grande partie les frais de la réunion. Cependant sa
douceur et son urbanité naturelles faisaient place à
un vif sentiment de dépit et de ressentiment quand
il venait à parler de son voyage sur la Bonite, et
des désagréments qu’il avait essuyés sur ce navire.
Comme nous finissions de déjeûner, on m’annonça
M. de Lamotte-Duportail, son associé, et un troisième,
nommé, je crois, M. Hubert. M. Cazotte me les présenta
comme les personnes les plus honorables de la
classe des commerçants français établis à Valparaiso.
En conséquence, je les accueillis avec distinction et
les invitai à examiner les dessins de l’expédition que
j’avais déjà soumis aux regards de MM. Duhaut-
Cilly et Cazotte. En parcourant les porte-feuilles de
MM. Goupil et le Breton, qui avaient rendu d’une manière
si fidèle les rudes épreuves où nous nous étions
souvent trouvés , ils témoignèrent un sentiment
profond d’intérêt et d’admiration pour les travaux de
1 expedition. Surtout a la vue des cartes déjà dressées,
M. Duhaut-Cilly ne put cacher plus longtemps sa surprise,
et il donna un libre cours à ses éloges, en assurant
qu’il avait cru jusque-là que notre campagne
avait été complètement stérile en résuiats.
Alors, pour compléter l’oeuvre, je leur donnai la
communication du rapport détaillé que j’adressais au
ministre de la marine. Cette lecture fut écoutée dans
un religieux silence, et je crois qu’elle produisit sur
eux la plus vive impression. Ils m’adressèrent de sincères
remerciements de cette communication , et
M. Duhaut-Cilly particulièrement, qui semblait être
devenu tout autre, déclara qu’il ne pouvait comprendre
comment notre mission avait été ainsi calomniée,
et comment les faits avaient pu être aussi complètement
travestis.
Comme ces Messieurs se disposaient à retourner à
terre, je questionnai M. Lamotte-Duportail sur ce
qu’il y avait de plus intéressant à voir dans la ville, et
je témoignai le désir de parcourir les environs. M. Lamotte
Duportail s’offrit obligeamment de me servir de
guide, et s’engagea même à me procurer un cheval
doux et facile, avec lequel je pourrais en sa compagnie
visiter en peu de temps tous les quartiers de
Valparaiso. La tournure et la réputation de ce négociant
me convenaient beaucoup; j’acceptai son offre
et lui promis d’aller le rejoindre immédiatement chez
lui.C
omme je me préparais à descendre à terre, je reçus
la visite du gouverneur-général, en uniforme de
colonel, accompagné d’un aide-de-camp portant aussi
le costume de colonel. Quoique Italien de naissance,
celui-ci parlait couramment le français, ce qui rendit
notre entrevue moins stérile. Après les civilités d’usage,
je fis voir à M. Garrido les dessins de la campagne
qui semblèrent vivement l’intéresser. Il parut
non moins sensible à un salut de quinze coups de canon
que je lui fis rendre par la corvette Y Ariane.
J étais convenu de cette mesure avec le commandant
Duhaut-Cilly, afin d’éviter toute espèce de secousse à
mes chronomètres, au moment d’entreprendre une
longue traversée où la régularité de leur marche nous