tage, tandis que son frère Colipi le remplace à la
tête de sa tribu , où il jouit d’une grande influence.
On l’attendait incessamment à Conception où il fait
de fréquentes tournées.
Penoleo paraissait se recommander à ma générosité
; je lui fis dire par le consul français de se rendre
à bord des corvettes, où on le traiterait et où on lui
ferait des cadeaux. Puis je le quittai avec une illusion
de moins.
M. Bardel me conduisit ensuite sur un plateau qui
commande toute la ville, et où l’on avait commencé
des travaux de fortification qui sont tout-à-fait abandonnés.
Près de là se trouvait une espèce de village,
composé de méchantes huttes en branchages et en
boue, asile d’une foule de malheureux qui s’étaient
établis dans ces cabanes temporaires à la suite de la
destruction de la cité. On y respirait un tel air de misère
et de malpropreté, que le coeur était prêt à en
être soulevé, et je m’en échappai bien vite.
Je profitai du reste de la promenade pour adresser
quelques questions à M. Bardel, touchant l’état général
de la république, et voici ce qu’il me raconta.
Les revenus du pays se composaient de trois sortes
d’impôts : 1° les dîmes , 2° les douanes, 3° le monopole
du tabac. Les douanes étaient données à ferme
à certains individus qui avaient au moins la moitié du
bénéfice, et ne rendaient pas plus de 4-0 ou 80 pour
cent des produits. Les douanes avaient surtout pour
objet les droits établis sur le vin et les esprits venant de
l’étranger; droits exorbitants, puisqu’ils doublaient
presque la valeur des liquides consommés ; aussi ils
ne montaient pas à moins de 30 piastres par pièce de
vin, et à 60 par pièce d’eau-de-vie ou de rhum. Mais
attendu les fraudes et la contrebande, cet impôt ne
rendait pas ce qu’on eût dû en attendre. Enfin , par
un calcul encore plus mauvais, pour mieux s’en assurer
le monopole, le gouvernement avait interdit la
culture du tabac, bien que le sol eût été très-favorable
à cette production, et il préférait rester tributaire
de l’étranger, auquel il payait près de 200,000
piastres par an pour ce qui était nécessaire à la consommation,
sans parler de la contrebande qui avait
également lieu à ce sujet.
La monnaie légale du pays devait être la piastre de
cent centièmes. Mais l’entrepreneur ayant dû bénéficier
de 4 pour cent, il en résultait que la piastre ne
valait que 96 centièmes, ou un quartillo de moins que
la piastre à colonnes. La monnaie de cuivre avait été
frappée à Londres avec des canons envoyés pour cet
emploi. L’argent est rare dans le pays, attendu qu’il
s’écoule presque tout au dehors. L’or est proportionnellement
plus abondant, et passe pour être aussi pur
que celui qui est frappé en Espagne.
Il y a du numéraire dans le pays, quoique le taux
de l’argent y monte à 15 ou 18 pour cent par an, et il
n’y a aucune mesure restrictive contre l’usure. En
général, les propriétaires surveillent par eux-mêmes
l’exploitation de leurs domaines, et ils restent à la
campagne quatre ou cinq mois de l’année au temps
des récoltes. Les principaux objets d’exportation sont