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 1 2 0  V  O  Y  A G  E  au  L  E V  A  N  T  
 vé  que  la  Charge  dc  ce  premier  
 Eccleliaftique  étoit  autrefois  cn  plus  
 grande  opinion  de  Sainteté  auprès  
 des  Empereurs  Ottomans  ,  qu'elle  
 ne  l'eft  aujourd'hui.  Car  cidevant  
 ils  n'entreprenoient  jamais  
 la  guerre  ,  m  ne  prenoient  aucune  
 refolution  fur  quelque  affaire de  
 confequence  ,  fans  avoir  pris  l'avis  
 du  Moufti,  &  ils  ne  croioient  
 pas  que  fans  cela  le  fuccez  cn  pût  
 être  heureux.  Mais  à  prefcnt  ils  
 ne  fe  lient  pas  fi  fort  les  mains  ,  
 &  ils  ne  fe  font  pas  une  affaire  de  
 cette  formalité  ,  quoi  qu'ils  le faffcnt  
 pourtant  quelque  fois  pour  
 fuivre  la  coutume.  Il  arrive  même  
 fouvent  que  le  Grajid  Vizir  ,  afl'uré  
 des  moiens  &  appuié  de  fon  
 autorité  ,  s'attribuë  le  pouvoir  de  
 faire  les  chofes  de  fon  chef  ,  &  
 alors  pour  garder  les  formes  ,  il  
 •  confultc  le  Moufti  fur  le  fens  de  
 la  Loi  ,  qui  dans  ces  occafions  
 ne  manque  pas  de  fe  trouver  conforme  
 aux  intentions  du  Premier  
 Miniftre.  
 Il  n'y  a  jamais  plus  d'un  Mouf  
 ti  à  la  fois  ,  &  il  doit  comme  
 nous  avons  dit,  faire fa  demeure  à  
 Conftantinople.  Mais  comme  il  
 n'eif  pas  poflîble  que  toutes  les  
 affaires  de  confcience  qui  arrivent  
 dans  tout  l'Empire  qui  eft  d'une  
 très  vafte  etenduë  ,  puiflênt  être  
 réglées  par  le  Moufti  feul  ,  d'autant  
 moins  qu'il  y  cn  a  plulleurs  
 qui  demandent  une  prompte  expedition  
 ,  les  Cadilefquers  ont  ce  
 Cadilef-pouvoir  hors  de  Conftantinople  
 M o u l l a s  <^hacun  dans  l'etenduë  de  fa  Jurif- 
 & C a d i s .  diction  ,  car  ils  prennent  auflî  
 bien  connoiflànce  des  afiàires  Ecclefiaftiques  
 que  des  affaires Civiles.  
 Ces  Cadilefquers,  pour le dire ici en  
 paffant  ,  jugent  auftî  des  affaires  
 de  la  guerre  ;  car  cn  Turquie  les  
 foldats  ont  ce  privilege  à  l'excluCon  
 de  tous  les  autres  fujets  ,  de  
 ne  plaider  que  devant  leurs  Officiers  
 )  &  dc  ne  pouvoir  être  jugez  
 que  par  eux.  Auffi  faut-il  
 que  le  Moufti  ,  avant  que  d'etre  
 clevé  à  cette  dignité  ,  ait  été  Cadilefquer  
 ,  &  qu'il  en  ait  exercé  
 la  charge  avec  approbation.  Au  
 dcffeut  d'un  Cadilefquer,  on  s'ad- 
 Imains.  
 dreiTe  au  Moulla  ou  Mnlla  ,  qui  
 eft  le  Chef  des  Cadis  ,  &  lors  
 qu'il  n'y  a  ni  Cadilefquer  ni  Moulla  
 ,  comme  cela  arrive  en  plulieurs  
 endroits  de  l'Empire  Ottoman  
 ,  c'eft  le  Cadi  qui  exerce  
 cet  Office  ,  &  qui  eft  Juge  cn  
 toutes  fortes d'affaires.  
 Ceux  qui  font  le  fervice  dans  Miniftres  
 les  Mofquées  font  appeliez  par  les  EccIeOa- 
 Turcs  'Danifmend  ,  &  les  Francs^'P'''^^^  
 ou  Chrétiens  les  nomment  Talifmans. 
