temps à autre tait duo avec l'orateur, pour répéter les derniers
mots d’une phrase.
Ils ont aussi leur tactique, leur rouerie parlementaire ; ils ne
lâchent jamais de suite leurs meilleurs orateurs, ni leurs plus
forts arguments ; ils les gardent en corps de réserve. Ainsi, le premier
jour des conférences se passa en compliments ; le second,
on vit peu à peu apparaître sur' la scène quelques plaintes, quelques
marques de défiance ; le troisième jour, ils devinrent exigeants;
ils se plaignirent amèrement, et avec beaucoup de feu, de
la protection que le gouvernement accorde au chef Colipi. Ils
dirent qu’il en profitait pour enrichir son territoire. Ils demandèrent
à être placés entièrement en dehors de sa juridiction ,
et à ce que le seul cacique auquel ils eussent à reconnaître
quelque autorité , fût Antinahuel ( Tigre-Soleil ) , vieillard habitant
aux environs d Arauco, et reconnu par le gouvernement
cacique gouverneur de ce district. Mais, bien que l’intendant
leur protestât qu’il ferait des remontrances à Colipi, qui cependant
était un fidèle allié des Chiliens , bien qu’il leur promît d’acquiescer
à leur pétition, ils insistèrent pour que Cette prétention
fût satisfaite tout de suite et sanctionnée par la cérémonie
d’usage en pareil cas. Il fallut céder. Alors l’intendant les fit se
prendre tous par la main, plaça celle de Couroumilla dans celle
d’Antinahuelet leur déclara qu’à l’avenir, et à dater de ce jour, les
plaintes ou les demandes qu’ils auraient à faire au gouvernement
devaient lui parvenir.
Cela terminé, deux autres se présentèrent, disant qu’ils désiraient
profiter de cette réunion pour être reconnus en qualité de
gouverneurs de leurs districts respectifs ; cette dignité leur ayant
été léguée par leurs pères.
On voit que chez ces sauvages aussi il y a de l’hérédité. En effet,
le pouvoir passe de père en fils, ainsi que les propriétés. Il est
rare même de voir un cacique qui n’y soit pas arrivé de cette manière.
On ma fait remarquer quelques jeunes gens qui nous furent
présentés comme devant commander un jour, parce qu’ils
étaient fils de caciques. Cela n’empêche pas que quelques-uns
ne s’emparent du trône, parce que la raison du plus fort est toujours
la meilleure, et que
Le premier qui fut roi fut un soldat heureux.
Cependant ils paraissent avoir un grand respect pour les décisions
des vieillards, et lorsqu’ils veulent protester de leur bonne
foi, ils citent les sages conseils qui leur furent donnés par leurs
ancêtres.
Une fois l’installation des grands dignitaires terminée, ils élevèrent
une nouvelle prétention; ils demandèrent que le gouvernement
leur nommât un plus grand nombre de capitaines de amigos.
Ces officiers sont ce qu’on appelle aux Etats-Unis indianis agents.
Ils servent ici d’interprètes et d’agents avec les Indiens. Les Indiens
ne feraient aucun cas d’ordres ou d’avis qui leur seraient
donnés par d’autres au nom du gouvernement. Cet emploi est
confié à des Chiliens qui connaissent le pays et parlent la langue
indienne. Leurs appointements sont peu de chose , mais ils ont
l’avantage de faire presque exclusivement le commerce avec les
Indiens. Les immunités du droit des gens sont strictement observées
à leur égard, et il n’y a pas d’exemple qu’aucun d’eux ait
été assassiné ou volé dans le cours de leur mission ou même de
leurs affaires particulières. Les Chiliens devraient à cet égard les
prendre pour modèles. Les capitaines de amigos sont au nombre
de quatre, outre le commissaire-général Zuniga. Les caciques
trouvaient à juste titre que, pour le bien même du service, il
convenait qu’ils fussent plus nombreux. Mais, pour cette fois,
l’intendant éluda la question, en leur disant qu’il avait besoin
de consulter le gouvernement suprême. Le fait est qu’il
ne se souciait pas d’autoriser les rapports intimes d’un plus grand
nombre d’individus avec les Indiens. D’après ce qu’il nous dit de
ces peuplades, il avait des motifs de croire que la dernière invasion
avait été provoquée par les ennemis du gouvernement, dans