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 3 0 4 .  V O Y A G E  a u  L E V A N  T .  
 B  N  1  
 A r t i v é e  
 T r i p o l i .  
 Defcripti  
 o n  de  Tr i  
 poli  
 pouvions  prendre  ce  vent  en  
 po'.ippc  &  l'avoir  favorable  en  
 changeant  de  roure,  on  jugeaàproipos  
 de  s'en  ièrvir  ,  &  il  nous  fit  
 faire  tant  de  diligence  ,  que le lendemain  
 matin  i  dix  ou  onze  heures  
 nous  allâmes  jetter  l'ancre  devant  
 Tripoli.  Le  long  de  cette  côte  on  
 vogue  11  près  de  la  Terre  qu'on  
 jeut  aifément  discerner  tous  les  
 leux  par  où  l'on  paiTe  ,  mais  
 nous  avions  paflé  les  principaux  
 pendant  la  nuit.  Nous  trouvâmes  
 ici  à' la  rade  un  vaiHèau  Hollandois  
 &  un  Anglois.  Le  premier  s'apclloit  
 Mademoïfelle  Sn/anne,  &  étoit  
 monté  par  le Capitaine T>an>el'vmider  
 Merckt.  La  côte  de  la Mer  paro! 
 t  ici  Fort  agréable  à  la  vue,  elle  
 ell"  bordée  de  quelques  maifons.  
 D'efpace  en  efpace il  y  a  des  Tours  
 oil  l'on  felt  garde;  elles font accompagnées  
 de  fortes  murailles , deforte  
 qu'on  les  prendroit  pour  autant  de  
 Forts.  Elles  font  afl'ez  bien  pourvues  
 de  Canon,  ce qui les tient  toujours  
 en  état  de  repouflèr  les  attaques  
 des Corfaires Chrétiens.  Cette  
 vue  eft  reprefentée  N".  i f i .  
 Quand  nous  fûmes  defcendus  à  
 terre  nous  rencontrâmes  d'abord  
 quelques  Magafms où  l'on  met  toutes  
 les  marchandifes  qui  y  arrivent,  
 ou  qu'on  en  doit  tranlporter.  D'ici  
 nous  traverfames  une  agreable  plai-1  
 ne pour  aller  à  Tripoli,  qui  eft  en-'  
 viron  à  une  demie  licuë  de  la  Mer,  
 &  lors  que  nous  fumes entrez  dans  
 la  ville,  nous  allâmes  à  lamaifonde  
 Monfieur  -van  Dneffche  Confuí  de  
 la  Nation  Hollandoife  qui  nous  receut  
 fort  civilement  &  qui  nous  ofi 
  frit  fa maifon  &  fa  table.  
 Etant  allé  voir la ville je la trouvai  
 jfort  agreable ,  &  fuuée au  pied  d'u- 
 1 montagne.  On voit  à  l'entour  quan- 
 ! tité  de Jardins  plantez  de  meuners :  
 I Auffi  y-at-il  beaucoup  de  foyc.  Il  
 j y  a  ici  quantité  de  vues  agréables,  
 j  tant  dans  la  ville  que  dehors,  parce  
 qu'il  y  paffe '  beaucoup  d'eau  
 qui  vient  de  la  montagne  du  Liban. 
   J'en  delllnai  quelques  unes  ,  
 &c  comme  je  me  trouvai  dans  un  
 endroit  d'où  je  pouvois  fort  bien  
 voir  la  ville,  je  la  dcflînai  auffi  ,  
 comme  on  la  voit  N°.  ij-j.  L'eau  
 qui  y  paroît  comme  une  riviere, 
   eft  celle  qui  defcend  du  Liban  
 &  dès  qu'elle  a  traverfé  la  ville  ,  
 elle  prend  fon  cours  au  travers  des  
 terres,  &  fc  va  décharger  dans  la  
 mer.  Elle,  a  en  plufieurs  endroits  
 très  peu  de  profondeur  ,  comme  
 on  le  voit  par  deux  Turcs  à  cheval  
 . qui  fe  mettent  en  état  de  la  
 paflèr  à  gué,  ce  que  l'on  fait  d'ordinaire  
 afin  de  gaigner  du  chemin.  
 Le  grand  bâtiment  qu'on  voit  au  
 miheu  de  la  Taille-douce  eft  la  
 maifon  où  demeure  le Baflà.  :  
 La  ville  en  elle  même  n'eft  pas  
 de  grande  confequence,  mais  néanmoins  
 les  maifons en  font  bâties  de  
 pierres  de  taille,  &  la  plus part font  
 aflez grandes  &  remarquables.  Les  
 principaux  quartiers  font  bien  peuplez  
 ,  mais  il  y  en  a  d'autres  où il  
 n'y  a  point  de  bâtiments  ,  &  qui  
 font  deferts.  Le  Safar  ou  rue  des  
 marchands  eft  en  alTez  bon  état.  
 Les  Nations  Françoife  &  Italienne  
 y  ont  ordinairement  leur Vice-Conful. 
   La  plus  grande  partie  des  
 marchands  font  François;  Les  Arabes  
 y apportent  beaucoup  de cendre  
 qui  fert  à  faire  du  Savon  &  du  
 verre.  
 CHAPI*