20 VOYAGE au L E V A N T
apres que nous ¡fûmes arrivez à
Smyrne.
Pendant le féjour que nous fîmes
à Micene , je tâchai de m'informer
de quelques Prêtres Grecs, fi je ne
pourrois point recouvrer quelques
antiquitez par leur moïen. Et m'etant
addrefl'é à l'un d'eux, il me dit
qu'il avoit caché en terre à Delos
une ftatuë laquelle il gardoit depuis
quatre ans, & ajouta que fi j'avois
envie de l'aller voir, & de mener
avec moi du monde de notre vaiffcau
pour la déterrer, il me conduiroit
fur le lieu où elle ctoit. J'en
allai auiîi tôt mformer le Commandant.
Je pris donc quelques matelots
avec moi, &je trouvai que c'etoit
une ilatuë de femme un peu
moins grande que Nature. C'etoit
un bas-relief fur une grande pierre,
& d'une aflez bonne main ; mais elle
étoit un peu gâtée en quelques
endroits. Nous convinmes du prix,
& nous l'achetâmes pour notre
Commandant qui la voulut porter
en Hollande. Nous la laiflàraes là,
après l'avoir tirée hors de terre, à
deßein de la faire bientôt enfuitte
porter dans nôtre Chalouppe. Ce-
De mêlé pendant tandis que nous nous en
entre le étions allez il y vint des gens avec
da°MMTn- la .chalouppe du Capitaine Theodore
& 1ère Verbürg, qui étoit un J e ceux
Pilote, au qui alloient à Smyrne. Ces gens
üeStatlir trouvé notre ftatuë comme
' nous l'avions laiilee, & s'imaginant
avoir fait une heureufe rencontre,
prirent auiTi tot conferì entre eux,
& fe mirent en devoir de la porter
fur le bord de la mer pour la mettre
enfuite fur leur vaiilèau. Les nôtres
à leur retour trouvèrent ceux ci dans
cet exercice, fur quoi notre lieutenant
leur fît connoitre l'ordre qu'il
avoit du Commandant ; mais fans
y avoir [égard, ils voulurent porter
la Satuë à leur bord, & notre lieutenant
fut fi fimple que de le leur
permettre quoi qu'il lui fût aifé de
es en empêcher. Le Commandant
fort mal fatisfait, envoia uicontinent
au Capir^'ne du Vaifleau,
pour le prier de rendre la flatuë, &
pour lui reprefenter que l'aiant achetée,
elle lui appartenoit. Le Capitaine
repondit que fes gens l'avoient
trouvée, & qu'il pretendoit la garder.
Auili tôt le Commandant y renvoia
avec ordre de dire au Capitaine
que s'il ne l'en vouloir pas croire
il lui envoieroit à fon bord le
Prêtre même de qui il l'avoir achetée,
Uvec des témoins s'il croit neccflàire,
& qu'en tout cas il vouloir qu'on
la lui rendit. Le Capitaine aufli
fier qu'auparavant fit dire au Commandant
que s'il la vouloir avoir, il
falloir qu'il vint , lui même la faire
enlever de fon bord. Le matin
donc- on leva l'ancre, & quand on
fut bord à bord, on fit encore la
même demande, à quoi le Capitaine
fans fortir de fa cajutte, ne réjondit
autre chofe finon, puifque
e Commandant veut avoir fa ftatuë,
qu'il fafle donc ouvrir l'écoutille, &
qu'il la tire dehors. On le fit aufli
tôt, & la ftatuë fut enlevée, enfuite
de quoi on retourna à fon bord.
Voila ce qui fe paflTa alors, je ne
fcai pas comment depuis cela la
chofe aura été prife en Hollande.
Le 14. du même mois après midi
l'on mit le pavillon bleu pour figne
qu'il falloir partir, & après avoir tiré
un coup de Canon on fé mit à la
Voile. Le matin fuivant nous nous
trouvâmes au deiTous de l'Ifle de
Chio fans pouvoir avancer. Le 17. Sci
nous paiTames les liles de Chio & Ipi«".
d'Ipfera, & le vent fe renforça tellement
le matin , que l'apres midi
nous mouillâmes au Fort qui eft à Arrivée
l'entrée du Golphe de Smyrne où^-®"!'™'
en arrivant nous vîmes l'Amiral de
Venife avec cinq autres vaifleaux de
guerre, qui etoient à l'ancre derrière
la premiere Ifle. Ils attendoient
deux vaifleaux marchands du
même lieu qui étoient devant Smyrne
prêts à faire voile, & qui en
partirent le lendemain à la pointe
du jour. Les Vaifleaux de guerre font
éloignez du Fort à la diftance d'un
bon coup de Canon, pour etre hors de
l'infulte des Turcs. Le fort eft bien
éloigné de la Ville de deux bonnes
heures, comme on peut voir dans k
taille douce que nous avons jointe ici,
où le Fore eft marqué i. lia été tiré
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