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4 2 V O Y A G E au L E V A N T
Tous les vendredis, qui font les
jours qu'ils obfcrvent pour leurs
jours du Repos, on prêche dans ces
Eglifes , & c'cft pour lors qu'on
peut librement voir le Grand Seigneur
par la rue lors qu'il ie rend à
Û Mofquée ordinaire.
J e pris done , avec une autre perfonne
qui fe joignit à moi, cette
occafion de voir ce grand Monarque
de l'Orient, il pafla tout prés de
qu'ils en reviennent il Icureft permis
d'ouvrir leurs boutiques & d'aller
à leur travail -, mais ceux qui peuvent
bien s'en paficr aiment mieux
emploier le temps à ne rien faire &
à voir leurs amis, c'eft ce qu'ils appellent
un Jour d'afiemblêe. Lors
que l'heure d'aller à la priere approche
, Le Muez 'm monte fur une
de ces Tours dont nous avons parlé,
portant avec foi une Clepfydre
moi, & n'étoit accompagné que de ou horloge de fable, outre qu'il fe
trois ou quatre V _ _ ra lets ï de p1i edT l qui alloient auprès de fon cheval. Il n'y
avoit que nous feuls à le voirpaiTer,
deibrte que fi je.n'etois allé à précifément
dans le deflein de voir l'Empereur,
j'aurois pû le méconnoitre
régie auifi au Cadran, & là il crie
de toute fa force, en fe bouchant
les oreilles avec les doigts, qu'il eft
temps de venir à la priere , entremêlant
à ce cri quelques paroles à l'honneur
de Dieu & de leur Prophete
& le prendre feulement pour quel-1 Mahomet. Cela fe fait en même
que perfonne de qualité. Au refte temps fur autant de tours qu'il y a
hors de cette occaiion perfonne n'o- de Mofquées, & cela des quatre côferoit
prendre cette liberté, comme tez fucceffivement, commençant au
nous le" dirons ci après. ¡Mi d i , & finiflant au Couchant j
Il y a à cesMofquéesplufieursMi-icar on n'a point l'ufage des Clonarets
ou petites tours , dont on ;ches en quelque endroit que ce foit
peut voir la figure dans la Taille de la Turquie.
douce. Les murailles par dedans
font toutes unies & polies fans aucun
ornement , & à l'un des côtez
Il y a des Fontaines auprès de Dtvotion
toutes ces Mofquées par ce que les desTmcs,
Mahometans font obligez par leur
on y voit écrit le nom de Dieu. Il Loi de fe laver & de fe purifier ay
a auffi une certaine marque vers Jvant que d'entrer dans l'Eglife. La
laquelle on fe doit tourner quand ^ dévotion qu'ils font paroitre dans
on prie, elle eft du côté du midi; ces Lieux qu'ils tiennent pour Saints,
C'eft à caufe du Tombeau de leur eft aiTeurement digne d'admiration ;
Prophete , qui eft à la Mecque , Car. quoi qu'il puiflè arriver, ils ne
ville qui eft fituée au midi à leur fe tournent jamais ni d'un côte ni
égard. On a aufli dans ces Mof- d'autre pour voir ce qui fe paife, &
quées une Chaire où monte tous les ;fe tiennent toujours dans une granvendredis
celui qui doit prêcher, &|de attention. On ne les voit non
cez
Turcs
qu'ils appellent Imam.
Tous les Turcs font obligez,
Heurçs de autant que les affaires le leur permet-
^ " f ^ t e n t , de venir cinq fois le jour à la
Mofquée pour y faire leurs prieres.
La prémiere fois c'cft dés le point
du jour, la fécondé à midi, latroifiéme
à quatre heures du foir, la
quatrième lors que le foleil fe couche
, & la cinquième environ minuit.
Le Vendredi, qui eft comme nous
l'avons dit leur jour du Repos, ils
ont une fixiéme heure de prieres ,
outre les cinq que nous venons de
marquer ; c'elt le matui à neuf heures.
Ils y affiftent tous , & lors
plus jamais parler enfemble , ou
s'occuper à quelque chofe qui n'ait
point de rapport au fervice de Dieu.
On en trouve très peu parmi eux
qui n'ailîftent tous les jours aux heures
de la priere, ou qui du moins
ne les obfcrvent dans leur particulier,
& il n'y a rien qui les en puiffe empêcher.
Quand je me trouvois en voiage
avec eux, je les voiois tous les jours
lors que l'heure de la priere approchoit
, arrêter leurs chevaux , &
faire leurs prieres en pleine campagne
, cherchant toujours un endroit
oii il y eût de l'eau , afin de s'y
pouvoir laver au paravant. lis portent
en E G Y P T E , SY RIE, 43
tent pour cet effet toujours avec eux
un petit pot de cuivre etamé.