   Leur  Chef  cft  l'Imam  ou  
 Emaum.  
 Ces  Imams  qui  font  comme  les  
 Curez  ou  Pretres  de  Faroiflès,  
 font  obligez  d'aller  faire  la  Priere  
 aux  heures  qui  y  font  deftinées  
 ,  chacun  dans  leur  Mofquée  
 ,  &  pour  cela  ils  peuvent  
 lire  dans  1'Alcoran,  &  avant  que  
 d'exercer  leur  Minifterc  il  faut  
 qu'ils  faffent  voir  qu'ils  paffenc  
 parmi  leurs  voifins  pour  gens  
 d'honneur  &  de  bonne  vie.  Lors  
 que  quelque  Imam  vient  à  mourir  
 ,  les  gens  du  quartier  prefentent  
 une  perfonne  au  Grand  Vizir  
 pour  remplir  la  place  du  deffunt  
 ,  après  avoir  affeuré  qu'il  a  
 toutes  les  qualitez  requifes  pour  cela  
 ,  &  après  avoir  lû  quelque  chofe  
 de  1'Alcoran  devant  ce  Miniftre  
 ,  il  eft  auffi-tôt  inftallé  dans  
 la  charge  ,  fans  obferver  d'autres  
 ceremonies.  
 Les  Muézins  font  une  efpece  de  
 miniftres  d'un  plus  bas  ordre  ,  &  Muëzins.  
 leur  office  eft  de  monter  fur  les  ""''S"'- 
 Minarets  ,  pour  appeller  le  monde  
 à  la  Prière.  
 L'on  a  encore  les  Hodgias  ,  qui  
 font  des  perfonnes  âgées  &  graves, 
   fort  verfées  tant  dans  les affaires  
 du  monde  que  dans  la  fcience  
 de  l'Alcoran  ;  ainfi  on  peut  à  
 bon  droit  les  comparer  à  nos  Juris 
 confultes  ,  comme  aufli on  s'addrcftè  
 à  eux  pour  les  confultcr  fur  
 les  affaires  d'importance  ,  &  ils  
 font  en  grande  eftime  &  en  grand  
 credit  parmi  le  peuple.  Ils  font  
 auflî  le  fervice  ,  &  prêchent  quelque  
 fois  aux  grandes  fêtes  ,  ce  que  
 les  Imams  n'ofent  faire  pour  l'ordinaire  
 ,  
 c n E G  Y P  T E ,  S Y R I E .  &c.  m  
 dinaire  ,  à  moins  qu'ils  n'ayent  
 bonne  opinion  d'eux  mêmes  ,  &  
 qu'ils  ne  fe  fentent  quelques  ta- 
 Icns.  
 Le  Moufti  ,  quelque  confiderable  
 que  foit  là  charge  ,  n'a  aucune  
 autorité  fur  les  Imams  ,  parce  
 qu'il  n'y  a  entre  eux  aucune  
 Hierarchie,  ou  qu'ils  n'ont  point  
 dc  Chef  au  deffus  d'eux  ,  chacun  
 eft  indépendant  dans  fa  paroiffe  
 ,  &  perfonne  n'a  droit  de  
 lui  commander  ni  de  le  reprendre.  
 Ils  ne  font  foumis  qu'a  la  puiflànce  
 ièculiere  ,  pour  ce  qui  regarde  
 les  affaires Civiles  &  Criminelles.  
 Les  Tures  ont  auiTi  divers  Ordres  
 de  Moines.  mais  dont  la  plus Moines,  
 part  font  des  impies  &  des  gens  
 iàns  Religion.  Les  Tlervis  paflent  .  
 pour  les  plus  traittables  &  les  plus  
 honnêtes  gens.  Ils vont fort fimplement  
 vêtus  avec  un  gros  feutre  
 fort  haut  fur  la  tête ;  ils mènent  une  
 efpece  de  vie  Clauftrale  ,  &  
 affeftent  de  palTer  pour  Santons  
 ou  Saints  :  mais  ce  font  ,  à  dire  
 le  vrai  ,  de  mechantes  ames 1  
 de  francs  hypocrites  ,  &  pour  
 l'ordinaire  de  grands  ivrognes  &  
 d'infatigables  fumeurs  dc  Tabac.  
 a  CHAPII  
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