mirois la netteté avec laquelle l ’ombre de la montagne traçoit
à fes pieds les contours de fes bords ; quand j’apperçus dam
le corps de cette om b re , un point éclairé par le Soleil. Je
refufai d’abord d’en croire mes y e u x ; mais la lunette d’appr0.
che m’ayant rendu diftinâement le même témoignage , il ne
me fut plus, permis d’en douter. Il fallut par conféquent
admettre , que la montagne étoit en quelqu’endroit percée de
part en part. Cette flngnlarité me frappa beaucoup : je ré.
folus de faire les plus grands .efforts pour découvrir l’ouverture
par laquelle palToit ce rayon.
Grand Puits
au bord de la
montagne.
P our cet e ffet, je me plaçai entre le Soleil & le point éclaire',
& en avançant dans cette direétion, je découvris un puits très-
large & très-profond , taillé, dans le r p c , au bord de la montagne:
le Soleil qui étoit alors allez é le v é , paroiffoit pénétrer
julques au fond de ce p u its ,, je loupçonnai qu’il avoit une
ouverture fur le bord efcarpé du ro c h e r , & que quelque rayon
s’échappant par cette ouverture, alloit éclairer un point entouré
des ombres de la montagne.
P our vérifier cette conjecture, il falloit defcendre julques
au fond de ce puits: par dedans, la chofe étoit impoflîble , à
moins de fe faire dévaler par des cordes ; je le tentai donc par
dehors, j ’en vins à b o u t , à la vérité avec quelque peine,
& en faifant un détour. Je , trouvai au bas du puits une
grande ouverture, qui avoit la forme d’un portail irrégulier,
-de 4 ° à y o pieds, d’é lé va tion , & je vis; les rayons, du Soleil
reffortir par cette ouverture, après avoir pénétré obliquement
jufques au fond du puits.
Creux de
Brifaut. Je reconnus même que cette ouverture, eft celle que l’on
voit de lR plaine »vers i e haut de la montagne, & que l’on nomme
h creux de B r ifa u t, parce qu’à cette diftance, elle ne paroit
pas plus grande qu’il ne la faudroit pour un Chien.
J ’ e n t r a i dans le p u its , dont le fond eft à-peu-près de niveau
avec cette entrée ; & je jouis en me retournant, du fpec-
tacle que préfente ce fite fingulier.
On voit le Ciel au deffus de fa tête , comme par ûne large
haute èheminée, & en baiffant les yeux on a une échappée
■ de la vue de la plaine, qui forme un brillant tableau, encadré
■ par la voûte irrégulière du grand portail, par lequel on eft
■ entré.
9 ‘ ‘
Ce plaifir fut le feul fruit que je tirai de cette découverte,
■ dans le moment où je la fis : ce puits ne me préfenta d’autre
■ idée que celle d’une Angularité, ou d’un jeu de la Nature^
■ Mais quand j’ai, vifité de nouveau la montagne, dans l’intention
■ de rechercher les traces des anciens courans, ce puits eft de-
■venu pour m o i , fi non le puits de la v é r ité , du moins un
■ monument intérefiànt & inftructif. I
J’ai obfervé qu’il eft cannelé du haut en bas, de filions larges
& profonds ; ces filions régnent fur toute la circonférence intérieure,
qui eft de plus de 300 pieds, & dans toute la hauteur
qui .va à 1 60. Ces cannelures font beaucoup trop larges
& trop profondes, pour que les eaux des pluies ayent pu les
tracer , d’autant que ce- puits 1 eft préfqu’au haut de la montagne,
& qu’il n’y a point de ravin ou de canal confidérable
qui y conduife des eaux, enforte qu’il ne s’y jette prefque pas
d’autres eaux que celles qui tombent direétement du Ciel. Je
Traces des
courans qu*
ont creufé
ce puits.