314 NOTES.
La facilité de l’existence et le haut prix du travail manuel, attirent
ici un grand nombre d’ouvriers étrangers, la plupart déserteurs
des baleiniers. Ils travaillent avec succès lorsqu’ils possèdent
un état, et parviennent à acquérir promptement une fortune.
Les charpentiers et les forgerons sont recherchés plus que tous
les autres ouvriers. Un fabricant de meubles ferait de bonnes
affaires dans un pays qui n’en possède aucun.
(J\l. Desgraz.)
Note 2g, page 63.
La fidélité chez les femmes publiques est quelque chose de-
curieux à observer dans les moeurs d’une nation licencieuse. J’en
ai entendu citer bien des exemples par les baleiniers qui sont
payés pour le savoir mieux que personne. Une fois qu’une femme
a contracté un engagement avec un individu , elle sait résister à
des offres pécuniaires très-élevées pour elle, et n’abandonne son
amant qu’au moment où celui-ci part et rompt l’engagement.
C’est d’autant plus curieux qu’au moment de la séparation, le
plus grand calme règne dans les adieux, on se souhaite mutuellement
beaucoup de choses avec un sang-froid surprenant, et l’on
se quitte souvent pour la vie. Le lendemain la femme a renouvelé
un engagement avec un autre mari ou un successeur quelconque,
et lui est aussi fidèle qu’à son devancier. Moeurs bizarres qui
étonnent quand on les voit de près !
(M . Desgraz.)
Note 3o, page 63.
Le premier jour qui suivit notre.arrivée, en revenant de la baie-
Saint-Vincent, nous avions rencontré l’enterrement d’un jeune
enfant. Des femmes le suivaient avec quelques hommes portant
sous le bras des bouteilles de vin. Un assistant nous dit en français
que ces bouteilles de vin étaient destinées à calmer la douleur
des parents et des amis au moment de l’inhumation. Nous
prîmes pour une plaisanterie un fait qui, malgré son étrangeté,
paraît cependant vrai. Aujourd’hui j’ai l’occasion de voir un nouvel
enterrement passer avec le même approvisionnement de bouteilles
pour lesquelles on m’a donné le même motif, c’est-à-dire,
de bannir de trop vifs chagrins. Cet usage rappelle celui a peu
près semblable des Esclavons qui résident à Constantinople ils
boivent aussi après avoir pris congé de leurs morts, a la toilette
desquels ils passent beaucoup de temps. Les Chiliens sont un
peuple joyeux, ils aiment le plaisir et les émotions agréables ;
c’est pourquoi ils cherchent dans la boisson un remède aux
grandes pertes qui ne sauraient être palliées par un simple air
de Biguela.
(M . Desgraz.")
Note 3 i, page 63.
L’hôpital que nous avions établi à Talcahuano, conformément
aux ordres du commandant Dumont d’Urville, a été abandonné
ce matin. Ici se terminent avec le scorbut les événements de la première
période de notre campagne. A bord de l'Astrolabe, nous
observâmes quelques symptômes de cette maladie dès le 15 février,,
par 6!» 53' de l’attitude sud, et 33° 37' de longitude ouest; de
cette date à celle de notre arrivée au Chili, il s est écoulé 5i jouis
de mer, temps plus que suffisant pour permettre au mal d’atteindre
sa plus grande intensité. Cependant nous fûmes assez
heureux pour n’avoir à regretter la perte d’aucun de nos compagnons
de voyage. Une douzaine d’entre eux nous donnèrent seuls
de plus ou moins vives inquiétudes ; mais nous parvînmes à leur
rendre un mieux être, qui, quoique stationnaire, nous laissait
cependant la certitude d'atteindre patiemment le port sans appréhension
pour leurs jours. Ces hommes furent les seuls admis.