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que j'avoue que j'apcrccus un jour un
changement à cet égard quifutalTez
remarquable. Il arriva qu'étant re
venu un peu tard au logis, je ne
trouvai point dans ma chambre un
d e mes Caméléons, & c'etoit mêle
plus beau de tous. Comme je
ne voulois pas me coucher fans
l'avoir trouvé nous nous
mîmes deux à le chercher pendant
plus d'une demie heure, quand enfin
nous le trouvâmes fur une robe
de chambre , ou vefte de toile
blanche, qui comme elle etoit
fort longue, pendoit jufqu a terre;
le Caméléon etoit monté tout du
long , & il paroiiToit auiïï blanc
que la toile même, tellement qu'-
on avoit de la peine à le difcerner
d'avec elle. Ce fut là le changement
le plus furprenant que j'euffe
encore vù, j'entens par rapport
à prendre les couleurs des chofes
fur quoi on les met.
Je n'en ai jamais pu conferver
en vie plus long temps que cinq
m o i s , & la plus part me moururent
dans l'efpace de quatre.
J'avois de la curiofité de fçavoir
en quoi confiftoient leurs entrailles
, c'eit ce qui fit que j'en ouvris un,
& je trouvai trente un oeufs dedans,
de la groflèur de ceux des petits
oifeaux; ils etoient tous attachez les
On croit qu'il y a au bout de cette
langue une humeur vifqucuiè à la
quelle la mouche demeure attachée,
mais ma penfée cil: qu'il l'attrappc
de la pointe de fa langue de la quelle
il l'enveloppe , & la porte ainfi
dans fa gueule. Ils ont encore une
autre maniere de prendre les mouches,
comme je lai oui dire à d'autres
, mais fans que je l'aie experiment
é ; c'eíl de fe tenir comme s'ils dormoient,
& d'etcndrc la langue tout
le long de leur corps jufqu'a la
queue. Les mouches, qui comme
chacun fçait, aiment tout ce qui a
quelque humidité, viennent fe pofer
deiTus ; cependant le Caméléon
démeure toujours immobile ; mais
quand il fent qu'il y en a un affez
grand nombre , il retire fa
langue d'une telle vîteife qu'il n'en
échappé pas une.
Quand ces petits animaux veulent
defcendre de quelque endroit
haut dans un plus bas ils avancent
avec une grande circónfpeftion premièrement
un des pieds de devant
vers le bas, & enfuite l'autre, ce
qu'ils font après des pieds de derrière
, fe prenant cependant à ce
qu'ils peuvent avec leur queue, dont
ils l'en tourent afin de marcher
plus ferme, ils la laiflènt ainfi couler
jufqu'a ce qu'ils foient au bout.
uns auprès des autres à un efpecede|& quand ils ne peuvent encore après
fil; mais je n'y vis point d'entrail- 'cela atteindre à terre , ils fe laiiTenc
les ni rien qui y reflèmblât. Ce fut i tomber tout d'un coup. Leur marie
plus beau de mes Caméléons où cher efl: très lent , & leur grauj'en
trouvai ce nombre, dans les'deur telle qu'elle cil: reprefentée
autres je n'en trouvai gueres plus de N°. 5-4. où l'on peut voir auili la
vingt. langue , & les petits oeufs , avec
La langue efl: ce qu'ils ont de quelques changcmens que j'y ai repl'us
remarquable, car elle eft auill marquez , tout cela a été deffiné
ongue que tout leur corps. C'efl-avec d'après nature fur l'un de mes Caelle
qu'ils prennent les mouches
que les Naturaliftes ont auflî remarqué
, voici comme cela fe fait. Le
Caméléon fe tient fans fe remuer,
& lors qu'il vient une mouche il tire
fa langue extrêmement vifte,
prend la mouche de la pointe, &
î'avalle, fa gueule qu'il a fort grande,
& qu'il tient toute ouverte, lui
eft fort propre pour cela. On en
peut juger par la peinture que je don
meleons dont je donne aufli la figure,
& que je garde encore.
Il y en a qui prétendent que le
Caméléon a toujours la gueule ouverte
, mais je n'ai remarqué cela
que fort rarement, & prefque jamais,
finon lors que je le portois
dans un endroit où il pût prendre
l'air à fon aife. Alors il ouvroit
fa gueule le plus qu'il pouvoir. Se
il montroit par fcs divers mouvenc
ici d'un qui a la gueule ouverte, mens & par les changcmens continuels
e n E G Y P T E ,
Huels le plaifir qu'il y prenoit.
