la fortune sur les côtes de la Nouvelle-Zélande, parages
où il savait que d’autres avaient fait des pêches
très-abondantes. Mais les instructions de ses armateurs
ne lui laissaient point cette faculté, et il ne pouvait
pas s’éloigner des côtes du Chili.
Il m’apprit que la pêche des phoques était presque
entièrement abandonnée par les Américains du
nord, et qu’il n’y avait presque plus que quelques
aventuriers qui en tentaient encore les hasards sur les
côtes de la Patagonie ou dans les canaux de la Terre de
Feu. Il avait eu occasion de toucher aux îles Ma-
louines. La république Argentine paraissait avoir renoncé
à ses prétentions sur cet archipel ; un Anglais,
nommé Smith, s’y était établi avec une vingtaine d’aventuriers,
pour y cultiver quelques légumes qu’il
vendait aux baleiniers. Au moins ils étaient paisibles
et s’abstenaient des actes de piraterie qui avaient signalé
la courte administration du sieur Vernet, soi-
disant commandant au nom du gouvernement de
Buenos-Ayres.
Le jeune capitaine Gaspard tenait son navire avec
une propreté, et l’on pourrait dire avec une coquetterie
bien rare sur les bâtiments affectés à ce genre de
navigation, surtout quand ils sont commandés par
des Français. J’appris avec autant de surprise que de
satisfaction que cette pêche occupait déjà près de 70
navires, dont plus de 50 appartenaient au Havre.
Voilà qui promet à la marine militaire une belle pépinière
de marins.
Les trois autres navires baleiniers français déjà
mouillés à la baie Saint-Vincent, étaient le Rubens, le
Grétry'et la Louise.
Tous ces pêcheurs furent naturellement très-empressés
de m’interroger sur les baleines que j’avais pu
observer dans les régions antarctiques. Plusieurs de
nos officiers leur ayant raconté que ces mers étaient
couvertes de cétacés , l’espoir des capitaines s’était
allumé ; mais quand ils eurent appris de moi que tous
ces cétacés appartenaient presque entièrement aux
espèces hump-back et fin-back, ils en rabattirent considérablement.
Le hump-back est maigre et fournit
peu d’huile. Le fin-back plonge, casse les lignes et
quelquefois entraîne les pirogues. Toutefois les Américains
lui donnent quelquefois la chasse , mais seulement
sur les fonds d’une petite profondeur où il est
obligé de revenir bientôt à la surface.
Le capitaine Gaspard était à peine parti, que M. le
capitaine de vaisseau Scott vint me renouveler ses
offres de services. Je lui montrai avec détail les cartes
et les routes des corvettes dans le détroit de Magellan
et à travers les glaces et les terres antarctiques, ainsi
que les dessins déjà exécutés. M. Scott, qui paraît être
un officier instruit, prit un vif intérêt à examiner ces
divers matériaux, et ne me quitta qu’à onze heures
et demie, pour aller faire ses observations méridiennes
au fort Galvez; car il attachait un grand prix
à s’acquitter en personne de ce genre d’opérations.
Le capitaine Scott m’ayant prévenu que la frégate
partait le surlendemain pourValparaiso, je me décidai
à expédier au ministre de la marine, en France, un
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