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et tellement méconnaissables, que je me vis obligé dé demander
leurs noms, ne pouvant rien apercevoir dans leurs traits qui pût
me les rappeler.
( M. Jacquiriol.y
N o t e 8, p a g e 19.
Dans les premiers jours de 1837, une horde d’indiens fondant
à l’improviste sur les possessions chiliennes de la Concep-
cion, avait envahi et ravagé une partie de la province ; une division
chilienne les avait repoussés et poursuivis jusque dans
l’intérieur. Ce mouvement, bien que promptement réprimé, avait
cependant donné de l’inquiétude au gouvernement L’expédition
qui se préparait contre le Pérou exigeait une réunion des troupes
qui garnissaient la frontière, et il fallait néanmoins pourvoir à la
sécurité du pays. En conséquence l’intendant dépêcha auprès
des tribus qui n’avaient point pris part au mouvement, un Indien
fidèle, chargé d’engager les principaux chefs à venir parlementer
avec lui à Arauco, village situé à 22 lieues au sud de Concep-
cion. Il avait eu l’intention de me faire part de. cette démarche,
ainsi qu’à M. Rouse, consul d’Angleterre, et de nous inviter à
l’accompagner, si le Parlamento avait lieu. Outre l’intérêt de curiosité
que nous offrait cette expédition, il en était un autre
d’une plus haute importance. Noüs aussi, nous avions nos intentions
d’établir des relations avec les Indiens de la côte. Nous désirions
être utiles à ceux de nos compatriotes assez malheureux
pour faire naufragé dans ces parages. Les équipages des navires
français la Rose et la Confiance, ceux des navires anglais Chal-
ionger et Savreen, avaient été dépouillés ou maltraités par eux.
Nous devions tâcher d’éviter à d’autres un pareil sort.
Nous partîmes le i er mars ^accompagnés de quelques officiers
de nos équipages ; à huit heures du matin, nous traversâmes
ce Bio-bio , si souvent le théâtre des exploits des Araucaniens.
Cette rivière, à en juger par sa largeur, par l’abondance et le
cours paisible de ses eaux, devrait être navigable; cependant
elle ne l’est pas. Profonde, tant qu’elle reste encaissée dans les
montagnes, elle étend beaucoup son lit vis-à-vis de Concepcion,
et seulement un chenal assez étroit offrirait passage à des navires
d’un tonnage moyen (60 ou 80 tonneaux). En outre, avant d’y
arriver, il faudrait franchir à l’embouchure une barre extrêmement
dangereuse. Les seules embarcations qui naviguent sur le
Bio-bio sont de grandes chaloupes à quilles plates ; elles servent
à conduire les fruits de l’intérieur jusqu’a Concepcion ; on en
transporte aussi sur des trains de bois, formés de gros arbres
qui sont également vendus pour servir, soit de bois à brûler, soit
de bois de construction.
De l’autre côté du Bio-bio est San-Pedro, autrefois place fortifiée
par les Espagnols, aujourd’hui petit village dont la structure
est assez pittoresque. A notre arrivée, nous fûmes reçus, par le
maire, honnête et bon paysan dont nous fûmes obligés d’accepter
et de manger le détestable déjeuner.
Cette corvée expédiée, nous nous disposâmes à continuer notre
route. Nos chevaux et nos domestiques nous attendaient chez
notre hôte; ils y étaient venus coucher la veille. Avec eux était aussi
un petit char-à-banc américain que l’intendant voulut absolument
nous faire partager. Bien que très-reconnaissant de cette politesse,
i :e ne fus pas longtemps de la partie. Cette voiture qui est basse et
très-solidement suspendue sur les essieux, demande à être conduite
avec soin , non dans la crainte de verser, mais pour en
adoucir un peu les mouvements. C’était justement ce que ne
voulait pas entendre notre intendant, qui est un vrai casse-cou :
il allait, il allait et fouettait son cheval tantôt par c i , tantôt par
là; ma foi je trouvai plus convenable de reprendre ma monture.
M. Rouse, victime de son imperturbable politesse, se vit obligé de
laisser ses os à la discrétion de notre cher intendant.
A une-lieue de San-Pedro, nous nous trouvâmes dans une