Les yeux de ce petit animal font
ronds , tout noirs & fort petits ;
& ce qu'il y a de plus remarquable
c'eit qu'ils en tournent un d'un
côté, & l'autre d'un autre, de forte
qu'ils peuvent en même temps regarder
en haut & en bas.
J e trouvai auili le moien d'avoir
Petitebi-i,ne petite bêce qui prend les foumangeles!''
® ^ mange ; elle etoit d'un
Souris, jaune tirant fur le gris , avec des
taches noires, comme on peut voir
N ' \ ) )•. au reflc groiTe comme une
belette. J'y prcnois d'autant plus
de plaifir, que cette petite bête efl:
fort rare. Je la gardai longtemps
en vie : mais comme tous les, animaux
font fujets à la mort, elle
me mourut auili.
V s k " ^ plufieurs fortes de
^ vers qui me firent envie. Ils croient
de très belle couleur & joliment
marquez , comme de vert & de
gris. La figure & la grandeur en
étoit telle qu'elle eft reprefentée
N". ,-6.
Je pourrois encore parler ici de
plufieurs autres fortes d'animaux
extraordinaires ; mais comme ils
font devenus communs par fre
qucns voiages des Hollandois dans
ce pais, je n'en dirai rien ici. Au
lieu de cela je ferai part au Lefteur
d'une rencontre aflcz extraordinaire
que nous eûmes, & qui efl: capable
de donner de l'admiration.
Rencon- Un jour que je me promcnois
trcfurprc-fur Ic bord de la Mer jonmemonÊ
f d a ï e ' " " u n jeune homme, qui encore
ijui"avoit qu'il ne fceût pas un mot de Holoublié
felandois, fe difoit pourtant de Holkngue
- - . . „
maternel lande , & vouloit pafler pour tel.
Il n'etoit arrivé que de ce jour là:
& il avoir été longtemps éfclave
chez les Turcs, enfuite de quoi il
avoit obtenu fa liberté, avec une
atteftation de fon Patron , de fcs
bons & fidcles ferviees. Il y avoit
alors quelques vaiflcaux Hollandois
qui étoient tout prêts de partir.
Il y arrétoit tellement fes yeux qu'il
étoit aifé de remarquer le grand
délit qu'il avoit de retourner dans
ft Patrié. Je l'abordai, & lui parlai
pour fçavoir ce qui en pouvoir
S Y R I E , 6¿:c: lá^
être. Je lui demandai s'il étoi^
Hollandois , il repondit qu'oui,
en langue Turque. La deifus je
lui dis qu'il parlât donc Hollandois
avec moi, il repondit dans la
même langue , qu'il ne pouvoir:
qu'a l'âge de neuf ans il étoit tombé
dans l'efclavage , nommant le
vaillcau dans lequel il étoit lors qu'-
il fut pris, & où il étoit garde de
la chambre du Capitaine, qu'aiant
été vendu il avoit été emmené bien
avant dans le pais, & que depuis
cela' il n'avoit jamais oui parler
Hollandois, defortc que cette langue
lui étoit devenue tout à fait
étrangère , jufques là qu'il ne pouvoir
y repondre un feul mot , mais
qu'il pouvoir pourtant tout entendre
&c. J'étois alors accompagné
d'un de mes compagnons de voyage
qui etoit venu avec moi de
Conftantinople, & qui parloit fort
bien la langue Turque , de forte
que nous lui parlâmes de divcrfes
chofes : mais quoique nous puffions
faire nous n'en pûmes jamais
tirer un mot de Hollandois. Cela
me fit foupçoniier qu'il fe vouloit
faire paiTcr pour Hollandois afin de
jouir de benefice du Convoi, &
d'etre appuié de la Nat ion , lors
que le cas y echerroit , & j'en dis
ma penfée aux autres. Lui qui
entendit ce que je voulois dire
demanda une plume & de l'encre
(car il avoit appris à ecrire dans fa
jeuneflc} afin de faire voir qu'il étoit
véritablement Hollandois , & il écrivit
en effet ce qu'il avoit à nous
dire fur ce fujct. Cela nous parut
fi ctrange, que je lui demandai s'il
vouloit venir avec moi chez le Confuí,
à qui je recitai ce qui nous etoit
arrivé. Celui-ci qui n'avoit pas
moins de curiofité que moi à cet e-
;ard, le fit venir chez lui, &appela
un de fes Janiflâires qui avoit été
efclave en Efpagne, auquel il donna
ordre de parler avec nôtre homme
, & de fçavoir de lui de quel
pais il pouvoir être. Le Janidàire ,
après avoir parlé à lui, dit qu'à en
juger par fon parler, on auroit raifon
de le prendre pour un Turc,
mais qu'on pouvoir bien pourtant
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