plaça gravement à ses côtés, sans s’inquiéter le moins
du monde dans quel sens elle était tournée. Mais sa véritable
boussole, à lui, étaient les étoiles ; certain d’ailleurs
de tomber sur 1 Archipel, dont les îles forment un
groupe etendu, il ne pouvait manquer d’en apercevoir
u n e , et dès lors, son oeil exercé valait les meilleurs
instruments. Le vent nous ayant favorisés pendant la
nuit, dès le matin nous aperçûmes les premières îles;
elles s élevaient à peine au-dessus de l’eau et ressemblaient
a des bancs de sable sur lesquels auraient poussé
des bouquets assez épais deces arbres marins dont nous
avons déjà parlé, et qui, vus de loin, leur donnaient un
certain air de fertilité. A midi nous serpentions dans
l’Archipel avec une brise fraîche du nord ; nous dépassâmes,
en la laissant sous le vent, l’île de Nora, qui
contient plusieurs villages, et où l’on trouve la meilleure
eau douce qui soit dans toute la mer Rouge, et
à cinq heures du soir nous jetâmes l’ancre dans la
partie nord de l’île d’Halac.
Cette baie offre un mouillage sûr et commode, pouvant
abriter toute une flotte. Les habitants y sont hospitaliers
et de moeurs douces; leur peau est noire, mais
ils ont les traits réguliers, et toute leur physionomie
respire l’intelligence et la franchise. Ce seraient les
meilleures gens du monde si le fanatisme musulman ne
gatait quelques-unes de leurs bonnes dispositions naturelles:
On compte dans l’île douze villages de quelque
importance. Les habitants y vivent de leur pêche;
ils ont quelques chèvres et quelques chameaux qui leur
fournissent du lait; les bâtiments de l’Inde leur ap—
portent du riz, du bois de construction pour leurs
barques, et tous les articles de vêtement. Ils donnent
en retour des perles et de l’écaille : ce dernier produit
est assez abondant, mais le premier paraît être d’une
médiocre importance.
L’île d’Halac a été soulevée à diverses époques. Les
montagnes culminantes en sont de formation volcanique,
mais les vallées et les plaines sont presque entièrement
dues au travail madréporique. Aussi la végétation
y est presque nulle. Néanmoins le petit nombre
d’espèces qu’on y rencontre ont un cachet particulier
et sont généralement inconnues ; notre exploration botanique
a été sur ce point des plus curieuses ( voir 17-
tinéraire). Je partis le lendemain ma tin, 13 mai, pour
Messoah, laissant mes compagnons achever l’examen
scientifique de l’île.