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C H A P I T R E LXX.
Dé^and'Jle^. Jrrbéeà JlexandretteouScandcmie. Son
Oír mal fdin. Embarquement de l'Auteur & fon arrivée à iljle ae
Chypre. •
A;Pr ès que j'eus demeur é envi -
. onze mois à Alep , je formai
le defTein d'aller à Chypre,
& comme j'apris qu'un vaillêau
François y devoir aller d'Alexandrette
, je foiigear à me fervir de cette
occafion , & je me mis en erat
de partir le lixiéme d'Avril 1683.
Mais aprenant en même temps qu'il
y avoir une caravane qui le lendemain
fe devoir mettre en chemin
pour le même voiage, je remis à
ce temps là à partir , parce que
ce chemin eft fort dangereux à cauie
des voleurs Arabes. Sans cela
j e ferois parti avec un Marchand
Arménien qui y alloit accompagné
de trois Arabes.
Apres donc que j'eus fait mes
civilitez à M'. Bobbert , qui m'avoit
fi longtemps reeeu dans fa maif
on d'une maniéré fi obligeante , &
que je lui eus témoigné le regret
que j'avois de ne pouvoir reconnoitre
aflez dignement l'honneur qu'il
m'avoit fait , je pris congé de lui
allez loin d'Alep , où il avoit eu
la civilité de me venir conduire.
Il étoit environ fix heures après
midi , lors que nous fortîmes de la
ville , & nous arrivâmes le foir à
Anjaar. Anjaar où nous paflâmes la nuit.
L e lendemain 8. Avril à la pointe
du jour nous nous mimes en chemin
par la pluye , comme nous avions
fait en partant d'Alep. Nous paffames
par quelques villages ruinez,
& par un vieux bâtiment abbattu,
cil la pluye nous quitta. Apresmi-
Siagmant. vuime s au Bourg Siagmant
aux environs duquel on rencontre
encore quelques vieilles ruinesnous
nous y repoiàmes & nous prîmes
quelque rafraichiflèment, aiant
toujours niiirché depuis Alep pir
fort mauvais chemin & fort
pierreux. Enfuite nous vinmes à
un endroit oùilyavoitdel'eau, auprès
de laquelle un Aga s'étoit arr
ê t é , &avoit fait dreiTer fesTentes;
Il avoit avec lui environ quatre cens
perfonnes. Comme le Soleil fe couchoit
nous arrivâmes à Marvane,
Marvane.
qi^i eft un village fort pauvre, & qui
ne confifte qu'en quelques petites
maifons qui ne font que de rofeau,
& comme en y arrivant nous fumes
furpris par une grofle pluye , nous
nous logeâmes le mieux que nous
pûmes dans ces chaumines, parce
que nous n'avions point de Tentes
avec nous. Je me fourrai donc,
pour ainfi dire , dans l'une de ces
huttes , au milieu de laquelle je
trouvai du feu , mais qui caufoic
une telle fumée que j'en penfai perdre
la vue , parce qu'il n'y avoic
point d'autre ouverture pour la taire
fortir , que la porte même par
où l'on entroit. Mais autant de fois
que j'en fortois pour euiter l'incommodité
de la fumée , autant de
fois la pluye m'obhgeoit elle d' y rentrer.
On voyoit fur le feu un grand
chaudron avec de la viande qui
cuifoit , & par deflfous il y avoit
du pain qui cuifoit aufli fous la cendre.
Nonobftant ces incommodit
e z je fus obligé d'y paiTer la nuit.
IJC lendemain dès qu'il fit jour
nous remontâmes à cheval , &
nous marchâmes prefque toujours
dans l'eau , à caufc de la pluye
qui étoit tombée , ce chemin là
étant une efpece de plaine entre
des montagnes.
O n y rencontre plufieurs_villages.
Se un grand pont par defllis lequel
on palfe l'eau. Il y a encore un
1 autre Pont auprès duquel j'allai me
A a a 2 te-