Départ de
Sailcnehe.
C H A P I T R E VD
E S A L L E N C H E A S E R V 0 Z.
§. 482. T A route de Sallenche à Chamouni e'toit autrefois
dangereufe, même à Cheval ; on ne pouvoit la faire en fûreté
qu’à pied ou fur des Mulets du pays. Mais la grande affluence
des étrangers a engagé la province à faire élargir les chemins,
& à adoucir un peu les pentes les plus rapides. Depuis lprs
on peut faire cette route fur des chariots étroits & légers:
les gens de Sallenche en tiennent de tout prêts pour les Dames
& pour les Voyageurs qui craignent de monter à Cheval.
On vînt nous en offrir dès notre a rrivée, mais j’avois écrit à
Chamouni pour qu’on nous envoyât des Mulets qui puffent
nous fervir pour tout notre v o y a g e , & mon ancien & fidele
g u id e , P i e r r e S im o n , de la paroiffe des P r è s , à qui j’avois
donné cette commiflion, nous en amena un nombre fuffifant
pour nous , nos Domeftïques & notre bagage.
Je voulois partir de bon ma tin , pour arriver de bonne
heure à Chamouni, & pour éviter la chaleur qui eft extrême
dans la vallée , au fond de laquelle nous avions encore à fair»
le tiers de notre voyage.
N ou s fûmes prêts de fort bon matin: on quitte fans regret
les lits de Sallenche ; mais la dévotion de nos Muletiers Cha-
mouniars nous contraignit à ne partir que tard ; c’étoit un Dimanche
, & les jours de fê te , ces bonnes gens ne veulent point
fe mettre en route fans avoir entendu la Meffe. En les attendant
nous fîmes l’obfervation du Magnétometre que nous
plaçâmes au bord de la Sallenche , fur un grand plateau de
Granit, & nous partîmes enfin un peu après fept heures.
§. 483. En retournant à St. M a r tin , car il faut de Sallenche
revenir fur fes pas , & paffer de nouveau l’Arve vis-à-
vis de ce village , on a en face une montagne ca lca ire , qui
doit être élevée de plus de 12 0 0 toifes au deffus du L ac de
Geneve. Sa çime qui fe nomme l'Aiguille de V a r e n s ,a une
forme triangulaire ; elle préfente de deux côtés les tranches
efcarpées de fes couches; & la pente rapide de ces mêmes
couches forme la troifieme face de la pyramide; Le fonunet
def cette haute montagne eft compofé d’une pierre calcaire
grife ; mais plus bas 011 y voit des bancs d’une pierre b rune , à
couches m in ce s , la même apparemment que nous avons déja>.
obfervée dans- ces montagnes,. Sa bafe eft vraifemblablementr
d’Ardoife ; il y en a des carrières au deffus de St. M a rtin , &
on en fait ufage dans le pays même; j’en ai vu là de très-belles,
légères & fo lid e s , de l ’efpece que N P â lle r iu s a nommée Ar-
defia tegularis, Sp. 1 y 7 - Ces ardoifes feraient d’un gran d
débit à G en e v e , fi l’on en facilitoit le tranfport en permettant
la navigation de l’Arve..
§. 484. En Sortant de S t Martin o n entre dans une belle-
route re ctiligne , tracée fur le fond horizontal de la vallée.
On regrette en faifant cette ro u te , la quantité de terrein que
les débordemens de l’Arve rendent inutile , fur-tout fi l’on réfléchit
combien les terres arables font précieufes dans ces. pays
Haute mom
tagne au
deffus de Si.
Martin.
montueux. Le fond de la vallée eft fi plat., que pour peu?
que la riviere fe déborde , elle l’inonde en entier. meme. dans-
les tems ordinaires elle en couvre une grande partie , & le-
moindre obftacle lui fait changer de f it , prefque d’un jo u r -à
Dégâts cfc
l ’Arve;