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î l o V O Y A G E au L E V A N T
ceux qui ont voiagé différent confiderablemcnt,
ce qui vient en grande
partie, de ce que quelques uns-y
veulent joindre Boulac Se le Vieux
Caire » mais c'eft avec peu de raifon,
car le vieux Caire eft feparé du nouveau
par une rafe campagne qui ne
confifte qu'en prairies, & en pâturages
> & Boulac qui eft le Porc du
^aire, en cft fcparé par plufieurs
On y conte fepc Por tes, & dans
l'enceinte des Remparts , huit
étangs fort larges qui font environnez
de Fort jolies maifons.
Le nombre des quartiers y eft or- Nombre
dinairemcnt conté à vingt trois mille: desQ^aiS
mais ceux par qui je me fuis fait in- . &
ftruire m'ont aiTeurc n'y en a que „¡^^
quées.
dixfept mille qui foient connus par
leur nom, & qui font fermez tous les
terres labourables -, De forte que i foùs avec leurs portes par le moien
Boulac doit être confideré comme
une Ville à part : & en effet le Caire
eft ceint d'une belle, & forte
muraille , à quoi plufieurs n'ont pas
pris garde: & peut-êtreeft-ce lacaufe
pourquoi ils confondent le vieux
de certaines ferrures de bois, qui
s'ouvrent avec une clef de la même
matiere: Car ici toutes les ferrures
& les clefs ne font que de bois, même
celles des portes de la ville. Je
les ai conûderées avec etonnemenr,
Caire &'BouIac. Les murailles font ; & j'ai remarqué que la cicf etoit un
d'une certaine forte de pierres, qui j morceau de bois long d'un bon deparoiflènt
encore aujourd'hui aufli'mi quart d'aune , large d'un bon
blanches que fi elles venoient d'être pouce , & de l'epaiflèur du petit
doigt, au bout il y a fix ouhuitpetites
chevilles defil d'archal, ou même
de bois, qui font fichées dedans
& hautes d'environ la largeur d'un
pouce, ces chevilles en rencontrant
d'autres qui font dans la ferreure elles
les enlevent, & la ferreure s'ouvre.
Mais pour mieux comprendre
comment il y a là un fi prodigieux
nombre de quartiers, il faut fçavoir
que toutes les rues du Caire font
fort courtes & fort écroittes, &qu'à
bâties. Ces murailles font fort
bien garnies de beaux Créneaux, &
à l'intervalle de moins de cent pas,
il y a de fort belles Tours. Il eft
vrai qu'il y a quelques endroits oii l'on
ne fçauroit voir la muraille , mais
les ruines donnent affez à connoitre
qu'il y .en a eu autrefois.
J'oferois donc aflèurer que le Cair
e , quelque grand qu'on ledife, eft
à peine aufiî grand que Conftantinople
ou que Rome, mais qu'il eft
pour le moins auflî grand qu'Am
fterdam. Car on en peut aifément | la referve de la rue du Bazar ou
faire le tour en trois heures, &h:Marché, & celle du Khalits qui
plus longue rue, qui va d'un bout n'eft fans eau qu'environ trois mois
de la Ville à l'autre , & qu'on appel- i l'année , au quel temps même il y
le le Khalits fe peut faire en moins ,paife très peu de monde, à peine y
d'une heure. Lors que le Ni lfede- a-t-il une rue raifonnable dans toute
borde, & qu'il inonde le pais d'E-; la ville, tout le refte n'etantquedes
gypte , il palfe au travers de cette rue,
ou plutôt deceCanalouRuifleau.
Le plan de cette ville fait une maniere
de Croiftant qui n'eft pas fort
large , elle eft fituée dans une plaine
très agreable au pied d'une montagne
de fable fur laquelle eft le
Chateau, mais cette montagne lui
eft d'un grand prejudice,parce qu'-
arrêtant, comme elle fait, lèvent
frais qui vient de ce côté là, elle lui
trous & des ruelles, où il faut continuellement
tourner & détourner.
Et j'en ai meme vu en divers endroits
qui paiToient fous les maifons,
où il failbit tout à fait obfcur,
& qui êtoient fi étroites, que deux
perfonnes pouvoient à peineypafler
côte a côte.
On y fait auiTi monter le nombre
des Mofquêes jufqu'a vingt trots mille,
fçavoir une Mofquée pour chaque
ôte toute la fraîcheur qu'elle pour-1Quartier, mais cela n'eft pas reiglé,
roit avoir, & eft caufe que la cha-icar dans l'un il y en a plus, &dans
leur y eft fort étouffante, ce qui eau- l'autre moins. Je ne voudrois pas
fe plufieurs maladies. 'nier pourtant qu'elles ne puiTent
faire
e n E G Y P T E , S Y R I E , Sec; 2ii
Forme
des mai-
Ions.
faire à peu près en nombre , mais
excepté quelques unes qui font fuperbcment
bâties & ornées de minarets
extrêmement hauts, toutes les
autres à le bien prendre ne meritent
que le nom de petites Chapelles.
