à épaulettes énormes, à broderies et galons snr toutes les coutures
, plutôt semblables à des valets d’écurie qu’à des hommes
faits pour commander aux autres, portant un uniforme de tambour
majors, aussi ignorants dans l’art de la guerre et dans l’art
d’instruire des soldats que dans les sciences et les arts quels
qu’ils soient (c’est une simple réflexion que je fais ; car on peut
être très-bon officier dans sa partie et être très-ignorant). J’ai
été à même de voir leurs exercices , leurs revues ; l’effet en était
vraiment risible, sinon digne de pitié. Je n’ai vu qu’une masse
de malheureux non chaussés, non vêtus, à peine nourris, je
crois ; à leur tête ces misérables officiers , plus fiers de leurs brillants
uniformes qu’envieux d’apprendre leur profession, lâchant
d’imiter les manoeuvres et les exercices d’une manière si grotesque
et si bizarre , que je me suis cru un instant sur un théâtre où se
représentait une parodie parfaite de tous les usages des peuples
civilisés et constitués depuis des siècles. Si, dans tout cela, on
ne voyait que les efforts d’un peuple nouveau q u i, s’aidant des
lumières des nations plus éclairées, tâche de sortir de l’ignorance
et de la barbarie, au lieu de se moquer, on applaudirait à ces
efforts ; s’ils avaient la franchise d’avouer que, par la force des
choses, ils doivent être inférieurs aux autres , on serait loin de
les bafouer. Mais au contraire : « Voyez, ont-ils l’air de nous
dire , en faites-vous autant chez vous ; croyez-vous que nous ne
vous valons pas, vous qui avez plusieurs siècles d’existence? »
Et les malheureux , pleins de vanité, suent et soufflent sous leurs
habits brodés, à peu près comme les ânes sous le bât, à la seule
différence que ces habits font leurs délices, tandis que le bât
blesse le baudet, qui désirerait bien s’en délivrer le plus tôt
possible.
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Pendant que nous étions à Valparaiso, le gouvernement y
réunissait un corps d’armée et faisait de grands préparatifs pour
combattre le Pérou avec avantage. Les exercices militaires y
étaient fort suivis, et quand la nouvelle recrue se montrait un
peu récalcitrante, le bâton de l’officier républicain était là pour
lui rappeler que la patrie comptait sur lui. Je doute fort cependant
qu’on parvienne à faire une armée brillante de tous ces
pauvres diables, qui sont à peine vêtus, et qu’on a à peu près
enlevés et réunis de force. J’en ai vu un assez bon nombre qui
étaient parvenus à peine à l’âge de l’adolescence , et qui se
trouvaient sous les drapeaux par suite d’une presse très-peu
républicaine.
(M. Marescot.)
Note 48-, page 100.
La ville est bâtie sur le rivage, où elle se développe presque
toute en longueur. N’ayant guères que deux ou trois rues parallèles
à la mer, une seule règne dans toute l’étendue de la vïlle et
aboutit au quartier de Y Almendral, où se trouve une grande
église qui, avec ses deux tourelles , a une assez jolie apparence.
Mais ne pouvant étendre leur ville en largeur, à cause de la ceinture
de hauteurs qui les tient étroitement bloqués , les Chiliens
, en habiles tacticiens , ont tourné ces hauteurs et sont
venus établir leurs cases dans les ravines profondes et étroites
qui les séparent. C’est dans ces quebradas que sont entassées des
maisons échelonnées suivant la pente et la direction des ravins.
Tous ces groupes, accolés à là ville, servent de repaire aux caba-
retiers , aux logeurs et aux filles publiques, qui y pullulent. Les
matelots , contents peut-être de trouver, dans ces réduits, des