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152 VOY AG E au L E V A N T
e H A P I T R E X X I X .
Tromperie des Çrecs. Capitation de leurs enfans maies.
Défauts des Femmes Grecques. Danger qu'il y a pour les Européens à
les frequenter. T unit ion des femmes Grecques qui fe laiffent aller à
Îimpudicité. Etranges marques d'amour des Jeunes hommes Grecs. Mariages
des Grecs, & des Juifs qui fe marient fort jeunes.
A )
Vant . que de quitter Conftantinople
, il faut que je faffe
encore quelques remarques au fujet
de Grecs.
Trompe- different peu des Turcs pour
rie' Ses ce qui regarde les moeurs , mais
Grecs. ¡| s'en faut beaucoup qu'ils foient
auili finceres , ce qui cil caufe que
lors qu'on a quelques intérêts à démêler
avec eux , il faut bien fe tenir
fur fes gardes > afin de ne fe pas
laïiTer tromper par leurs rufes.
Mais au reftc on ne trouve plus
parmi eux la moindre ombre de cette
force d'efprit & de ces belles fciences
qui les ont autre fois rendus fi
célébrés. Toute leur fcience eft dégénérée
en une grofliereté qui n'a
pas à peine fa pareille. Maisil faut dire
auffi pour leur décharge que l'oppreffion
fous laquelle ils gemiffent a etient
tout le feu de leur efprit,& qu'on
trouveroit à peine aucune nation au
monde qui ne perdit tout fon luftre, fi
elle éprouvoit la tyrannie de la domination
Ottomane aufli fenfiblement
que l'ont fait les Grecs, comme nous
l'avons dit au Chapitre treizieme.
Tous les enfans mâles des Grecs,
aufli bien que des Jui f s , quifontfujets
du Grand Seigneur , doivent,
lors qu'ils font venus à l'âge de quatorze
ans , paier une certaine fomme
par tète, qu'ils appellent Harache
ou Karadge. Cela va tous les
ans à quatre Piaftres , qui font environ
dix francs, mais ceux dont les
grands biens font connus , payent
- ordinairement le double. Perfonne
n'eft exempt de ce tribut, quelque
pauvre qu'il puiiTe être , excepté
ceux qui font fous la proteftion de
quelques Ambaffadeurs. Mais pour
s'entre-foulager les Juifs ont de coutume
dans quelques villes, de Riireen
commun une certaine fomme dont
cette Capitation efb payée. • Mais je
n'ai jamais oui dire que les Grecs
exercent entre eux cette charité,
peut-ctre faute de moiens. Au reftc
ce qu'il y a de fâcheux dans cette
occafion, c'cft que ceux qui ne peuvent
paier font quelque fois contraints
de fe faire Mahometans.
Il y a plufieurs perfonnes qui
croyent que les fils ainez des Grecs
& des Juifs font obligez de devenir
Janillàires, mais cela n'eft pas vrai,
& il n'a jamais été en ufageque lors
que les Turcs prirent la premiere
fois Conftantinople II eft vrai qu'on
dit que dans les lieux eloignez les
Turcs enlevent fouvent les enfans
des Grecs dès l'âge de fept ans,
pour les faire fervir dans le Serrail,
comme nous l'avons deja dit à la fin
du Chapitre treizième.
Pour ce qui regarde leurs F emme s , ¿es pe"*!
elles ont un orgueil incroyable-, mais mes Crécelles
ne font pas fi belles à beaucoupl'"^®'
prés , que quelques voiageurs nous
les ont reprefentées. Les plus belles
que j'ayé vues ç'a été dans l'Ifle
de Chio ou Scio , ' dont je parlerai
dans la fuite. A cet' orgueil elles
joignent une pareiTe qui ne le cede
point à celle des Femmes de Turquie,
& tout ce que nous avons dit
des défauts de cesdernieres , fedoit
entendre pour le moins autant des
Femmes Grecques.
