villes limitrophes de la plaine où on le récolte. Il y
avait quatre heures que nous marchions dans un pays
qui paraissait inhabité.
En entrant dans l’Ouomberta, nous commençâmes
à rencontrer quelques chaumières. Nous passâmes de
là dans la province de Dessa, et nous espérions le soir
arriver de bonne heure à Antalo, car nous apercevions
les montagnes qui dominent cette ville; aussi pressions-
nous le pas à travers de grandes plaines qui ne finissaient
jamais. Cependant la nuit arriva avant que nous
eussions rencontré une seule habitation convenable.
Déjà nous entendions le cri des hyènes. À chaque instant
notre guide se flattait d’arriver au but, et de détour en
détour, nous finîmes par barboter dans un marais, ne
distinguant rien à cinq pas devant nous. De temps à
autre nous étions obligés de héler les conducteurs des
mules de charge pour qu’ils ne s’égarassent pas.
Malgré le ton d’assurance de notre guide, je commençais
à croire qu’il nous conduisait à peu près au
hasard. Cependant nos pieds frappèrent un terrain plus
ferme, un sentier se présenta à notre vue : nous
l’enfilâmes comme notre seule voie de salut. Deux ou
trois fois nous en perdîmes la trace, soit en traversant
des ruisseaux, soit en escaladant quelques roches,
opération dont ma mule s’acquittait avec un talent qui
lui valait mille actions de grâces de ma part. Enfin nous
apercevons une lumière, et bientôt nous circulons au
milieu d’un labyrinthe de maisons. Notre guide se met
à crier à tue-tête et à cogner à une porte jusqu’à ce
qu’on la lui ouvre; mais auparavant on nous demande
si nous sommes des bandits pour venir à pareille
heure de la nuit chercher un gîte. Cette apostrophe
ne plut pas à notre guide, et il se prit à injurier
le choum : car c’était lui, et nous étions au village
d’Elkèle. La discussion s’échauffant, je donnai l’ordre
de dresser ma tente ; mais sans doute qu’à ma voix,
mon allu re , ou la suite dont j’étais accompagné,
le choum crut reconnaître en ma personne un membre
de la classe des honnêtes gens, car incontinent il
commanda qu’on me fournît une maison, un feu et un
souper.
Je quittai Elkèle à la pointe du jour, et me dirigeai
vers Antalo, où je comptais trouver Balgada Aréa;
mais je rencontrai dans la plaine d’Afgole plusieurs de
ses cavaliers qui se rendaient en toute hâte au camp
de leur maître, afin, me dirent-ils, de faire partie de
l’expédition qu’il dirigeait en personne contre un chef
révolté. Je m’arrêtai alors au village d’Afgole, et j ’envoyai
mon chasseur et mon guide au camp d’Aréa,
pour lui faire demander une entrëvue. J’étais d’ailleurs
d’autant plus content de faire une halte que j ’avais
laissé mes bagages en arrière. Vers les trois heures,
ne les voyant pas arriver, je supposai que le domestique
à qui j ’en avais donné la direction, était maladroitement
passé outre pour se rendre en ligne directe
à Antalo , e t, sans attendre la réponse d’Aréa, je
partis en toute hâte, et j’y arrivai au bout d’une
heure. J’eus à traverser plusieurs rues assez longues
avant d’arriver à l’église de Ouelda Guiorguis, que
l’on m’avait dit être dans le voisinage de la de