Noms des
villages les
plus proches.
Saifon à
choiiir pour
voir ce phe-
nomene.
Defeription
de la perte
du Rhône.
Entonnoir
dans lequel
le Rhône
s’engouffre.
3:26 L 4 v E R T E D ' U R H O N E. Chap. XVII.
O n croiroit que ces rochers qui paroiffent durs fous le
marteau, auroient dû mettre un obftacle aux érofions du Rhône
& l’empêcher dé s'enfoncer davantage-; mais ail contraire, il a
pénétré .dans ces rochers beaucoup plus avant que dans les
terres ; il les a même creufés au point de fe ca che r, & de
difparoître entièrement. Ç ’eft-là ce qu’on appelle la Perte
du Rhône.
Il y a -peu de Voyageurs qui faffent la route de Lyon à
G en e v e , fans mettre pied à terre pour voir cette Angularité.
Les payfans de C o u p y , hameau fitué à un quart de lieue an
deifus de la Pofte de V an ch y , & qui domine immédiatement
la place où le Rhône fe p e rd , follicitent les Voyageurs d’aller
voir cette merveille.
E l l e n’eft pas également admirable dans toutes les faifons.
En é té , lorfque les eaux font grandes , elles ne peuvent pas’
toutes entrer dans l’excavation du rocher : mais en hiver Se
au printems, le Rhône s’engloutit & difparoît en entier, &
le fpectacle qu’il préfente a lo r s , eft très-intéreifant.
§. 403. L e Rhôn e , avant d’arriver à fa p e r te , coule comme
nous venons de le voir , dans un lit profond qu’il s’eft creufé
dans des- terres argilleufes. Ce lit redevient cependant plus
large ; & comme il eft très-égal & en pente d o u c e , les eaux
ne font point a g ité e s , & coulent avec une tranquillité majef-
tueufe. Mais lorfque le Rhône arrive fur le banc de rocher
qui palle fous ces ¡argilles, tout à coup le rocher manque
fous lui ; fon lit prend la forme d’un entonnoir, le fleuve entier
s’engouffre dans cet entonnoir , avec une vîteffe & un fracas
p rod ig ieu x ; fes eaux fe refoulent mutuellement, s’agitent, fe
L A P E R T E D U R H O N E . Chap. XVII. 327
foulevent & fe brifent en écume. Lès rochers qui forment
cet entonnoir, fe refferrent même à un tel point qu’il y a une
place où il ne refte pas deux pieds de diftance d’une rive à
I l’autre; enforte qu’un h om m e , même de moyenne taille , pour-
roit tenir un de fes pieds fur le bord qui appartient à la France,
& l’autre fur celui qui dépend de la S a v o y e , & voir entre fes
I jambes ce beau fleuve qui femble frémir de colere , & s’efforcer
de paffer avec toute :1a vîteffe poflîblè dans ce défilé
qu’il ne peut pas éviter. Mais cette pofition feroit encore
plus périlleufe que brillante ; ces pointes de rochers , in cliné es ,
& mouillées fans eeffe par les eaux qui rejailliffent fur e lle s ,
formeroient un piédeftal trop gliffant au deffus d’un gouffre auffi
| terrible.
Un peu au deffous de ce gou ffre ,, les deux rives font plus
écartées , & l’on voit le' Rhône couler affez tranquillement a,U
fond d’un canal qu’il s’eft creufé dans le roc. Ce canal eft
large d’environ 30 pieds' dans le haut, & il Conferve cette
largeur jufques à la- profondeur de 30 ou 33 pieds ; mais là
il fe refferre confldérablement : il s’eft trouvé à cetté profondeur
un banc de rocher plus dur que les autres , & qui ne
s’eft pas laiffé ronger dans toute la largeur du canal : ce banc
n’a qu’un ou deux pieds d’épaiffeur ; enforte que le Rhône a
creüfé par deffous prefqu’autant que par deffus. Ce banc plus
dur forme d on c dans l’intérieur du canâl une faillie , ou une
efpece de c o rn ich e , qui de chaque côté s’avance de 8 ou 1 o
pieds, mais qui eft pourtant ouverte dans le milieu , & laiffe
apppFcevoif la furface de l’eau qui coule tranquillement dans
le fond du canal. Cette corniche divife ainfi le canal en deux
parties, l’une fupérieure , l’autre inférieure : celle- de deffus e it
un peu pius l arg e que celle de deffous. Le Rhône renferme
Canal dans
lequel coule
le Rhône
après s’être
engouffré.