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 Reccpti- ment  La  Fortune  qui  eft  àprefent  
 de  au  fervice  du  Roi  d'Angleterre  en  
 l'Auteur  qualité  de  Peintre  &  garde  des  Ta- 
 S ' d ^ b l e a u x .  Nous  renouvellâmes  avec  
 Peintres  bien  de  la  joie  notre  ancienne  con- 
 Flamaiis  , noiflânce,  &  nous  limes  tellement  
 amitié,  que  je  le  priai  de  faire  enfefait. 
   forte  que  je  puflè  obtenir  de  me  
 trouver  cette  nuit-là  dans  l'aifemblée  
 des  Flamands  ,  pour  me  faire  
 aggreger  au  corps de la Société,  qu'- 
 on  appelle  de  Bend,  ce  qu'il  m'accorda  
 fort  volontiers.  Et  comme  
 il  ne  falloir pas moins de  feptperfonnes  
 pour  recevoir  quelqu' un  dans  la  
 Société)  nous  fumes  obligez  de  courir  
 cà  &  là  pendant  quelques  heures  
 dans  la  nuit  avant  que  de  pouvoir  
 alTemblcr  ce  nombre  :  mais  enfin  
 nous  fumes  fi  heureux  que  nous  en  
 trouvâmes  une  fois  autant  qu'il  
 nous en  falloir, &  pour  lors ma  requête  
 me  fut accordée,  &  je  fus  honoré  
 par  cette  illuftre  mmpagnlc  d'Aiciftes, 
   du  nom  à'Adonis.  
 On  fçait  aflèz  qu' il  y  a  à  Rome  
 une  telle  Société,  mais  comme  perfonne  
 n'en  a  encore  écrit,  que  je  
 fâche,  pour  nous  dire  ce  que  c'eft,  
 en  quoi  elle confifte,  &  comment  fe  
 fait  a  réception  en la Société,  je  ne  
 ferai  pas mal ,  cemefemble,  de  décrire  
 ici  ce  qui  s'y  pratique  d'ordinaire. 
   
 On  me  mena  d'abord  dans  une  
 éhambre  accompagné  de  quelques  
 uns  des  Confreres.  Cependant  on  
 étoit  occupé  dans  un  autre  endroit  
 à  préparer  tout  ce  qui  étoit  neceilàire  
 pour  la  Cérémonie,  dont  on  ne  
 me  donna  pas  la  moindre  connoiffance, 
   jufqu'au  moment  qu'on  m' y  
 conduifit  moi  même  avec  bien  delà  
 façon.  Là  je  vis avec  l'etonnement  
 que  chacun  peut  s'imaginer  la  plus  
 belle  Reprefentation  que  l'on  puiflè  
 dire.  C'etoit  tous  les  Confreres en  
 perfonne  ,  qui  reprefentoient  chacun  
 un  perfonnage  different mais  avec  
 tant  d'addreiîè  &  d'agrément,  
 qu'ils  auroient  fait  honte  aux  plus  
 habiles  Comediens.  
 Dans  cette  reprefentation  il  y  en  
 a  un  qui  s'appelle  parmi eux  Veld- 
 'paap,  &  qui  feul  auffi  porte  la  parole. 
   Il  eft  alîîs  avec  beaucoup  de  
 gravité fur un  fiégeelévc,  &propofe  
 dans  un  difcours  bien  étudié  qu'il  
 addreffe  au  Vert,  (c'eft  ainfi  qu'on  
 appelle  celui  qui  doit être initié)  certaines  
 Loix  &  regies qui  contiennent  
 les  preceptes  de  la  Peinture,  &  les  
 Statuts  inviolables  de  la  Société.  Aquoi  
 l'afpirant  aiant  répondu  avec  
 un  profond  refpefl: qu' il  eft  difpofé  
 à  executer  fidelement  toiit  ce  qu'  on  
 lui  a  prefcrit,  le  V'eld-'Paap  lui  met  
 fur  la  tefte  une  couronne  de  Laiirier  
 ,  &  en  mefme  temps  tous  les  
 Confreres  afliftans  crient  a  haute  
 voix  Vive,  Vive,  Vive  notre  nouveau  
 Confrere—  Ici  on  lui  donne  
 le  nom  qu' il  doit  porter,  &  cette  
 Ceremonie  s'appelle  Baptifer.  nom  
 qui  n'eft  pas  fans  quelque  abus,  &  
 qui  a  quelquefois  fçandalifé  les  Ecclefiaftiques. 
   
 Enftiite  de  cela  on  lui  donne  avec  
 certaines  Ceremonies  fes  Lettres  
 d" aiTutiaLÎon  ,  qui  Tone  fignées  
 de  tous  les  Afliftans.  Ce  qui  étant  
 achevé  avec  quelques  autres  particularitez  
 agréables  qui  font  encore  
 de  la  Ceremonie,  on  fe  rend  dans  
 le  lieu  où  la T abl e  eft dreiTée,  &l'on.  
 fait  un  bon  repas  dont  le  nouveau  
 Confrere  paie  les  frais,  comme  de  
 tout  lerefte.  
 Apres  avoir  pafle  la  nuit  dans  ces  
 rejouilTances  ,  on  fe  rend  au  point  
 du  jour  au  tombeau  de  Bacchus  
 pour  l'arrofer  ,  comme  on  dit  
 ordinairement:  Il  eft  à  une  bonne  
 lieuë  de  la  ville  dans  une  petite  Eglife  
 appellée  Sainte  Agnes.  
 C e  Tombeau  cft  d'un  beau  Porphyre  
 ,  aiant  aux  quatre  coins  une  
 reprefentation  du Dieu  du Vin.  Tout  
 vis  à vis  il  y  a  une  hôtellerie  où  l 'on  
 fait  voir  au  nouvel  Affocié  les  plus  
 agreables  vues  de R ome ,  &  l'on  s'y  
 divertit  tout  le  jour:'  Mais à  l'égard  
 de  la  depenfe  qu'on  y  fait,  il eft à la  
 liberté  du nouveau  Confrere  de  paier  
 tout  ,  ou  de  n' en  paier  que  la  
 moitié,  ièlon  fa  libéralité  ou  fon  
 pouvoir.  
 On  croit  que  cette  Société  a  commencé  
 dés  le  temps  du  célébré  Raphaël  
 ,  &  qu'  il  en  a  été  le  principal  
 fondateur.  Ainfi  il  n' y  a  gueres  
 moins  de  deux  cens  ans  qu'  elle  
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