La maniere dont ils font leurs
prieres a quelque chofe de furprenant.
chale des
Grecs.
Ils font plufieurs gcftes &
mouvemens extraordinaires des
mains , des bras, de la tête, & de
tout le corps ; Cependant ils font
toujours à genoux , ils baifent plufieurs
fois la terre, &c. & fe tiennent
au rcftc toùjours la face tournée
du còte du Midi pour la raifon que
nous venons de dire.
Eglife Apres avoir parlé des Mofquées
Patriar- qi,, igj Eglifcs des Turcs, il
faut aufli que nous difions quelque
chofe de l'Eglife Patriarchale des
Grecs , appcllée S. Nicolas. On y
voit un morceau de la Colonne où
Jcfus-Chrift étoit attaché lors qu'il
fut fouetté. Elle eft d'un brun couleur
de fer : Les Grecs difent que le
jour du Vendredi Saint elle fuë naturellement.
On y voit aufli trois
cercueils ou coffires de fer, dans l'un
defquels font les os de la Mere des
Sept jeunes hommes qui furent martyrifex
par l'ordre d'Antiochus ,
parce qu'ils ne vouloientpasembraffer
la Religion Paienne. Les Grecs
l'ont en vénération fous le nom de
Sic Maccahée. Les deux autres renferment
les os d'une certaine Reine
qu'on dit qui a régné à Conftantinople
, & ceux de S. Theodofe,
d'autres difent de S•^ Veneranda qui
fouffrit le martyre à Smyrne. I y
a plus de fix cens ans qu'on les y conferve.
Voila ce qu'il y a de principal
pour ce qui regarde les Eglifes. N ous
pafferons à prefent à ce qui regarde
le gouvernement, & nous commencerons
par donner une courte description
du Serrait.
Serrai!. Il a à peu près la figure d'un Triangle
emplois. ' II eft bati non feulement
dans l'endroit où l'on dit qu'à été
autrefois Bys:^atice , mais on croit
aufli que fon enceinte renferme le
heu où etoient les premieres niaifons
de Campagne de cette ancienne ville.
C'elt ce qu'on appelloit le coteau
, deux des côtez duquel font
fituez fur le bord de la Mer , & le
troifiéme regarde la ville. Il eft en
touré d'une haute muraille flanquée
de plufieurs Tours & Battions où
font continuellement garde un bon
nombre 4'Aadgomoglans , ce font
pour l'ordinaire les plus chetifs des
enfans de Tribut qu'on emploie à
cela , aufli bien qu'à d'autres tels
ou hauteur de S. Demetrius ,
qui eft la pointe de la Terre ferme,
d'où l'on a une très agréable vue tout
le long du Château furremboucheure
de la Mer Noire.
Les maifons occupent le haut du
côteau & les jardins font au pied.
On eftime qu'il à de tour environ
une petite heure de chemin ; Il renferme
un fi grand nombre de perfonnes,
qu'une ville de pareille grandeur
en ièroit fuflilàmment peuplée,
d'où il s'enliiit queparfucceflionde
temps les habitans fe multiplieroienc
extraordinairement , fi dans ce Palais
qui leur fert plutôt de prifon que
de demeure, il leur étoit permis de
s'unir par le doux lien du mariage.
Car étant prefque tous tant de l'un
que de l'autre fexe dans la fleur de
leur aage, & choifis d'une complexion
faine & vigoureufe, il n'y a
pas un des Caf igts, des Boflangis,
des Achis-, & des Halvagis, c'eft à
dire des Portiers , des Jardiniers ,
des Cuifiniers & des Confituriers &
autres Officiers du Serrail, qui ne pût
en peu de temps devenir chef d'une
famille confiderable, s'il étoit attaché
par de légitimes liens à quelcune
des Sultanes ou des Odalifques
qui font leurs femmes de chambre :
Mais une troupe impitoiable d'Eunuques
noirs ne permet pas à ces
malheureufes Demoifelles ni à leurs
miferables fervantes de fe voir les uns
les autres , & moins encore de fc
parler.
Elles font fort etroitement gardées
& obièrvées les unes dans leur fervice
, & les autres dans leur appartement.
Les Sultanes n'en fortent jamais
que fous la conduite de ces Eunuques
, cncoje cela arrive-t-il fort
rarement, & non fans une permiffion
exprelfe, qui ne s'accorde qu'à
un petit nombre à la fois. Quand
elles ont obtenu ce congé elles font
environnées de ces Noirs Impuiflins.
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