à nous faire comprendre qu’il possédait à la fois l’esprit, le talent,
le jugement et la connaissance de ces hommes, le dévouement
et toutes les qualités nécessaires au succès de la belle mission qu’il
dirigeait. Nous le trouvâmes occupé de nombreux travaux, car
outre ceux de son ministère spirituel, il était obligé de mettre un
peu la main, ne fût-ce que pour l’exemple, à ceux de la maçonnerie,
du charpentage et du jardinage. Pour lu i, la qualité
d’évêque signifiait à la lettre, travail, peine et application.
Erasme donnait aussi cette définition en guise de reproche aux
évéques de son temps.
. Le devant de sa maison était alors transformé en atelier où des
tailleurs de pierre et des scieurs de long préparaient des matériaux
pour construire une église. Ceux-ci étaient dirigés par un
ami de l’évéque, M. le baron deLatour de Fleury, qu’une vocation
religieuse avait engagé à s’associer à sa mission, et qui par
ses connaissances variées dans les arts mécaniques et l’heureuse
application qu’il en avait faite, lui avait déjà rendu de grands services.
Celui-ci était à la fois l’ingénieur, l’architecte et le maître
charpentier des îles, et complétait cette somme de services utiles,
en rendant encore celui de tenir une école où il apprenait aux enfants
indigènes à lire, à écrire, un peu de calcul et les éléments
de la géographie, connaissances indispensables pour ouvrir les
idées. Beaucoup d’enfants avaient déjà donné des preuves d’une
grande intelligence, et leur instituteur avait montré un honorable
dévouement en se consacrant, lui laïc, à unë mission aussi
pénible.
[M. Dubouzet.y
N o t e 9 6 , p a g e 1 7 8 .
J’allai présenter mes respects à Monseigneur qui habite une
jolie petite maison en pierre, dans laquelle tout le luxe est une
propreté irréprochable et la simplicité apostolique. Il me reçut
avec la meilleure grâce du monde et m’entretint longtemps des
travaux de là mission, de ses occupations, de ses craintes et de
ses espérances. Déjà je l’avais vu à boi'd de la corvette, où dans
le peu d’instants qu’il y resta, je n’avais pu juger que de son
physique. Il me sembla n’avoir pas plus de 35 ans, son teint
est celui d’un l’homme du midi de la France. Il a la physionomie
douce et spirituelle, et je pus me convaincre, pendant
ma visite, qu’elle n’était nullement trompeuse. Sa conversation
m’offrait tant d’intérêt, le temps s’écoula pour moi avec une
telle rapidité, que je me retirai tout honteux de l’avoir dérangé pen-
dantprès de deux heures de ses occupations. Il voulut cependant
m’accompagner, malgré la pluie, et me montra une jolie petite
égliseen pierre de taille qu’il construit près de son modeste évêché,
et quand je dis qu’il la construit, je ne me trompe pas, car lui-
même, aidé de M. de Latour, taille les pierres avec les naturels,
et travaille à la forge. Des naturels sciaient des planches d’un
côté et d’un autre, il me fit voir un atelier de menuiserie où des
jeunes gens apprenaient à manier le ciseau et le rabot. Un véritable
apôtre, tout en prêchant l’évangile, doit aussi travailler au
bonheur de l’humanité, et l’homme n’est heureux que par le
travail. Honneur à ces dignes apôtres, qui ont si bien compris
la beauté de leur mandat! M. d’Urville a donné à la
mission tous les outils en fer que nous possédions, et je suis
heureux de penser que l’expédition aura contribué à la
félicité de ce bon peuple qui mérite à si juste titre l’intérêt qu’il
inspire,
(M . de Monlravel.y
N o t e 9 7 , p a g e 1 7 8 .
Une nouvelle promenade à Manga-Reva m’a permis de faire
encore quelques observations sur le pays et sur ses habitants. Les
renseignements recueillis de la bouche des missionnaires m’ont