TT idim
ü
Í 'Í
1^6 VOYAGE
dans le Chrillianifmc de Sacre des
Rois.
Refpca Depuis que cette couronne eft
& fidélité pafTée dans la famille des Ottomans,
eft jamais fortie. Auffi eft
mille des elle en iï grande veneration chez les
Ottomans.Turcs, qu'ils n'oferoient mêmepenfer
à mettre quelqu'un fur le Thrône
au préjudice de l'heritier legitime.
Mais fi cette famille venoit à
manquer un jour faute d'enfans mâles,
il faudroit, à ee que j'ai oui dire
, que la Couronne retournât au
Cham des Tartares.
On ne voit jamais ici les fujets
pecher contre la fidélité qu'ils doivent
à leur Prince, ni fe rendre coupables
d'aucune trahifon: Et je ne
croi pas même que quelque avares
qu'ils foient, l'argent ou quelque
autre avantage femblable , les
y pût jamais porter. II feroitàfouhaitter
que le contraire ne fe pût pas
dire des Chrétiens.
Il en eft de même à l'égard de la
Religion , les Turcs font bien plus
a u L E V A N T
attachez à leur Mahometifnie, que
les Chrétiens ne le font à la Sainte
Religion qu'ils profcflcnr; Car s'il
fe trouve des exemples de quelques
Turcs qui aycnt cmbraifé la Rehgion
Chrétienne, ils ne font pas en
grand nombre , & il faut de très
grandes raifons pour les y porter:
au lieu qu'on voit fouveiit dans ce
pais là que les Chrétiens ne fe font
pas une affaire d'embraifer le Mahometifme
, s'ils en efperent quelque
avantage, eux qui ne le devroient
jamais faire, même par contrainte, &
auiTi les Turcs les eftiment ils moins,
depuis qu'ils ont changé , que lors
qu'ils demeurent fermes dans leur
: Religion. Car l'experience leur a
j appris qu'il ne faut rien attendre
de bon d'une perfonne quin'eft pas
fidèle à fon Dieu. J'en ai vii plus
d'un exemple à Conftantinople &
ailleurs dans l'Empire Ottoman, &
ceux qui en parlent d'une autre
maniéré n'en font pas biei^ informez.
CHAPI.
en EGYPTE, SYRIE.&c: 147
C h a p i t r e XXVII.
Tmkularite^mchanths forces duCjrandSeigneur. Quelques
autres chofes qui apaniemient à cette mattere.
Forces
tOmmc un Empire d'auíligranju'eft
celui des
fubfifter fans un
Grand
Seigneur. 1 urcs ne fçauroit
nombre confiderable de bonnes
troupes , le Grand Seigneur entretient
toujours foit en temps de paix
ou en temps de guerre quantité de
foldats tant d'Infanterie que de
Cavalerie , qui reçoivent leur paie
tous les deux mois. L'infanterie
cil divifée en plufieurs corps, tels
que font les Capidgis les Solaques,
les JaniJIairei &c.
Les Capidgis, comme qui diroit
Gipidgis-igj gardes de la Porte, parce qu'-
ils font garde à la Porte du Serrali
font un nombre de plus de
trois milles, & font fous un General
qui porte le nom de Capidgi
Bachi. Ceux-ci en diverfes occafions
, comme dans les Audiences
des Ambaflâdeurs, fe tiennent
autour de la perfonne du Grand
Seigneur, & hors de Conftantinople
ils font auffi les executeurs des
Arrêts de mort qui viennent de fa
part. Car quand il faut couper la
tête à quelque malheureux qui a
encouru la difgrace du Prince, c'eft
par les Capidgis que cela fe làit.
Ils portent, afin de fe diftingucr
des autres corps , une efpece de
bonnet pointu.
, Les Solaques font proprement
^''"'^'•les Gardes du Grand Seigneur, &
il fe tiennent autour de lui lors
qu'il va par la ville. Leurs armes
font la flèche & l'arc, & ils portent
auiîl un bonnet pointu, mais
d'une autre maniere que celui des
Capidgis, & orné de plumes. Ils
portent ce nom de Solaques qui fignifie
Gauchers parcequ'etantordinairement
à la main droite du
Grand Seigneur , lors qu'ils doivent
tirer, il faut qu'ils tirent la
, corde de leur arc de la main gau-
|che, de peur de tourner le dos au
Grand Seigneur.
Mais les principaux de toute JanifTaires.
l'Infanterie font les Janiffaires qui
font compofez en partie des enfans
de Tribut, & en partie de renégats
volontaires, dont il y a tres
grande quantité, mais fort peu de
Turcs d'origine. Ce corps eft tres
puiilânt, &Í feul de fon efpece jufqu'a
caufer de l'etonnement. Il a
de grands privileges & de grands
avantages, à caule de quoi ils font
crains & refpeftez, ce qui les rend
auffi fort infolens, & leur fait fouvent
commettre de terribles excez.
Cependant perlonne n'oferoit fur
peine de la vie, mettre la main fur
eux, finon leurs propres Officiers,
& eux contraire ont le pouvoir,
quoi que fans aucune raifon, de
frapper toutes fortes de perfonnes,
ce que les Grecs n'éprouvent que
trop fouvent , comme je l'ai vû
plufieurs fois, pour des fujets de
néant, ou inémc tout à fait controuvez.
Les Confuís & les Ambaffadcurs
en ont ordinairement dans
leurs maifons, & ils les font marcher
devant eux lors qu'ils vont
par les rues. Ceux auffi qui craignent
d'etre infultez tant dans la
ville qu'a la campagne , à caufe de
l'infolencc des Turcs , ont auflî le
foin de prendre un JanilTaire qui
marche toujours devant eux un gros
bâton à la main , & tant qu'ils l'ont
à leur fervice ils font à couvert de
toute infultc.
On eftime que le nombre des
Janiflàires de la Porte va à plus de
douze mille.
Ils demeurent pour la plus part
dans de grands bâtimens qui comprennent
Cent foixantc Odas ou
T 2 Cham-
S' I