du roi. Jusqu’à l’âge de douze ans, il devait rester là, loin de
tout commerce avec les hommes, sous peine de perdre sa couronne.
Sa descente au village était une fête, et, de retour au milieu
de son peuple, il vivait sans avoir d’autre commerce au dehors
que celui des gens de sa maison. À partir de là , le sommet
s’élève en arête assez étroite pour nous forcer de nous mettre à
marcher sur nos pieds et nos mains , dans la crainte qu’un faux
pas n entraînât une chute épouvantable. Enfin arrivés , tous nos
travaux se terminèrent, et notre retour s’exécuta assez promptement.
Du haut de la montagne , nous avons entendu les voix de
ces nouveaux chrétiens chantant en latin les louanges du Seigneur.
C’est avec plaisir aussi que nous avons vu qu’un joli chemin
est tracé à travers cette plaine habitée, et qu’on y avait ménagé
de petites places consacrées aux jeux de ce peuple, qui s’y
ébat à lancer la paume ou au jeu des barres. Notre retour a été
marqué par le même triomphe qu’au départ ; il est cependant facile
de remarquer que, parmi les hommes âgés, il y a plus de
méfiance que parmi les jeunes gens. Quelques femmes se font remarquer
par d’assez jolis yeux et une figure agréable. Toutes les
cabanes sont en joncs ; quelques-unes seulement ne sont abritées
que d’un côté. Leur lit ressemble assez à celui de nos corps-de-
garde , sur lequel repose étendue une famille entière.
Deux prêtres sont chargés des soins religieux dans cette île; sur
le revers opposé de la montagne, il y a encore un village comprenant
près de six cents âmes. Du sommet de la montagne, le groupe
présente un singulier aspect, entouré d'une ceinture qui n’est dis-.
continuée qu en trois endroits. L’intérieur paraît comme un plateau
marbré de bleu ou de blanc, suivant la profondeur de l’eau. Du
reste, le mouillage y parait très-difficile à atteindre, et cette rade
apparente est traversée en tous sens par des bancs de coraux. Due
longue chaîne forme l’île principale, et, quoique le cratère éteint
ne soit plus visible, on ne peut méconnaître les traînées de lave. A
quatre heures, chacun de nous a rallié le quai. On venait d’achever
les vêpres, pendant lesquelles toutes les cases étaient restées vides
et les bosquets silencieux. La population forme une muraille vivante
sur le môle , et nous passons au milieu de mille adieux de
nos nouveaux amis. Parmi eux , nous laissons plusieurs des nôtres,
qui veujent étudier plus longtemps cette population intéressante.
(M. Dumoulin.')
N o t e 7 1 , p a g e i 43.
Le lendemain dimanche, je descendis de bonne heure pour les
observations astronomiques. J’étais tranquillement occupé à observer
sur le quai, lorsque je fus agréablement distrait démon
travail par des chants fort bien cadencés q u i, s’élevant du milieu
du fourré d’arbres, me firent éprouver une sensation indéfinissable
d’étonnement et de plaisir. L’ensemble de toutes ces voix, qui
s’harmonisaient admirablement, la surprise, la beauté de la
scène, auraient transporté les curieux les plus insensibles. J envoyai
un de nos matelots s’informer de la cause de ces chants,
et je ne tardai pas à apprendre que l’on célébrait la messe a ce
moment, et que toutes ces voix faisaient monter au ciel les prières
d’un peuple fervent, comme aux premiers jours de l’Eglise. J’avoue
que j ’aurais donné beaucoup pour arrêter dans sa course
ce maudit soleil, qui m’empêchait d’aller jouir de cette scène si
nouvelle pour moi ; mais je fus forcé de continuer mes observations
et de retourner immédiatement à boVd pour veiller à d’autres
soins......
I c i, nous disait le père Cyprien , j ’ai fait planter du tarse,
racine nutritive et inconnue avant nous ; là, j ’ai planté du coton ,
dont ils n’avaient pas l’idée ; un peu plus loin , voici une plantation
de bananiers, dont le nombre allait en décroissant rapidement.
A gauche, un champ de patates douces ou d ignames que
nous avons importées; à droite, des plants de carottes, de ci