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 306  V  0  Y A G  IL  au  L  E V  A  N  Ï  
 car  Brcufa  fignifie  une  amande.  ; qucs  fruits  de  ccdre  qui  écoient  .iu  
 Ce  Bourg  cil  de  la Jurifdiflion  du  | haut  des  arbres  &  je  rompis  aullî  
 Patriarche.  Enfuite  on  vient  au  
 Hafiel.  Bourg  H a j î e l ,  qui  appartient  aux  
 Arabes.  De  là  on  vient  à  Ipfarey,  
 IlHatcy.  gft  [g  dernier  bourg  &  le  plus  
 proche  de  la  montagne  du  Liban.  
 Depuis  cet  endroit  nous  fûmes  
 obligez  de  prendre  des  gens  qui  
 fceullènt  lesj  chemins  au  travers  
 des  neiges  ,  car  fans  un  tel  fecours  
 il  feroit  impoilible  d'aller  où  
 l'on  pretend.  Environ  une  heure  
 &  demie  après  ,  étant  arrivez  aux  
 Ccdres  nous  trouvâmes  que  tout  
 étoit  couvert  de  neiges  ,  ce  qui  
 nous  obligea  de  laiflcr  nos  chevaux  
 ,  &  de  nous  mettre  à  pied,  
 jufqu'a  ce  qu'enfin  après  bien  de  
 la  peine  nous  arrivâmes  aux  Cedres. 
   La  neige  y  efl  au  matin  avant  
 que  le  Soleil  foit  monté,  
 prcfque  aufli  dure  que  de  la  glace  
 ,  &  elle  rend  le  chemin  très  
 rude  &;  incommode.  Nous  allâmes  
 nous  repofer  un  peu  ,  &  
 manger  un  morceau  pour  reprendre  
 des  forces  ,  mais  le  froid  extrême  
 qu'il  faifoit  ne  nous  permit  
 pas  de  nous  arrêter  longtemps,  &  
 à  peine  nous  donna-t-il  le  loifir  de  
 manger  à  notre  fuffifance  ,  outre  
 que  nous  fûmes  encore  obligez  de  
 retourner  au  plus  vjte  fur  nos  pas  
 afin  de  repaflèr  les  neiges  avant  
 que  la  chaleur  du  foleil  les  eût  fondues, 
   parce  que  quand  elles  viennent  
 à  fondre  on  court  de  grands  
 rifques  ,  &  il  eft  fouvent  arrivé  
 que  la  trop  grande  lenteur  des  curieux  
 leur  a  coûté  la  vie,  fenoyant  
 dans  l'eau  des  neiges  qui  font  de  
 tous  cotez  comme  autant  de  montagnes. 
   Comme  donc  j'envifageois  
 ces  dangers  ,  je  rac  hâtai  le  plus  
 qu'il  me  fut  poffible  de  deflincr  ce  
 lieu  où  je  me  trouvois.  On  n'y  
 voit  rien  autre  chofe  tant  que  la  
 vue  le  peut  étendre  ,  que  le  Ciel  
 &  des  montagnes  de  neige.  Elle  
 y  eft  en  fi  grande  abondance  qu'- 
 il  y  a  plufîeurs  cedres  qui  en  font  
 prefquc  tout  couucrts  1  &  ils  y  
 fcroient  même  tous  enfevelis  fi  le  
 vent  ne  l'eropêchoit.  Je  cueillis  
 lors  que  j'etois  fur  la  neige  quelquelques  
 petites  branches  alin  d'en  
 conferver  les  fueilles  ,  mais  elles  
 tombèrent  peu  de  temps  après  &  
 fe  perdirent  tout  à  fait  ;  Elles  relfemblent  
 à  celles  du  Romarin.  
 Quoique  ces  Arbres  foient  prcfque  
 tout  cachez  dans  la  neige,  ils  
 ne  lailTent  pas  d'être  toujours  verds,  
 les  petites  fueilles  qui  font  aux  
 branches  montent  en  haut  &  le  
 fruit  pend  en  bas  >  étant  en  cela  
 oppoiez  l'un  à  l'autre.  Ils  reiTemblent  
 fort  bien  à  une  pomme  de  
 Pin.  Les  deux  deflèins  que  
 j'en  donne  font  N°,  i f f .  &  1^6.  
 Les  jours  ,  ou  ,  la  lumiere  qu'on  
 voit  iiir  les  arbres,  reprefentent  la  
 neige  qui  eil  fur  les  branches.  Je  
 ne  me  contentai  pas d'en  prendre  du  
 fruit  ,  mais  j'abbatis  aufli  un  jeune  
 arbre  comme  il  y  en  a  plulieurs  là  
 afin  d'en  emporter  du  bois.  On  
 croit  que  c'eft  de  ces  arbres  qu'on  
 prit  le  bois  dont  fut  bâti  le  TTenjple  
 de  Salomon  i.  Rois  y.  6.  
 C'eft  une  chofe  qui  fe  dit  ordinaircmeot  
 ,  &  qui  eft  comme  paffée  
 en  proverbe,  qu'on  ne  fçauroit  
 compter  les  Cedres  du  Liban  j  
 c'eft  à  dire  que  quand  après  les  
 avoir  comptez  une  fois  &  en  avoir  
 trouvé  un  certain  nombre,  l'on  
 veut  les  compter  une  feconde  fois,  
 on  ne  trouve  plus  le  même  nombre  
 qu'on  avoit  trouvé  la  premiere  
 ,  &  je  l'ai  en  effet  ainfi  éprouvé  
 moi-même.  Car  en  comptant  
 une  fois  les  plus  remarquables,  
 j'en  trouvai  trente  cinq  la  premiere  
 fois  ,  &  trente  Cx  la  feconde.  
 Mais  je  n'attribue  cette  difference  
 qu'a  la  hâte  avec  laquelle  je  les  
 comptai  ,  &  peut-être  aufîi  à  ce  
 qu'ils  font  un  peu  mêlez  &  confus  
 les  uns  parmi  les  autres  ,  ce  
 qui  fait  qu'il  cft  fort  aifé  de  s'y  
 méprendre.  Hors  cela  je  ne  voi  
 pas  qu'il  foit  plus  difficile  de  les  
 compter  que  les  autres  arbres.  
 J'eus  aufli  la  curiofité  de  mefurer  
 la  groflèur  des  deux  plus  remarquables, 
   &  je  trouvai  que  l'unâvoit  
 cinquante  fept  paumes  ,  &  l'autre  
 quarante  fept.  Sous  l'un  de  
 ces