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ié4 VOYAGE au L E V A N T
ajouter foi à ce qu'il difoit, parce
qu'il étpit tombé dans l'efclavage
de fort bonne heure. Le Confuí
l'envoia donc à la Cuifinc avec ordre
de le retenir dans £i maifon,
parce qu'il vouloir éprouver fi fa
langue qui avoit été fi empêchée,
ne fc delieroit point enfin ; Et comme
il y avoit quelques uns des domeftiqucs
qui parloient fouvent Flamand
, il ne fe pafla pas trois jours
que l'Efclave commença à ecorcher
les mots , & à confirmer ainli ce
qu'il avoit donné à entendre délie"
commencement. Cependant à la
recommandation du Confuí il fut
mis lut le rôle des Matelots par le
Commandant, & on lui donna des
habits & tout Je refte de l'cquippage.
On le mit done fur k vailTeau,
mais à condition qu'il revicndroit à
terre au bout de iept ou huit jours,
afin de voir comment fe tourneroit
fon langage. L'expcdient fut fort bon,
car huit jours après étant revenu
chez le Confuí , fa langue s'etoit
tellement déliée à force de parler avcc
les Matelots, qu'on pouvoit fort
bien reconnoitre qu'il étoit Zelandois
natif de Tervére. Tout le monde
trouva fort extraordinaire qu'une
perfonne piit oublier fa langue maternelle
jufqu'a ce point > mais on
en avoit un exemple devant les
yeux , dans lequel je ne croi pas
qu'on doive foupçonner qu'il y eût la
moindre fraude , vû l'exaftitude avec
laquelle nous examinâmes toute
cette affaire.
CHAPIen
E G Y P T E , SYRIE, &c. 165
C h a p i t r e X X X I I .
'Refolution prife d'aller à ferufalem. Départ de Smjriie,
Breve defcription de Fotta Nova. Ceremonies qiion ohfèrve dans la reception
d'un Renegat qui embraffe la creance Mûhometane. Snuattonde
Torto ^Palermo. Coloquiti. Tiefeript ion de l'lße & de la 'Vitle de Chw,
Stanchio ou Ifola longa, & Rhode. Situation de Tyr. Arrivée à T)ainiette.
Etrange rencontre avec quelques Arabes, ¿rc.
LOrs que j'ctois en Italie j'avois
toujours eu une grande envie
Refolu- d'aller à Jerufalem, & ce même déiir
m'aiant repris depuis quelque
jera&km^ temps , & même avec plus de paifionquejamais,
jemepreparay àfaire
ce voiage avec Roger de Cleves qu
Barces ou petites pieces; il etoit fourni
de quarante rames, deforte qu'il egaloit
à peu près l'equippage ordinaire
desgaleres, qui en ont rarement
plus de foixante, & il v.avoit
en tout foixante dix hommes la plus
part Grecs , & le relie Turcs.
avoit aufli demeuré quelque temps | Nous avions d'abord le vent Sudchez
le Confuí, & qui avoir envie j E í f , mais il tourna bien
d'aller à Chypre. Le Conful qu
nous avoit déjà comblé de fes bien
faits
pourvoir
neceffaires.
donc de partir le 9 Février: mais
un terrible orage de vent & de pluye
qui dura tout le jour nous empêcha
N o r d , & enfuite au Nord-Oueft,
ce qui nous obligea de louvoier
eut encore la bonté de nous I longtemps auprès de la ville. Peu
abondamment des vivres ¡de temps après midi nous jetrâmcs
Nous noi^s propofions l'ancre au deffous du Fort de Smyrne.
Uu peu devant que nous y arrivaflions
le Capitaine Grafilie y
etoit arrivé, il venoit de Marfeille
d'executer notie dcffein, & comme: & il y avoit longtemps qu'on l'attcnil
continua encore le lendemain, on doit, & même la Nation Françoife
vit tant d'eau à Smyrne qu'on au
l'oit pu fort aifément aller dans la
ville en bateau , car dans la rue
le croioit perdu, parce que le bruit
avoit couru que Ion vaiiîêau avoit
été pris par les Corfaires de Tripodcs
Francs elle étoit haut de qua- ' li & mené à Rhode. Nous chartre
pieds, ce qui n'ctoit point ar-igeâmes quelques barques de lefl,
rivé de memoire d'homme. L'on-1 & le matni nous nous remimes à la
zieme au matin il fit beau temps, : voile comme la Lune fe levoit. Le
ce qui nous obligea de partir liivcnt étoit alors prefque Nord, &
promptement que nous n'eûmes , n'étoit pas trop ferme ; mais quand
pas le temps de prendre congé de ¡nous fûmes venus environ le Coin
perfonne que de ceux de la mai-!^« chevaux, ou \cs I/les Angloifes
ion , parce que le vaiflêau iûr le-¡nous vent fi impétueux
quel nous devions nous embarquer ; qu'il falloit que nous cuflions touetoit
tout prêt de mettre à la voi- jours la corde du voile à la main,
le. Apres donc y être entrez fort ; Mais enfuite , il nous arriva un
à la hâte, nous fortimcs du Port 1 calme li fubit & fi grand, que nous
de Smyrne le même jour onzième
février <à dix heures du matin , a-
DipartclcP''^^ que j'eus demeuré à Smyrne
Smyrne. phi.'î de fept mois , avec grande
fatiffailrion. Notre vaiflèau etoit
un Londre qui eft une eljieee de
Navire de Turquie, monté dedeux
pieces de Canon & de quatorze
allames tantôt de çà, tantôt de là,
& que nous ne fimes que tourner
fans avancer, de forte que nous ne
pûmes doubler le Cap de Calberno
avant le nuit, parce que le vent venoit
du Sud. Ainfi nous rcfoliimes
d'entrer à Fotia ou Fora Nova
peu de vent tju'il faifoit , nous y
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