A8ru quilles de concholepas, dont les mollusques ont servi
à la nourriture des habitants; mais ces amas sont
bien moins nombreux qu’en 1823, soit que les voyageurs,
ayant appris à connaître la valeur de cette coquille
pour les amateurs, y aient abondamment puisé,
soit qu’elles aient servi à faire de la chaux pour les
besoins du pays. On peut se rappeler que ce furent les
navigateurs de la Coquille qui commencèrent à faire
tomber en France le haut prix de cette coquille uni-
valve.
M. Dumoutier est rentré apportant un condor et
quelques autres oiseaux, trophées de sa chasse. Mais
il a subi un cruel désappointement au sujet de son
baleineau. Hier au soir, il avait traîné à la plage, avec
beaucoup de peine, le crâne de son cétacé, et comptait
aussi retourner le lendemain pour l’étudier. Ce matin,
il l’a trouvé en pleine décomposition; la nuit avait
suffi pour l’altérer complètement. Impossible de tirer
aucun parti du cerveau. Il conserve encore l’espoir de
pouvoir s’en procurer un autre ; mais il commence à
voir que l’acquisition de ces objets entraîne beaucoup
de difficultés.
13. Le beau temps dont nous avions joui depuis notre
arrivée continuant encore, vers midi, je me décidai à
faire une promenade sur les délicieux coteaux de Tal-
cahuano, où j’avais erré avec tant de plaisir quinze ans
auparavant. Je mis pied à terre sous le fort Galvez, et
commençai à gravir le coteau escarpé qui le domine.
Quelques travaux avaient été entamés dans la batterie,
mais sans avoir été terminés ; je n’y vis que trois
pièces en bronze sur des affûts plus ou moins délabrés,
et trois autres piteusement étendues sur le sol : le tout
sous la surveillance d’un misérable gardien en guenilles.
Arrivé sur la crête de la colline, je retrouvai
les jolies pelouses, les verdoyants bocages dont j’avais
conservé le souvenir. Mais nonobstant le beau temps
qui régnait encore et l’air salubre qu’on respire dans
ces lieux, les approches de la mauvaise saison se faisaient
sentir par l’absence de ces myriades d’êtres animés
qui embellissent la scène au mois de janvier.
Quelques papillons et oiseaux-mouches attardés seuls
se montraient encore ; ce n’était plus ce bruissement
assourdissant des cigales et des sauterelles ; les oiseaux
ne se montraient plus que rares et clair-semés dans
les bocages. Les fleurs elles-mêmes avaient cessé de
couvrir les arbustes et les gazons. Quelques bouquets
tardifs de Protea, un petit Oxalis à fleurs jaunes si
fourrées qu’elles forment quelquefois des tapis, une
Lobelia rampante, un Phlox violâtre, quelques grelots
épargnés de l'éblouissante Lapageria, et deux ou trois
autres plantes formaient désormais l’unique ornement
de ces lieux, où j’avais recueilli par centaines des espèces
plus ou moins rares et curieuses.
Je passai deux ou trois heures sur ces collines, tantôt
me promenant sous les ombrages des myrtes et des
lauriers, tantôt étendu sur la pelouse jaunissante, et
toujours rêvant aux chances que me préparait l’avenir,
à la direction que je devais donner à mes opérations
futures pour en tirer le meilleur parti possible *.