seillèrent d’aller demander justice à Ebrill. Mais ce
dernier dans sa crainte, mit sur-le-champ à la voile,
sans vouloir ni les attendre, ni les entendre.
Dès trois heures, nous fîmes nos adieux à l’évêque
et reprîmes la route de nos corvettes. En approchant
de la Zelee, la houle vint à chaque instant déferler
contre notre embarcation et nous mouiller jusqu’aux
os. Malgré mon envie et la promesse que j’avais faite
la veille, trempé comme je l’étais, je ne pus aller faire
ma visite à Mapou-teoa, et je me hâtai de retourner
me sécher sur Y Astrolabe.
MM. Dumoulin et Hombron ont gravi à la cime
du mont Duff, mais non sans quelques difficultés. A
50 mètres du sommet ils avaient trouvé les ruines
de la demeure où était confiné, dans son enfance,
l’héritier présomptif de la couronne, d’après les coutumes
en vigueur. Au-delà, ils avaient été obligés
de faire le reste du chemin à califourchon sur l’arête
de la montagne, tant elle était devenue étroite
et même aiguë.
MM. Demas, Montravel et Duroch avaient eu du
soleil pour leurs observations*.
Le temps étant assez beau et la brise faible de la
partie du S. E ., je m’embarquai à dix heures dans
ma baleinière avec M. Le Breton et les cadeaux que
je destinais à Mapou-teoa. Au moment où je passai le
long de la Zélée, M. Jacquinot se joignit à moi avec
quelques-uns de ses officiers.
Aussitôt que nous eûmes contourné la pointe du
S. E. où les missionnaires ont établi le cimetière actuel,
nous vîmes se déployer la jolie vallée où se trouve
la résidence royale. Après quelques retards causés par
les pâtés de corail qui embarrassent la route, nous allâmes
débarquer à un môle construit en madrépores.
Le roi Mapou-teoa, son oncle l’ex-grand-prêtre et
les deux missionnaires, MM. Cyprien, Liouzou et
Guillemard , nous attendaient au bord du quai;
M. Cyprien, déjà au courant de la langue, me servit
d’interprète. Plusieurs naturels les entouraient. On
nous reçut à la sortie de nos canots M. Jacquinot et
moi, et l’on nous conduisit en cérémonie devant la
case royale, distante de 200 pas environ.
Je remarquai que de ce côté l’accès du village était
défendu par des palissades et qu’on n’y pouvait pénétrer
que par des défilés entre des troncs d’arbres
très-resserrés, qui ne permettaient qu’à un seul
homme de passer à la fois. C’était sans doute un
reste des anciens moyens de défense des sauvages
quand ils se trouvaient si souvent en guerre entre
eux ou avec leurs voisins.
Arrivé devant la case du roi, on me fit asseoir
sur une espèce de fauteuil qu’on couvrit d’une grande
pièce blanche de tapa. M. Jacquinot prit place à côté
de moi, ainsi que Mapou-teoa et les deux missionnaires,
sur des banquettes en bois. Presque tout le
peuple de Manga-Reva, distribué par groupes, était
rangé sur un amphithéâtre naturel, formé par le
terrain à 40 ou 60 mètres de distance, tous accrou