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 lo  VOYAGE  au  L E V A N T  
 ,  été  mis  pendant  que  le  fiége  étoitj  
 vacant.  On  obferve  à  chaque  nou-'  
 velle  éledion  de  faire  cette  grace  
 aux  prifonniers,  &  c'eft  pour  cela, ;  
 que  comme  nous  l'avons  déjà  remarqué, 
   ceux  qui  ne  doivent  point  
 avoir  part  à  cette  gracc  font  de  bon-1  
 ne  heure  transferez,  pour plus gran-!  
 de  feureté,  au  Château  Saint Ange. :  
 Cela  caufe  en  même  temps  bien  de i  
 la  joye  &  bien  du  remuement  dans  
 la  vil  e  de  Rome  ;  car  les  Ceremonies  
 que  fait  tout  le  Clergé  à  l'eleftion  
 d'un  nouveau  Pape  femblent  
 repreiènter  une  efpece  de  Jubilé.  
 Entre  les  chofes  remarquables  qui  
 j'ai  vues  dans  cette  grande ville,  il  
 Prefclieu-  ne  fout  pas  que  j'oublie  celle  ci.  
 l's  Extra- Auprès  du  Palais  Farnefe  dans  la  
 ordinaire,  jyg  demeuroit  un  certain  Cordonnier  
 dont  la  femme  fe  montroit  
 tous  les  jours  à  la  fenêtre  d'une  
 chambre  haute  ,  &  de  là  prêchoit  
 quelque  fois  deux  ou  trois  fois  le  
 jour,  par  où  elle  attiroit  continuellement  
 beaucoup  de  monde  ,  les  
 uns  s'y  arrêtant  par  cUrioilté,  &  les  
 autres  par  devotion.  Il  la  pouvois  
 aiîèz  bien  entendre  de  ma  chambre,  
 demeurant  lors  dans  ce  quartier  là  a  
 l'endroit  où  l'on  paiTe  en  Longarde.  
 L'Inquifition  ,  à  qui  cette maniéré  
 d'agir  déplut  aiTez  longtemps  ,  fit  
 prendre  cette  Prêcheufe,  mais  peu  
 de  temps  après  elle  la  fit  relâcher.  
 Je  n'ai  point  oui  dire  fi  ce  fut à condition  
 qu'elle  ne  prêcheroit  plus,  
 mais  quoi  qu'il  en  foit, elle  recommença  
 a  prêcher  comme  auparavant.  
 Comme  j'ai  fouvent  vû  quantité  de  
 monde  s'arrêter  devant  fa  maifon,  
 &  même  des  Meffieurs  &  des  Da-i  
 mes  qui  s'y  arreftoient  avec  leurs  
 CaroiTes  pour  l'entendre  prêcher,  
 je  m'informai  quelle  forte de  femme  
 c'etoit  ,  &  l'on  me  dit  qu'elle  ne  
 pouvait  pas  lire  un  jcul  mot,  mais  
 qu'elle  fe  faifoit  continuellement  lire  
 par  un  autre.  Comme  je  ne  fçavois  
 pas  alors  l'Italien,  parce  qu'il  
 n'y  avoit  que  peu  de  mois  que  jétois  
 à  Rome  ,  il  falloir  que  je  me  
 fiflê  inftruire  par  les  autres  des  chofes  
 qu'elle  traittoit,  &  tous  m'alïïiroient  
 que  tout  ce  qu'elle  difoit  en  
 fes  predications  etoit  aíTez  bon.  
 Je  n'entreprendrai  pas  ici  de  rien  
 dire  de  la  Ville  de  Rome  ,  parce  
 que  pluficurs  Auteurs  aiant  donné  H^Q,,,,..  
 d'exailes  defcriptions  de  cette  admirable  
 ville,  ce  lëroit  fe  donner de la  
 peine  inutilement,  &  ne  dire  que  ce  
 que  d'autres  ont  déjà  dit.  Au  lieu  
 de  cela  je  dirai  que  pendant  le  féjour  
 que  j'y  fis  ,  j'allai  de  côté  &  
 d'autre  pour  en  vifiter  les  environs,  
 comme  entre  autres le Château  Gandolfe  
 &  la Lac d'Albano,qui a en viron  
 quatre  lieues  de  tour  ,  &  qui  eft  
 dans  un  fort  beau  païs  de  montagnes  
 ,  d'où  l'on  va  par  un  bois  fort  
 agréable  à  la  ville  d'Albano  Evêché,  
 renommé  à  caufe  de  fes  vins  excellens. 
   Je  m'arrêtai  auffi  quelques  
 jours  à  Tivoli  &  à  Frafcati,  où  les  
 yeux  iè  peuvent  divertir  par  les  admirables  
 vues  tant  des  Païfages  que  
 des  Cafcades,  aufll  bien  que  de  
 plufieurs  belles  Fontaines,  principalement  
 à  Frafcati  ,  où  l'on  voit  outre  
 cela  les  plus  belles  Païfanes  qui  
 foicnt  dans  tout  le  domaine  dii  
 Pape.  
 en  EGY P T  E,  SYRIE,  &c.  ii  
 C h a p i t r e  ÎÎL  
 Voyage  de  %ome  i  Sl\(aples,  &-de (à  a  T o u ^ l .  Qrotte  
 de  Virgile.  Grotte  delle  Cani  ,  &  autres  AntiqUitez  qui fe  trouvent  
 dans  ces  quartiers  là.  Retour  à  Rome  &c.  
 Diiart  A  j'®"®  demeuré  à  Ro-  deux  qui  chatouille  agréablement  la  
 me  près  de  deux  a de  Rome.  ns  &  demi,  '  -  _  -  -  -  .  
