stKJuin. toujours si fastidieuses dans une longue navigation
contrariée par les vents.
Il était écrit, sans doute, dans le livre du destin,
que nous épuiserions la'coupe des contrariétés. Après
deux jours de calme, les vents sont revenus à l’ouest,
et n’ont pas varié du N. 0. au S. 0. Ces tristes retards
sont utilisés pour former nos matelots aux divers
exercices, comme ceux du canon, du mousquet et aux
branle-bas de combat.
Avec les temps ordinaires dans ces parages par les
25°, nous eussions déjà atteint le groupe de Manga-
Reva, et à peine avions-nous fai t 300 lieues de bonne
route. Ce qu il y avait de consolant, c’est qu’il n’y
avait plus un seul malade sur les deux corvettes. Il
est vrai que le dernier des cochons achetés à Talca-
huano n’avait été tué que le 30 juin, et l’équipage
30. avait eu constamment deux repas de viande fraîche
par semaine. Ainsi toutes les traces du scorbut
paraissaient définitivement effacées.
Le même jour dans la matinée, le calme plat nous
permit de faire des expériences de température sous-
marine, l’une par 250 et l’autre à 500 brasses. La
surface des eaux étant à 19°,3, on a obtenu 11°,4 à
250 brasses et 6°, 4 par 500 brasses.
L équipage fait ensuite l’exercice du mousquet à
tir sur un blanc suspendu à l’extrémité de la vergue
de misaine, à raison de cinq coups par homme. Plusieurs
ont tiré juste. Les officiers ont fait l’essai des
fusils à la Potet, qui nous avaient été remis pour
épreuve. On jugea qu’ils se manoeuvraient assez
facilement et ne repoussaient point. Mais quelques
personnes ont trouvé qu’il était difficile de tirer juste
avec ces armes; et chacun a été d’accord sur l’inconvénient
que la capsule ne pouvait souvent faire feu
qu’au second coup. Aussi a-t-on pensé qu’il vaudrait
mieux qu’elle fût détachée de la cartouche. Au demeurant,
il est certain que ces armes nous offriraient
un avantage immense sur les mousquets ordinaires à
pierre, si nous étions obligés d’avoir affaire à des sauvages,
surtout à travers des fourrés et par un temps
pluvieux*.
Le 3 juillet fut une journée néfaste pour Y Astrolabe
: à 7 heures 45 minutes, le cri lugubre d’une
homme à la mer retentit sur le pont. Aussitôt deux
canots furent amenés, et M. Gourdin embarqua dans
l’un d’eux; la Zélée, de son côté, envoya aussi une
embarcation en quête de l’homme qui avait disparu.
Sur-le-champ, j’avais fait lancer dans le vent et mettre
en panne. Mais toutes ces précautions auxquelles
s’unissaient les circonstances d’une mer calme et
d’un petit vent nous furent inutiles. On ne put même
pas voir passer l’homme le long du bord, et son
bonnet fut le seul objet qu’on put sauver.
Le malheureux qui disparut ainsi se nommait Geôlier,
bon petit matelot, d’un caractère doux, obéissant
et d’une conduite régulière ; en général aimé par ses
chefs et par ses camarades. Le scorbut l’avait assez
fortement frappé, mais il s’en était parfaitement ré-
3 juillet.
* Note 55.