vent les contours sont le résultat du seul caprice de l’artiste.
Malgré la grande variété des tatouages, il me semble que le suivant
était le plus généralement adopté. Le corps , vu de face, présente
sur chaque épaule un rond noir coupé d’une croix de Saint-André.
Une suite d’anneaux ou de baguettes déliées réunit les deux ronds,
et forme autour du corps une sorte de collier. La poitrine et les
cotés sont traversés de larges bandes divisées en deux parties par
une ligne médiane formée par le nu de la peau. Des bandes larges
ou étroites, quelquefois des filets déliés descendent le long des
bras et des cuisses. Les jambes sont le plus souvent recouvertes
de tatouage qui forme une espèce de guêtre. Le dos présente un
tateuage analogue, si ce n’est que les reins ont en général
deux ou quatre larges plastrons. Les naturels tatouent rarement
leur visage qui conserve un teint d’un brun jaunâtre foncé. Les"
femmes m’ont paru exemptes de cette opération qui doit être assez
douloureuse à cause du nombre infini de piqûres qu’ellè nécessite.
Les Manga-Reviens connaissent a peine les rudiments dé laf
navigation. Quelques pièces de bois assemblées par dè*4‘tra v e r s é
et reliées avec du fil de coco forment de mauvais radeaux sur
lesquels ils circulent le long de leurs côtes, à l’abri des récifs .qui
les bordent. De longues perches servent à faire marcher Ces radeaux
qui naviguent quelquefois avec deux pagaies en bois dur,
taillées en forme de feuilles de bananier. On ne trouve dans tout ■
le groupe d îles, qu un-petit nombre de pirogues d’une construc-’*
ti°n très-grossière. Les naturels, peu adroits à la pêche, ne savent
pas encore tirer parti des ressources que leur offre une mer poissonneuse.
Leurs hameçons en coquillages sont de simples cro -'
chels très-courbés, qui paraissent peu propres à remplir leur
destination. Nous avons semé à profusion d’excellents hameçons
dont les naturels faisaient assez de cas. A la fin dé notre séjour,
le matao était devenu la petite monnaie courante. Lés naturels
aiment beaucoup le poisson dont ils mangent la chair crue sans
aucun apprêt. C’est à peu près le seul mets qui fasse diversion à
leur nourriture toute végétale.
( M. Roquemaurel. )
N o t e 9 8 , p a g e 1 7 8 .
Je finis mon travail à midi environ. Désirant faire dîner mes
hommes avantde rentrer à bord, nous nous dirigeâmes vers une
baiesitüée dans le nord de Manga-Reva, que j ’avais aperçue quelques
jours avant, et qui par son aspect délicieux m’avait inspiré
le plus grand désir de la visiter. Le fond peu encombré de récifs,
nous permit d’accoster dans une petite anse de sable où nous
échouâmes notre canot. Les hommes descendirent à terre et
préparèrent leur repas. Pendant cetemps, Dumoulin et moi nous
allâmes nous promener sous les plantations. Cette baie, quoique
assez profonde et richement dotée en~productions du pays,
possède trop peu d’habitants. Nous ne fumes accostés à notre
débarquement que par un seul insulaire, qui vint nous offrir des
cocos. A l’entrée de la case nous vîmes sa famille, qui me parut
compléter toute la population de ce canton. J’étais enchanté de
me trouver enfin avec peu d’habitants et sans un missionnaire.
J’allais être à même de juger ces gens-là un peu mieux que
je ne l’avais fait jusqu’alors. Car je présume que la présence
de leurs pasteurs leur en impose beaucoup. Nous fûmes
doublement enchantés de nous trouver presque seuls, quand
nous eûmes attentivement considéré tous les membres de la famille
de l’indigène ; car nous remarquâmes deux fort jolies filles.
Des yeux superbes, des dents blanches et bien alignées ; avec un
peu plus de propreté, ces deux femmes auraient été trouvées
jolies partout. Quant à nous, elles nous parurent superbes, et
nous aurions bien voulu nous trouver avec elles dans une solitude
encore plus complète. Du reste, elles rougissaient au
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