Les Turcs , au moins ceux de Danger
Smvrne , ne permettent pas aux "i"''' ï,'''
"F ran' cs dj e. vivre dAa ns l!a.. djtié bauche jr™"-^o jiee,1n«s
avec les femmes Grecques ; Mais à les frceomnie
l'argent fait tour dans ce pais
là , ceux qui n'ont pas le don de
continence n'ont qu'a aller trouver
le
en E G Y P T E , SYRIE, &c.
le Cady, de qui ils obtiennent des
lettres de permiflion, pour lesquelles
on paye ordinairemeut depuis dix
jufqu'a vingt Ecus ; autrement on
court rifque d'etre arrêté par le Soubachy,
qui eft comme te Baillif, &
d'être mis en prifon, d'où l'on ne
fort point , quand on paiTe pour être
un peu à fon aife, qu'il n'en coûte
deux ou trois cens écus; &fi l'on
n e les paye bien promptement, ils
vous mettent la Dcmoifelle avec qui
l'on a éré furpris, fur un âne , &on
lui attache autour d'elle les entrailles
dequelque charogne -, dans cet equippage
on la promène par la ville en criant
de temps en temps, qu'on la traitte
ainli pour avoir été furprife en
f-uite avec telle ou telle perfonne.
J ' e n ai pourtant connu quelques uns
qui vouloient fe laiflèr furprendre
exprés avec une Grecque, afin d'àî
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banche. J'en ai vû quelques uns
dont les bras etoient tellement déchiquetez
qu'à peine y avoit-il un
endroit ou il n'y eût quelque cicatrice.
Le mariage des Grecs fc fait delà M-,riaee
maniere que nous allons dire. OndesGrcS.
meine l'Epoufe dans une chambre à
part après qu'on l'a bien parée, afin
que les parens & les amis l'aillent
voir. Apres qu'elle a été trois
ou quatre heures dans cet état, fes
compagnes & fes bonnes amis viennent
pour lui tenir compagnie, &
elles fe placent auprès d'elle, les unes
à fa main droite & les autres à
ft gauche. Alors on va quérir le
Tapas ou Preftre Grec, & l'on met
dans la chambre un fiege ou une petite
Table pour fervir d'Autel, &
fur cette table une planche ou tableau
où eft réprefenté quelque
voir le plaifir de voir faire cette pro- ISaint. Tout auprès l i v "â deui'ln'^
nrenade, Mais le Sou-bachy qui fça-|neaux & deux p L e s eL ro^esfai-
I n c r ' T ' T'' ' ^ on y metdeux
n-erV^ ? T croient ;eierges allumez. Apres on fait vee
f Fnro ^^ ambr e , & on
en Europe, ne vou oit pas k don- lui donne le haut bout de la mariée.
Qaand les Turcs ont aufli quel- au Papas, qui le met devant eux,
q"'"neGrecques'aba,i-:& qui demande à ceux qui aflift n
Î e z e l i V T T Ce r emo n i e , s'il ont quelque
S l , ; ^ ^ p ^ perfonnes que
iage-temme. Si 1 on trouve qu'c e • 'on va marier I a Hpilîic r^^™
fo.t vierge, elle eft relâchée^ au-pere ^ ^ S n q l ' e f ô„,Se""
.rement elle court nfque d'etre feve- faranymphe , met le prereTfon
rement pu„,e mais h elle peut fe'prelbnt dans le plat , & f ' « h"
racheter pal- le mo.cn de l'ar-ltous ceux qui font priez des Noeë
gdue ntS, ouce- baqcuhi ye, fte lpler onper emmaennqt ulee bpaust font auffi leur prefent chacun félon
d'être reconnue pour honnête fille.
Etranges • '^•'ecs iè marient fort
marques je""cs & dans l'âge qu'on n'a cnco-
<|'a.,,oi>r re gBcres de ligeile, les marques
It^s Jeunes hommes
Grecs. donnent à leurs MaitreiTes font fort
iingulieres & d'un grand emportement;
ils fe font des incifions aux
bras avecde.-icouteaux, autour delà
maifon de leurs maitrefles, ou lors
qu'ils fe divertiilcnt entre eux en
compagnie, & ils leur témoignent
ainfi par l'effufion de leur fang, la
violence de leurpaftion. Ces extravagances
, dont les Turcs ne font pas
exempts, ic font fur tout dans la défon
pouvoir ou felon qu'il eft liberal.
Quelques uns donnent un Ducat
d'or, les autres un Ecu, & les
moins accommodez, une piece de
vingt huit foûs. Il y en a qui donnent
quelque chofe pour le ménage,
comme un mouchoir ouvré, des
chandeliers, quelque piece de batterie.
ou tels autres petits meubles.
Quand tout le monde a fait fon prélent,
le Parrain vient qui ramaife
tout l'argent qui eft dans le plat, le
lie dans un mouchoir , & le met
dans le giron de l'Epoufe, il afl'emble
aulli les meubles & les met à côté.
Alors l'Epoux & l'Epoufe viennent
devant le Prêtre, lequel avant
^ que
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