les entendait de tous côtés demander le nom du chef français
qu’ils prononçaient Titilau lieu de d’Urville.
A trois heures et demie, le commandant était de retour à bord;
le roi Gregory lui avait offert une masse énorme de fruits de toute
espèce, et près de i 5o poules ; dépareilles provisions sont habituellement
fêtées à bord des bâtiments qui font de grandes traversées;
mais il y avait une telle profusion de bananes, de
courges, qu’on ne savait où les mettre. Ce fut l’évéhement du
jour.
[M. Marcscot.')
N o t e 8 1 , p a g e i 54*
La maison des missionnaires est près de l’église, dans un endroit
charmant. Cette habitation artistement bâtie en roseaux ou
petits bambous qui croissent dans l’île, est couverte de feuilles
de la canne à sucre ; elle a des portes et des fenêtres et est divisée
en plusieurs compartiments. Leur couche est sur un lit de camp
en roseaux, à la manière des naturels. Cette case est bien
certainement et sous tous les rapports la plus jolie qui soit
dans l’île.
Près de là maison du roi on voit un immense four à chaux
que les missionnaires ont fait bâtir nouvellement et qui doit
produire la chaux nécessaire à la construction de l’église projetée.
Je rencontrai les commandants des deux navires, ils étaient
accompagnés des deux missionnaires qui leur faisaient voir le
village; ils étaient suivis d’une foule immense. Ma suite était aussi
très-nombreuse, et à chaque instant elle se renouvelait. Mais ce
que j ’y trouvai de pis, c’est qu’à chaque instant il fallait donner
des poignées de main aux nouveaux arrivants, et je craignais d’y
gagner quelques maladies de la peau, si communes chez ces habitants
habitués à marcher nus. 0 vous qui n’êtes pas partisans
de la poignée de main, ne venez pas à Manga-Reva !.......
Lë roi s’était mis en grande tenue pour recevoir le commandant.
11 portait une lévite d’officier de marine, à laquelle il manquait
quelques boutons. Sa casquette, aussi d’officier de marine,
était ornée d’un large galon. Il parut très-content de ce que lui
donna le commandant. Mais ce qui le flatta davantage, ne fut pas
un petit fusil à deux coups et trois kilogrammes de poudre qui
l’accompagnait, mais bien quelques brasses de mauvaise cotonnade
rouge.
Le commandant eut bien soin de lui faire entendre dans sa
langue que s’il continuait à bien se comporter et à protéger
les missionnaires, la France lui en témoignerait sa reconnaissance.
(M . Gourdin.)
N o t e 8 2 , p a g e L 54-
La pompe religieuse du nouveau rite leur plaît; ils n’y sont
pas encore accoutumés, et dans leur naïve iguorance, ils sont
probablement plus fervents et plus strictement religieux qu’aucune
des nations civilisées de l’Europe. A chaque instant ils psal-
modientetrécitent les prières latines qu’on a la barbarie de leur
faire apprendre par coeur : souvent ils chantent des hymnes pour
se distraire ou se délasser du travail. C’est ainsi que j ’ai entendu
un naturel chanter à pleine voix le Pater nos ter, assurément défiguré,
pendant qu’il pliait des feuilles sèches de pandanus autour
d’un bâton pour réparer ou fortifier la paroi de sa demeure.
Quelquefois nous avons chanté avec eux, alors ils accouraient
de toutes parts se former en cercle, pour se joindre au concert.
Bizarre tableau ! un amas d’hommes demi-nus, au maintien sauvage,
chantant au milieu des arbres d’un monde ignoré il y a
peu de temps, les prières de la religion des peuples civilisés dans
la langue d’un peuple effacé du globe depuis tant d’années !...
Pour rentrer à bord, nous suivons l’autre portion de la grande