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308 V O Y A G E au L E V A N T
m e , ( y f o i f o n n e r o n t c o ' v ime l e f r o -
m c n t & lleuríroní loinrns l a " v i g n e ,
c r l'odeur d s c h a c u n d 'eux Jer
a comme cdle d u v i n dit L i -
b a - n .
On en envoyé les vins de tous
¡CS cùtcz , m.ns le railîn qui les
produic y cil fort rare. Les autres
vins n'y font pas à beaueoup
près fi bons., mais il y en
a en bien plus grande abondance.
Comme le Patriarche faifoit paroitrc
qu'il avoit beaucoup d'eftime
pour nous 1 il nous faifoit
toujours prefenter du meilleur, je
le trouvois fi c.'icellent que je ne
croi pas avoir jamais goûté de
breui'.igc plus delicieux. De quelcjue
côté qu'on tourne la vue aux
environs , on roit quantité d'eaux
qui le précipitent du haut des
montagnes en bas d'une maniere
qui caufe de l'admiration. Salomon
dans ion Cantique femble en
laire mention quand il dit ch. 4:
I f . 6 F o n t a i n e d e s J a r d i n s , f u i t s
d ' e a u - v i v e , & r u i f f e a u x d é c o u l a n s d u
L i b a n . Il yen à qui croyent que
c'a été là la patrie de Noé ; &
fe Patriarche en difcourant avec
nous, nous fit connoitre qu'il étoit
de ce fentiment > 11 allégua pour
preuve de cela qu'il y a deux
montagnes aux environs de l'Anti
liban qui s'appellent encore aujourd'hui
l'une Caïn & l'autre
A b e l .
Dans le même endroit il y a
auffi une ville avec un fort beau
L a c , & les habitans du païs croyent
que cette ville a été bâtie par
Caín & t|u'clle eil la plus ancienn
e du monde , à quoi ils ajoutent
que dans la fuite du temps
elle à été appellee H e l i o p o l i s , c'eft
à dire la ville duSofeil.
A cinq lieues de Canobin il y a
aufll uu Bourg qui eft habité par
des Chrétiens , il porte encore
aujourd'hui le nom d ' E / l e n . Il eft
fitué entre les montagnes dans une
plaine , il a au milieu une montagne
fur laquelle a été autrefois
un Chateau que l'on dit qui
fe défendit quarante jours contre
J'iimpcreur des Turcs. Il y a
auflî un rmfleau qui pailè au travers.
Dans le voifinagc , aux environs
de ce Cloître de Canobin ,
fe tient dans la montagne un
Herraite qui ell François de nail'-
fance. Pendant que je dcmeurois
à Tripoli il venoit quelquefois
manger dans la maifon oii j'etois
logé. Les Marchands lui donnoient
de temps en temps les
chofes dont il pouvoir avoir befoin
, entre autres chofes il demanda
un jour un fuiil pour fe
deftendre contre les Loups & les
autres bêtes dangereufes > dont il
y a beaucoup dans ce lieu là, aufii
le lui donna-t-on. Sa demeure
ordinaire ctoit une grotte de la
montagne. C'étoit un homme fort
civil & honnête , il etoit de
bonne famille, & pouvoir avoir cin-
; quante ans. Depuis qu'il s'étoic
retiré dans cette Solitude il étoit
retourné plufieurs fois en fon païs,
&c à toutes les fois qu'il en revenoit
il apportoit toujours quelques
raretez dont il failbit prefenc
au Patriarche , qui de fon côté
lai donnoic tout ce dont il
avoit affaire , & qu'il lui demandoit.
Avant qu'il embraiîat cette
vie folitaire c'éroit un Religieux
de l'Eglife Latine , mais comme
il ne trouvoit pas que les régies
de l'ordre dans lequel il étoit fuffent
aiTez aufteres pour bien travailler
à fon falut , il s'éroit retiré
dans cette montagne oit il
menoit une vie fort pemtcntc &
fort exemplaire.
Le troifiéme jour après nôtre
arrivée dans le Cloitre nous
primes congé du Patriarche , &
après lui avoir fait un petit prefent
nous le remerciâmes de la
bonne reception & des civilitez
que nous en avions reeeuès. 11
nous fit encore boire de fon
bon vin > afm que nous puilîons
mieux refifter à l'humidité qu'il
faifoit , car le temps s'étoic fort
changé. Noos partîmes le maria
environ neuf heures par une „ . ,
, . . . . ^ iletoilr A
pluye menue qm tomboit aflez Tripoli,
dru, & qui ne nous quitta point
jufqu'a
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