qu’aucune des expéditions françaises n’avait parcourues.
Les peuples y étaient encore à leur condition
primitive, et j étais persuade que c’etait là seulement
que le capitaine Du Petit-Thouars avait dû
conduire ses missionnaires, comme au vrai chef-lieu
de cet archipel.
Il était d’ailleurs intéressant de savoir comment les
naturels s’étaient conduits avec eux après le départ
de la frégate et même de leur offrir notre protection,
s’ils en avaient besoin.
Enfin ce que je venais d’apprendre au sujet des missionnaires
qui avaient passé à Taïti, me donnait lieu
de croire que l’honneur du pavillon me commandait
d aller sur les lieux, sinon pour en tirer moi-même
vengeance, du moins pour recueillir des renseignements
positifs au sujet de cette triste affaire, en informer
mon gouvernement et menacer la reine et les
chefs d un châtiment exemplaire de l’outrage commis
envers des citoyens français.
D’ailleurs, dans la route de Manga-Reva à Nouka-
Hiva et de Nouka-Hiva à Taïti, je ne pouvais manquer
dans l’archipel des Pomotou, d’avoir occasion
de faire plus d’une rectification utile à l’hydrographie.
Cette résolution une fois arrêtée, j’en fis part à
M. I évêque en secret et lui recommandai le silence
à cet égard; car j’avais déjà adopté le parti invariable
de ne jamais faire connaître à l’avance le lieu où je
comptais me diriger, parti que j’ai constamment suivi
dans le cours de ma campagne et dont j’ai eu maintes
fois lieu de m’applaudir. Par là, j’ai su m’éviter bien
des inconvénients et des désagréments, ce que comprendra
facilement tout homme qui aura commandé
un navire de guerre dans une navigation lointaine
et active, sans que j’aie besoin d’entrer dans de plus
grands détails.
Le brave évêque fut ravi de cette résolution de ma
part, et m’engagea surtout à représenter vivement au
ministre qu’en ce cas il fallait des mesures promptes
et énergiques pour imposer aux sauvages, et rabattre
l’insolence des missionnaires anglais ou américains.
Il déplorait amèrement l’issue des négociations de
M. Du Petit-Thouars à Hawaii, et surtout son consentement
à l’expulsion de MM. Short et Bachelot de cet
archipel; il eût préféré que rien n’eût été fait et que
ces missionnaires fussent restés sous le poids des
persécutions auxquelles ils avaient été jusqu’alors en
butte; car il y avait toujours moyen d’en appeler,
mais d’après ce qui était arrivé, il semblait qu’on
eût donné l’assentiment au bannissement des catholiques.
Il faut observer, il est vrai, que M. Du Petit-
Thouars, n’ayant pas d’ordres positifs de son gouvernement,
crut devoir avec quelque raison se contenter
de la demi-mesure qu’il adopta.
Comme il était déjà trois heures et demie, je pris
congé de MM. de Nilopolis, Guillemard et Latour qui
me renouvelèrent tous leurs remerciements et leurs
voeux pour le succès futur de nos opérations. L’évêque
fit encore porter dans mon canot un mouton et trois
chevreaux. M. Latour, fidèle à la promesse qu’il m’a