Xe Trient
ou l’eau de
Bérard.
Vallée de
Bérard.
Granit
veiné à
: noeuds de
Quartz.
pendant de Valorfine. Nous partîmes de là le i 3 e. Juillet, de
grand matin, montés fur „nos Mulets; car quoi qu’on ne puiffe
s’en fervir que dans l'efpace dë deux petites lieues ^'cette épargne
de fatigue n ’eft point à méprifer quand on a devant foi une
journée auifi pénible*
§. y 5 2. Nous commençons par côtoyer un torrent qui fait
une très-belle chute, au fond d’une profonde crevaffey entre des,
rochers de Granit : de grands blocs du même Granit engagés dans
cette crevaife, retardent le cours du torrent & le forcent à
fe brifer en écume..
B ien tô t après V on entre dans une vallée étroite & tor-
tueufe, de laquelle fort ce torrent. Cette vallée conduit au
C o l de Bé ra rd, par lequel on paifé de V a lo r is e à S î x t ou à-
PaiTy. L e torrent même fe nomme le T r ie n t , ou. l’ eau de:
Bérard.
C ette v a llé e , dont la dlreétion générale efi à-peu-près dè
TEft-Nord-Eft à l ’Oueil-Sud-Oueft , eft flanquée- à fon entrée-
par deux hautes- montagnes : l’une au Midi forme l’extrémité
de la chaîne des Aiguilles rouges , §. 541î , l'autre au Nord',,
fe nomme le Mont de Loguia.,
C es deux montagnes font compoféés d’une-efpece de Granit
v e in e , parfeme de noeuds de Quartz. La forme de ces noeuds
approche beaucoup de celle d’une lentille ;■ leur plus grande
feclion eft un- cercle;- & la plus petite, qui cou p e - l’autre- à angles
droits, eft un ovale aigu par fes extrémités. Ces noeuds,
lenticulaires font pofés de p lat éntré lès feuillets de la pierre
& parallèlement à eux. Lorfque les blocs de cette pierre font.
coupés, comme cela arrive fouvent, par des plans perpendiculaires
à leurs feuillets, on voit à l’extérieur les tranches de
ces noeuds, qui fe préfentent comme des yeux blancs ovales,
parallèles entr’e u x , longs de huit ou dix lig n e s , & fouvent
beaucoup plus petits.
- C ette R o ch e , qui forme la matière des montagnes qui bordent
l’entrée de cette v a llé e , paroît dans le Mont de L o g u ia ,
difpofée par couches ou par grands feu ille ts , prefque perpendiculaires
à l ’horizon. Mais plus avant dans la v a llé e , les
couches des montagnes à droite & à g a u ch e , pároiífent fort
en défordre.
O n traverfe le Trient fur un mauvais pont de bois ; & l’on
gravit enfuite par une montée rapide, une hauteur compofee de
blocs énormes de ce même Granit veine a yeux de Qtiartz. Ces
b locs, dont tous les angles font vifs & entiers, paroilfent s être
■formés- par la rupture & l’affaiffement d’une montagne, dans
le lieu même qu’ils occupent.
§. 5X3. E n faifant cette ro u te , nous voyons fous nos pieds
les reftes d’une grande avalanche, qui avoit Comblé le lit du
T r ie n t , & fous laquelle il s’eft frayé un paflàge. La partie
fupérieure de cette avalanche forme encore une voûte légère qui
va d’une rive à l’autre du torrent. Je vis en 1775 , dans le haut
Valíais, des arches d e n e ig e , femblables à celle là , mais incomparablement
plus grandes, puifqu’elles palfoient par deflus le
R h ôn e ; & fi fo lid e s , que les Voyageurs & les Mulets chargés
traverfoient le Rhône fur ces ponts de neige durcie , fans
que l ’on imaginât courir aucun danger.
O 0 o 2
Voûte de
neige iur le
Trient.