée d'efpace en efpace de
quelques monceaux de pierres afin
de pouvoir reconnoitre le chemin.
Ici je fus abordé par qua-
Rencan- Arabes , deux defquels faifîlieu
où nous pourions nous repofer.
C'etoit derriere un coteau;
mais comme je ne voiois point
de maifon , & que je ne comprenois
pas bien ce que mon
guide me vouloir dire par les fignes
qu'il me faifoit , je voulus
par deux ou trois fois dcfcendre
de deflïis mon mulet &;
m'aflbir â terre , feulement pour
manger un morceau. Enfin nous
arrivâmes environ midi au lieu
où nous devions nous arrêter,
clcrent mon More, &: I'un des deux|qui eft un Han ou une Hotellequclqucs
autres prit mon mulet par la bri-
Aiabes. ^^ ^ montrant qu'il vouloit de l'argent.
Je tirai aulTi tôt un piftorie,
appellée par les Arabes Madctie.
On pafle là l'eau avec un
^ ^ _ petit bateau , parce qu'il y a un
ict de deflbus mon habit , ' & le î petit bras de Mer qui entre aftournai
contre celui qui tenoit la ¡fez avant dans les terres. En
bride de mon mulet , dés qu'il, un moment notre barque fut cnen
eut aperceu le canon il lâcha ' vironnée de Marfouins qui fc Poiiib,,
prife , & les autres à fon exem- jouoient fur l'eau. On prend dans tjor.t on
pie fe retirèrent tout étonnez. Ces 1 cet endroit quantité d'un certain
gens étoient à pied , & n'avoient
que des bâtons remplis de plomp
par le bout comme c'eft leur coutume
, 8c dont ils fe favent fort
poiflbn long & étroit , de la lar- g„e,
geur à peu près de notre Brochet;
on ouvre cc poiflbn & on
en tire les oeufs , auxquels donadroitement
déffendre. Etant donc j dant une certaine préparation ,
tout étonnez, & «'étant un peu | l'on en fait la Boulargne , que
éloignez de moi pendant que j'a-il'on tranfporte enfuite de tous côvois
encore mon piftolet à laUez , on la mange en la coupant
main , ils me firent connoitre
d'une maniere plus civile qu'ils
n'avoient fait d'abord , qu'ils étoient
Caffirs , c'eft à dire des gens
qui font établis pour la feureté
des chemins , & que pour ce foin
qu'ils prennent , il 'leur eft dû
par chaque perfonne qui pafli un
"Para qui eft un peu plus d'un
foû. Je leur donnai ce qu'ils demandoient,
enfuite de quoi ils me
fouhaitférent un bon voiage.
De cette plaine fablonneufe on
vient au bord de la Mer, le long
duquel après qu'on a marché
quelque temps on aperçoit Alexandrie.
Ici la faim me prit & j'eus
envie de prendre quelque nourriture.
Je le fis donc entendre par
fignes au More qui me conduifoit
& qui portoit nos provifions
; Il me répondit de la même
maniere , & me fit figne de
la main qu'il falloit attendre encore
un peu , me montrant un
par tranches comme le Caviar ;
& même mangée toute feche avec
un peu de pain , elle paflfe pour
un manger délicat , comme il
l'eft en eflit. Quand on veut la
garder on met chaque morceau
à part en l'enveloppant dans
de la cire & l'on peut la porter
par tout avec foi , autrement les
mites s'y engendrent, ce que j'ai
apris par experience.
Aufli tôt que nous eûmes paffé
cette eau nous marchâmes
quelque temps le long du bord
de la Mer , où je vis encore
quelques triftes reftes de vaiflèaux
qui avoient fait naufrage. Enfuite
traverfant les i'ables nous entrâmes
dans les terres, où la réverbération
des raions du Soleil
qui nous donnoient au vifage ;
nous brûloir comme fi nous euffions
été environnez de flame.
Cependant je ne laiflbis pas de
marcher toujours , mais fentant
quel-
Hn
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