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 590  V  o  Y  A  G  E  au  L  E  V  A  N  T  
 nous  fûmes  devant  le  golfe  nous  ne  
 finies  que  voguer,à  caiife  du  calme.  
 I\ous  aperceumes  encore  un vailFeau  
 que  nous  jugeâmes  être  un  Londre.  
 Il  ne  fut  pas  lì  tòt  au  droit  du golfe  
 qu'il  prit  un  autre  cours.  Des deux  
 cotez  de  ce  golfe  on  voit  la  terre  
 ferme,  &  l'efpace  qui  eft entre deux  
 efb  eftiraé  d'environ  foixante  milles.  
 Les  montagnes  en font extrêmement  
 hautes.  Un  peu  plus  bas  que  l'emboucheure  
 de  ce  golfe nous aperceumes  
 un  village  à  notre  main  droite.  
 Ce  jour  là  l'eau  commença  à  nous  
 manquer,  encore  fumes-nous  bien  
 heureux  de  l'avoir  gardée  fi  longtemps. 
   Le  foir  nous  eûmes  encore  
 un  calme  qui  nous dura  toute  la  
 nuit,  de  forte  que  le  lendemain  au  
 matin  nous  nous trouvâmes au même  
 endroit  où  nous  étions  le  foir.  Le  
 30.  on  entendit  tirer  quelques  coups  
 du  côté  de  Sattalia,  que  l'on  jugea  
 qui  venoient  de  ce  Londre  ,  qui  à  
 force  de  rames  feroit  arrivé  à  la  rade. 
   Ce  matin  nous  eûmes  encore  
 du  calme ,  mais  nous  ne  laiflàmes  
 pas  d'avancer  tant  qu'environ  fur  
 les  dix  heures  nous  aperceumes  Sattalia  
 ,  &  nous  n'avions  alors  plus  
 d'eau  ,  linon  un  peu  que  l'on  m'avoit  
 gardée.  Apres  midi  le  vent  
 fraichit,  &  par  ce  moien  nous  entrâmes  
 dans  le  port  environ  trois  
 heures,  ce  qui  me  donna  une  grande  
 joye,  quand  je  fongeai  que  je  
 ferois  bien  tôt  fur  la  terre  ferme  Arrivéeà  
 pour  m'en  aller  à Smyrne > &  fur Sattalw.  
 tout  que  ce  feroit  là  le  dernier  voiage  
 que  je  ferois  avec  les  Grecs.  
 CHAPI.  
 en  E G Y P T E N S  Y  R I E ,  &c.  
 C H A P I T R E  LXXIV.  
 Defcription de layille de Sattalia.  
 DES que  nous  fûmes  erttrezdans  
 le  port, j'y  aperceu  notreLoncire  
 qui  venoit  dé  Damiette.  II  y  
 avoir  auflîplufieursSaïques,  &  d'autres  
 plus  petits  vailfeaux.  Je  trouvai  
 en  entrant  dans-lé  Port  que  la  
 vue  en  étoïc  fort  agreáble,  &  cela  
 d'autant plus que le Moufeltim  ou Preiîdent  
 s'etoit  campé  fur  une hauteur  
 au  bord  de  là  nier,  011 il  avoit  fait  
 drcflèr  quelques  tentes  pour prendre  
 le  frais.  Il  demeure  ordinairement  
 là  aufli  longtemps  que le chaud dure,  
 parce  qu'il  eft  fo^t malaifé  àfupporter  
 dans  les  autres  endroits.  
 Quand  je  fus  à  terre je  me  rendis  
 auflî  tôt^  au  lôgis  du  Confuí  de  la  
 Nation  Françôilè,quiavoit  déjaenvoié  
 fon JaniíTaire  au  port,  afin  de  
 me  conduire  chez  lui;  car  il  avoit  
 aperceu  de  fa maifon  qui  efl  firuée  
 fur  le  Port  fur  une  hauteur  qui  eft à  
 main  gauche  de la ville,  qu'il y avoit  
 un  Européen  dans  la  barque  qu'il  
 voioit  arriver.  C'eft  la  coutume  de  
 ces  Meilleurs  de  faire  cette  civilité  
 aux  Etrangers  ,  d'autant  plus  qu'il  
 n'y  a  point  d'autres  Européens  qui  
 demeurent  là.  Mais  outre  cela  j'avois  
 des  lettres de  recommandation  
 pour  ce  Confuí,  qui  venoient  de  fi  
 bonne  main,  que  je  pouvois  rñ'affcurer  
 que  j'en  ferois  fort  bien receu.  