 CHAPI- 
 ,CapouS.  
 je  pris  la  réiolution  de  m'en  aller  à  
 Naples,  &  lors  que  j'en  ferois revenu  
 ,  de  me  rendre  auffi à  J jgourne.  
 Pour  cet  etïet  m'etant  mis  en  chemin  
 en  bonne  Compagnie,  le  24.  
 d'Avril  1677.  J'arrivai  le  28.  à  Capouë  
 ,  d'où  j'allai  à  Sainte Marie  de  
 Capouë,  qui  en  eft  à  une  bonne  
 lieuë  ,  mon  deflein  étoit  d'y  
 aller  voir  quelques  antiquitez  ;  
 J'y  en  trouvai  en  effet,  &  cela  me  
 fit  réfoudre  de  m'y  arrêter  quelques  
 jours  ,  lor.'î  que  je  icvicudrois  de  
 Naples.  
 Capouë  eft  aujourd'hui  une  place  
 toute  ouverte.  Elle  fut  autre  fois  
 une  ville  fort  celebre.  Le  Poete  
 Horace  en  parle  fouvent,  &  ce  fut  
 là  qu'Hannibal  aïant  paiTé  l'hyvet  
 avec  toute  fon  armée,  but  dans  des  
 taiTesd'or,  des  exccllens  vins de Falerne. 
   La  Riviere  de  Volturno  fi  
 celebre  dans  les  écrits  des  Anciens  
 paiTe  tout  auprès.  Il y a  auffi dans  ce  
 lieu  là  plufieurs  anciens  bâtimens  
 1 palfe  premièrement  par  la Grotte  
 : Virgile  qui  n'eft  pas  loin  de  cet- y^jg^'  Grotte  de  
 qui  meritent  bien  d'etre  vus.  
 iïetfc.  Aureiîe  en  paiTant  par  Averfe  je  
 remarquai  qu'il  s'y  fait  une  grande  
 quantité  de  fromages  de  Buffles.  
 J'y  trouvai  auffi un  bel  Hôpital.  
 Le  25).  je  vins  à  Naples  Ville  fi  
 agreable  qu'il  faut  avouer  que  c'eft  
 iNapes.  ^^^^  raifon  que  les  Italiens  l'appellent  
 vulgairement  le Jardin  de  Rome, 
   puis  qu'elle  a  d'un  côté  lamer,  
 &  de  l'autre  les  plus  belles  &  les  
 plus fertiles campagnes que l'on puiffe  
 voir  :  Cela  eft  caufe  qu'on  y  trouve  
 tout  en  abondance,  &  particulièrement  
 des  vins  très  délicats  ,  entre  
 lefquels  excelle  celui  qu'on  appelle  
 la  larme  de  Naples,  nom  qu'il  porte  
 à  jufte  titre,  puifquel'excès  qu'on  
 en  fait,  à  caufe  de  fon 1 gouft  delilangue  
 &  le  Palais  ,  fait  effeitivement  
 couler  les  larmes  des  yeux  à  
 plufieurs  de  ceux  qui  en  boivent.  Voyage  
 Je  dois  dire  ici  comme  j'ai  déjà de Naples  
 fait  en  parlant  de  Rome,  que  comme  
 j e  n'ai  rien  dit  des  raretez  quife  
 remarquent  à  Rome,  j'ai  les  mêmes  
 raifons  de  ne  pas  donner  ici  la  defcription  
 de  Naples.  Apres  donc  y  
 avoir  vifité  ce  qu'il  y  a  deplusconfiderable  
 ,  je  me  rendis  à  Pouzzol,  
 petite  ville  qui  en  eft  à  peu  près  à  
 huit  milles.  En  faifant  ce  chemin  
 on  1  
 de  _  _  
 te  ville.  Cette  Grotte  a  environ  un  
 quart  de  lieuë  de  long,  &  au milieu  
 elle  eft  tout  à  fait  obfcure  à  caufe  
 de  quoi  auffi  ceux  qui  y  paiTent font  
 obligez  de  crier  de  temps  en  temps  
 &  de  demander  à  quel  cofté  ils  fe  
 rangeront,  afin  de  fe pou voir mieux  
 eviter  les  uns  les  autres.  
 En  fuite  on  vient  le  long  du  chemin  
 à  une  petite  grotte  qu'on  ap-  cmpoifonpelle  
 Grotte  delle Cani.  L'air  en eft  née.  
 tout  empoifonné  ,  jufques  là,  que  
 quand  on  y  met  un  chien  ,  il  meurt  
 auffi  tôt.  J'eus  lacuriofitéd'enallec  
 faire  l'epreuve  fur  deux chiens difterens  
 ,  &  je  trouvai  que  quand  l'un  
 de  ces  animaux  fe  tenoit  fur  les  
 pieds,  le  venin  de  la  grotte  ne  lui  
 faifoit  point  de  mal,  mais  que  
 quand  on  le  jettoit  à  terre  avec  violence  
 ,  il  perdoit  en  peu  de  temps  
 toutes  fes  forces  après  un  grand  
 tremblement  &  de  grands  efforts,  
 &  il  feroit  aflèurément  mort  un moment  
 après,  fi  l'on  ne  l'euft  retiré  à  
 temps,  &  fi  l'on  ne  l'euft  jettédans  
 l'eau  d'un  lac  qui  eft  tout  auprès,  
 il  s'en  trouva  mieux  auffi  tôt,  mais  
 en  forte  pourtant  que  la  tête  lui  
 tournoit  encore  ,  Se  qu'il  ¡marchoit  
 B  î  com- 
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