La plus riche & la plus grande
de toutes eft celle qu'on appelle GJama
il affar. Elle a été bâtie par
ce même Giaufer fondateur de la
ville, & elle paiîc encore aujourd'hui
pour la Cathedrale ; à caufe
de quoi les quatre Moufcis ou Prêtres
de la Religion Mahomcrane y
ont leur demeure. On a auflî ce
rcfpefl: pour elles , qu'elle fert d'afyle
aux Criminels , & elle entretient
de fes revenus environ huit
cens Mahometans.
Pour ce qui eft des maifons, cl-
.les font bâties de bonnes pierres &
fort groffès , elles font à plufieurs
étages fort elcvez , & par dciTus,
elles font plattes comme lefontprefque
toutes les maifons en ce païs là.
A les regarder par dehors , elles ne
paroiiTent rien, mais par dedans elles
font fort riches, principalement
celles des perfonnes de diftin£tion ;
elles ont de beaux appartemens &
de belles falles pavées de marbre,
& ont leur plancher embelli d'or &
d'arziir comme à Conftantinople.
Les beaux jardins & les belles fontaines
en font une des principales beautez
, '& en rendent la vue fort agreable
quand on la regarde de quelque endroit
élevé. Lors que le Soleil,
qui eft extrêmement chaud, & incommode
en été, eft couché, on
monte fur la piatte forme de la maifon
, où l'on fe va aifoir en compagnie,
afin d'y prendre l'air. C'eft
un des plus grands plaifirs qu'on ait
en ce païs, & ceux qui ne craignent
pas pour leur fanté y vont pailcr la
nuit pour dormir. Cette maniere
d e fe rafraîchir eft commune à tout
le monde, mais les perfonnes de diftinition
au tour. Le vent qui paiTe au travers
rafraîchit tellement la Salle qu'on y
peut fort bien demeurer long temps.
J'ai déjà parlé de la ruë appellée Parti™-
Khaltts , mais comme elle mérité
bien qu'on en dife quelque chofe KhaiitsoB
d'avantage, j'en mettrai ici quelques Canal du
particularitcz que j'ai tirées des au-'-*''"'®-
très auteurs. Car comme je n'aipû
demeurer au Caire jufqu'a ce que le
Khalits fut ouvert je n'en fçaurois
parler par experience.
C'eft une rud baife, ou un Canal
qui paflte tout au travers de la ville
& qu'on dit qui fut creufé par l'ordre
qui ont toujours de l'avantage
en toutes chofes pas delTus
le commun, fçavent auflî fe rafraiehir
d'un des Pharaons Rois d'Egypte.
Depuis que les Arabes eurent
pris l'Egypte fur l'Empereur Heraclius
d'une façon particulière. Ils
font faire au plancher de leurs falles
une ouverture ronde couverte d'un
perk Dome avec des fenêtres tout
, elle fut appellée Khdips, à
caufe itAmzu ibn Chottah, fécond
Caliphe après Mahomet , & qui fut
le premier appellé leVrincedes fideles,
parce qu'il commanda de conduire
ce Canal jufqu'a Col/nu ville
fituée fur le bord de la Mer rouge ,
afin de tranfporter des vivres du
Caire jufqu'à cette ville, & de là les
faire mener par la Mer rouge jufqu'à
la Mecque où il y avoit alors
une grande famine. Il demeura en
cet état jufqu'à l'an cent cinquante
de l'Hegire, auquel temps Giafer
il Manfur Caliphe d'Egypte le fit
boucher du côté qu'il fe déchargé
dans la Mer. Aujourd'hui il s'appelle
Khalits il Hakem , ou le Canal
de Hakem, à Caufe que Hakem
beaner ille, autre Calife d'Egypte,
a fait réparer ce que la negligence
de fes prcdecefleurs avoit laiffé ruiner.
On le nomme auflî encore il
Mirachemi , ou le Canal pavé de
marbre , parce qu'en quelques endroits
il cit pavé de cette pierre.
Lors que la Riviere eft prête à fe
deborder, on eleve une grande digue
de terre au bout de cette r u ë , de
ce Canal, ou ruiflèau , comme on
voudra l'appeller , fçavoir au bout
qui cft du côté du Nil , c'eft afin
d'arrêter l'eau & d'empêcher qu'elle
n'entre dans le Khalits : mais quand
la riviere cft venue à une certaine
hauteur le Soubachy s'y rend avec
une grande fuite de toutes fortes de
perfonnes qui font paroicre une gran-
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