 Auffi  tôt  que  je  fus  arrivé  j'appris  
 qu'une  Caravane  qui  alloit  à  Smyrne  
 devoir  partir  dans  huit  ou  dix  
 jours.  Cela  me  fit  refoudre  d'attendre  
 cette  occafion  ,  &  cependant  
 j'eus  le  nioien  de  voir  la  vil  c  &  les  
 lieux  des  environs.  J'en  donnerai  
 ici  une  courte  defcription,  parce  
 que  j'ai  eu  le  temps  &  des  occafions  
 particulières  d'y  remarquer  des  choies  
 qui méritent d'être  rapportées.  
 Defcripti-.  La  ville  de Sattalia,  l'une des plus  
 ra deSat-fortes  qui  foient  fous  l'Empire  du  
 Grand  Seigneur,  eft  d'une  tres  ancienne  
 ftruilure,  comme  il  eft  aifé  
 de  le  juger  par  fes  murailles.  Elle  
 a  deux  Portes  ,  l'une  du  côté  de  la  
 Terre  ,  &  l'autre  fur  le  bord  de  la  
 Mer.  La  ville  même  n'eft pas grande  
 ,  mais  fes dehors  occupent  un  
 grand  efpace,  &  font tres agréa bles,  
 plantez  de  quantité d'arbres,  &  renfermant  
 beaucoup  de  Jardins,  qui  
 feroient  aifez  beaux  s'ils étoient  bien  
 entretenus.  
 L'entrée  ou  le  Port,  eft à quelque  
 diftance  de  l'enceinte  des  remparts  
 où  il  y  a  quelques maifons,  &  entre  
 autres  celle du Confuí.  
 Quand  on  va  de  là  à  la  ville,  ont  
 rencontre  d'abord  une  rue  qui  va en  
 montant,  au  bout  de  laquelle  eft  la  
 porte  de  la  ville,  où  l'on  voit encore  
 les  armes  de  Jerufalem.  Lors  
 qu'on  eft  entré  dans la ville,  on  rencontre  
 plufieurs  anciens  bàtimens,  
 avec  quelques  Eglifes  qui  fervent  à  
 prefent  de  Moiquées  aux  Turcs.  
 J'en  vis  une  entre  autres dont le Portail  
 me  parut  fort  beau ;  il étoit  tout  
 de  marbre,  orné de petites colon nés  
 des  deux  cotez,  &  embelli  de  fculpture. 
   
 Du  côté  gauche  de  la  ville on  voit  
 un  fort  grand  bâtiment  ruiné;  ç'a  
 été  autre  fois  un  Serrali,  autantiqu'- 
 on  en  peut juger par la quantité  d'appartemens, 
   &  par  une  longue  allée  
 qui  étoit  autrefois  fous  terre,  &qui  
 fervoit  à  aller  d'un  appartement  à  
 l'autre.  Cette  allée  fubfifte  encore  
 en  grande partie.  Outre cela on voit:  
 au  devant  une  place  en  maniere  de  
 Dome,  qui  eft encore  prefque  toute  
 en  fon  entier.  Elle  a  vrai-femblablement  
 fervi  de  Bagno  c'eft  à  dire  
 de  Bain  à  ce  Palais  ,  comme  il  eft  
 aifé  de  le  juger  par  les  trous  p,ar  où  
 l'on  recevoir  l'eau.  Auprès  de  ce  
 Bagno  il  y  a  encore  une  grande muraille  
 fort haute  avec  plufieurs niches  
 qui  ont  fervi  à mettre  des  Statues.  
 Dans  l'une  de  ces Niches  il y  a une  
 Statué  fans  tète  &  fans  jambes,  le  
 corps  en  cft,habillé  à  la  Romaine  ,  
 elle  
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